La Reine de Saba
J’adorais jouer à la princesse. La salle à manger avait de larges baies vitrées que ma mère avait habillées avec de grands rideaux en tissu léger. Pour me déguiser en princesse, je prenais le bas du rideau et me drapais dedans. Et là, enroulée dans les voilages, je me faisais mon film. J’inventais des histoires, que j’étais une princesse indienne à dos d’éléphant et que je rentrais dans mon palais, ou bien une princesse arabe dans son sérail. Je rejouais tous les rôles des personnages de princesse découverts dans mes lectures.
Quand ma mère me tombait dessus et qu’elle découvrait l’état de ses voilages tout fripés et tout chiffonnés, elle me filait une baffe en criant : « Tu vas voir si tu vas te prendre pour la Reine de Saba. Tiens, prends ça ». Et la princesse finissait toujours en larmes.
Pendant très longtemps, je me suis demandée qui était cette fameuse Reine de Saba, à qui ma mère me comparait toujours. En fait, on la retrouve dans les récits bibliques, coraniques et hébraïques. Elle était reine du royaume de Saba correspondant aujourd’hui à des régions d’Ethiopie principalement, ainsi que du Yémen et de l’Erythrée. Elle arriva à Jérusalem, accompagnée d’une grande suite, avec sa caravane de chameaux chargés d’épices, d’or et de pierres précieuses, qu’elle offrit au Roi Salomon.
Finalement, ma mère avait raison, la Reine de Saba correspondait très bien au style de personnages que j’inventais.
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