Chapitre 34

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Versailles


Ange s’enferma dans son bureau, autant pour passer ses coups de fil discrètement que pour laisser travailler son subordonné sans influence. À cette heure de la soirée, les bureaux n’étaient pas encore totalement vides, mais il ne pensait pas avoir de visiteurs.

Il commença par appeler la gendarmerie de Rambouillet, dont dépendait le domicile de White Horse. Il n’était pas certain de pouvoir obtenir les informations requises à cette heure, mais il avait un peu de temps à occuper. Il pourrait au pire laisser un message au gradé de permanence.

L’adjudant-chef Le Fort décrocha à la troisième sonnerie. Après s’être présenté, Ange exposa la raison de son appel.

— Nous recherchons des renseignements sur un dénommé Gael Le Callec’h, qui serait domicilié aux Bréviaires, haras des Chênes. Il pourrait être impliqué dans une enquête criminelle.

— C’est en rapport avec la femme que l’on a retrouvé près de l’étang il y a quelques jours ?

— En effet. Nous avons des informations qui nous laissent penser que cet individu pourrait être lié à cette affaire.

— On se disait bien qu’un jour ou l’autre, ce gars là ferait une connerie. C’est un vrai facho qui vit comme un paramilitaire à la lisière de la forêt. Des randonneurs ont rapporté des tirs d’armes automatiques à proximité de chez lui.

— Vous n’avez rien fait ?

— Vous savez Commandant, on a encore des terrains de l’armée dans le coin, alors on a plutôt pensé à des exercices, et puis on ne peut pas lancer une perquisition sur des bruits.

— Que pouvez-vous me dire sur ce type ?

— Comme je vous l’ai dit, il vit seul dans une dépendance du haras. Il s’occupe des chevaux et fait différents travaux. Les propriétaires vivent à Paris et ne sont pratiquement jamais là. Il élève des chiens de combat, genre rottweiler ou pitbull. Il roule dans un 4x4 acheté aux surplus de l’armée et ne s’habille qu’en treillis. Vous voyez le genre ?

— Pas vraiment le type avec qui je partirais en vacances !

— De toute façon, il ne quitte jamais son bled bien longtemps. On nous a demandé de le garder à l’œil il y a quelques temps car il a été impliqué dans des bagarres entre bandes, cranes rasés contre anarchistes. Il a été mis en garde à vue, mais ce n’est pas allé plus loin.

— Je vous remercie Chef, ça correspond bien au profil qu’on nous a indiqué. On va faire quelques recherches complémentaires de notre côté, gardez un œil discrètement sur le lascar, qu’il ne nous file pas entre les doigts. Je vous rappellerai si nous décidons d’intervenir sur votre secteur.

— À votre service, Commandant.

— Bonne fin de soirée.

Ange Segafredi réfléchit un moment à ce que lui avait rapporté le gendarme. Le profil du palefrenier correspondait bien, mais il se demanda pourquoi un type du genre commando aurait étranglé sa victime, plutôt que d’utiliser un couteau ou une arme à feu. S’ils ne progressaient pas rapidement, il lui faudrait peut-être faire appel à un profileur, pour mieux comprendre ce qui lui apparaissait de plus en plus comme un rituel. En tout état de cause, Garancières n’était pas très loin des Bréviaires. Il pouvait facilement emmener sa victime là-bas, mais où l’avait-il ramassée ?

A ce stade de ses réflexions, Boris vint frapper à la porte.

— Entre, Boris !

— J’ai analysé les fadettes des portables de White Horse. Il en a un qui sert pour ses appels ordinaires, principalement aux heures ouvrables, vétérinaire, fournisseurs, quelques conversations qui doivent correspondre à des clients du haras. Le second n’est utilisé que le soir ou la nuit, très peu d’appels, il utilise surtout une messagerie cryptée.

— Voila qui n’est pas vraiment un comportement d’homme honnête.

— Le plus intéressant, c’est le bornage. Le premier cellulaire circule en journée, presque exclusivement dans un rayon d’une vingtaine de kilomètres. Le second ne bouge que la nuit, sur des distances plus importantes, jusqu’à une cinquantaine de bornes. La nuit du deuxième meurtre, celui de Garancières, il était dans le secteur.

— Je crois que c’est bon. On en a assez sur lui.

Ange rapporta les propos du gendarme Le Fort.

— Tu as trouvé des données sur le Saint-Cyrien ?

— Pas encore, je me suis concentré sur Le Callec’h. Je vais m’y mettre.

— OK, j’ai encore un appel à donner. Je passe te voir ensuite.

Boris quitta le bureau en refermant la porte. Ange s’installa confortablement pour appeler Julie.

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