La Résonance du Silence
Je suis seule dans ce monde, là où tout semble suspendu, figé dans un silence lourd. Ma respiration résonne dans l’air. Chaque bruit est amplifié, chaque geste, chaque pensée. Le froid s’intensifie, tout autour de moi est devenu irréel. Je ne sais même plus si je suis encore en train de rêver ou si c’est ce qui est censé être la réalité.
Le sol métallique sous mes pieds, la lumière violette dans le ciel, les formes indistinctes autour de moi… tout ça me paraît à la fois étrangement familier et terriblement distant. Comme un endroit que j’aurais déjà vu, mais d’une manière déformée, comme un souvenir lointain qu’on tente de saisir mais qui s’échappe à chaque fois qu’on croit le tenir.
Je regarde autour de moi, mais il n’y a aucune sortie. Il n’y a rien d’autre que ce vide, ces ombres mouvantes, et moi, là au milieu, incapable de bouger. Je suis comme prise au piège dans un autre univers, un espace qui semble m’engloutir petit à petit. Et il n’y a pas de Noah. Pas de trace de lui. Pas même un écho de sa voix. Pourtant, je sais qu’il est là, quelque part. Il m’observe. Il attend. Il est le fil conducteur de cette réalité tordue, et je suis la marionnette.
Soudain, un bruit. Un souffle. L’écho d’une présence. Je me retourne vivement, le cœur battant. Une silhouette apparaît dans l’ombre, à l’autre bout de l’espace. C’est flou, comme un mirage, mais je sais que ce n’est pas un rêve. Ce n’est pas un fantôme. C’est un être, une forme vivante.
Je m’avance, poussée par une force inexplicable, et chaque pas semble résonner dans ce silence lourd. Plus je me rapproche, plus la silhouette devient nette. Et quand je suis assez proche pour distinguer des traits, je m’arrête brusquement.
C’est moi.
C’est mon propre reflet. Ou plutôt, ce qui aurait dû être moi, mais avec quelque chose en plus. Ses yeux… non, mes yeux, sont d’un bleu intense, presque lumineux, et son regard est froid, distant. Une expression figée, mais pleine de sens. La bouche légèrement tordue dans une sorte de sourire triste, comme si tout ce que je voyais était à la fois une vérité et un mensonge.
Elle (ou plutôt, "je") me regarde sans un mot, mais tout autour de nous semble vibrer, comme si cette rencontre était l’élément déclencheur d’un phénomène plus grand. Plus d’ombres bougent autour de moi. Elles se dessinent de plus en plus, et une multitude de silhouettes apparaissent, toutes avec des regards fixés sur moi. Elles se déplacent lentement, comme des spectres qui rôdent dans l’ombre.
Je suis noyée dans cette mer d’ombres. L'air devient irrespirable. La lumière violette se fait plus intense, mais tout semble prendre une forme de plus en plus étrange. C’est comme si chaque silhouette représentait une version différente de moi, un reflet des choix que j’aurais pu faire, des vies que j’aurais pu vivre. Et tout ça s’effondre dans ce même vide, ce même silence, cet entre-deux, ce monde où les lois de la réalité n’ont plus de prise.
Je ferme les yeux un instant, me concentrant sur ma respiration. Quand je les rouvre, la silhouette de moi-même est toujours là, mais plus proche. Elle m’observe d’un air serein, presque comme si elle savait tout ce qui va se passer. Et soudain, sa bouche s’ouvre, mais c’est une voix qui sort d’elle, pas la mienne.
« Tu n’es pas prête, » dit-elle. « Pas encore. »
Je recule. Le souffle court. Je n’arrive pas à comprendre. Tout ça… c’est trop. Trop lourd à porter. Trop compliqué à saisir.
« Pourquoi… pourquoi est-ce que tu… pourquoi est-ce que je fais ça ? » La question sort avant même que j’ai pu réfléchir.
Elle (ou moi, ou elle ?) sourit tristement. « Parce que tu n’as pas le choix. Parce que tu as ouvert la porte. Et maintenant, il n’y a plus de retour possible. »
Un frisson me parcourt l’échine. C’est comme si une vérité cachée venait d’émerger, une vérité qui m’échappe mais qui me glace le sang. La porte, cette lumière, tout ça… c’était prévu. C’était écrit. Et je n’étais qu’un pion dans ce jeu.
Soudain, tout autour de moi se met à trembler. Le sol se fissure, des craquements sourds résonnent dans l’air. La lumière s’intensifie, devenant presque insupportable, et la silhouette de moi-même commence à se dissoudre dans l’ombre, comme si elle n’avait jamais existé. Et au moment où elle disparaît complètement, je suis projetée en avant, comme si un souffle invisible me poussait. Je ferme les yeux, pris dans un tourbillon de lumière et de bruit.
Quand je les ouvre, je suis de retour. De retour dans le monde réel. Mais quelque chose a changé. Je sens que ce monde est désormais brisé, que je ne peux plus le voir de la même manière. Je ne sais pas ce que j’ai vu ni où j’ai été, mais je sais une chose : je suis marquée. Marquée par ce monde étrange. Et maintenant, je dois affronter la vérité.
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