La salle du tribunal est pleine à craquer ; la population est venue en nombre pour assister au jugement de cette femme de peu de vertu. Au menu ce jour-là : condamnation, sentence, humiliation...

Le juge Tarr prend la parole. Il s'adresse à l'accusée. La jeune femme a des cheveux châtains mi-longs et sans attache. Elle porte un maquillage léger, un vieux trench-coat et une paire de talons légèrement élimés, néanmoins élégants. Elle paraît digne et sereine ; les regards mauvais et les ricanements autour d'elle ne semblent guère la toucher. Son regard est aussi droit et franc que son assise ; ses bras et ses longues jambes fines restent immobiles et croisés. Elle respire le calme dans cette salle en ébullition.

- Madame SKy, comment souhaitez-vous plaider ?

- Coupable, Votre Honneur.

- C'est bien, mais pour la cour ici présente et par égard pour toutes les personnes qui se sont déplacées aujourd'hui, je vous demande de nous rappeler ce que vous avez fait, Madame SKy.

- Rien, votre honneur.

- Si vous n'aviez rien fait, Madame SKy, vous ne seriez pas là. Dites-nous de quoi vous êtes accusée.

- De paresse, votre honneur.

- Je confirme, Madame SKy !

Le juge Tarr se tourne vers la foule et enchaîne :

- J'en profite pour rappeler à la cour et au jury que l'oisiveté est la mère de tous les vices !

Après avoir balayé la foule de son regard réprobateur, le juge se retourne à nouveau vers l'accusée et ajoute sur un ton de réprimande :

- D'ailleurs, votre paresse et votre oisiveté ne sont pas les seuls chefs d'accusation, n'est-ce pas, Madame SKy !

- En effet, votre honneur. On me reproche la luxure. On m'accuse de pousser les hommes au vice et les femmes à la jalousie. Mais, là, j'avoue ne pas comprendre, votre honneur.

Le juge se tourne à nouveau vers la cour et le jury :

- Braves gens, je salue votre hardiesse. Il en faut pour venir assister à cette audience. Vous allez probablement entendre des choses insoutenables aujourd'hui, mais vous faites votre devoir : celui de prévenir le vice et de préserver les plus faibles des tentations auxquelles ils pourraient être exposés si nous n'agissions pas.

Puis, se retournant vers l'accusée, le juge continue :

- Pousser les honnêtes citoyens de notre belle ville à la luxure, à l'envie et à la jalousie ! C'est indigne d'une femme, Madame SKy.

Sur un ton impatient, il ajoute :

- Trève de tergiversations : venons-en aux faits maintenant. Racontez-nous.

- Il doit y avoir erreur, votre honneur. Je n'ai rien à révéler.

- Arrêtez de nier, Madame SKy, il n'y a pas de doute possible. Nous savons tout et nous avons des preuves ! Laissez-moi vous rafraîchir la mémoire, Madame SKy : expliquez donc à cette cour de braves gens ce que vous faites, tous les matins, au moment où le soleil se lève.

- Je ne vois pas de quoi vous voulez parler, votre honneur. À ce moment là, je me baigne dans la rivière, au milieu de la forêt qui est derrière chez moi, loin de notre belle ville. C'est un endroit où il n'y a jamais personne. Si quelqu'un qui me ressemble commet des méfaits en ville si tôt le matin, ce n'est pas moi.

- Nous parlons bien de ce que vous commettez chaque matin sous la cascade du fou, Madame SKy ! Osez donc avouer devant cette cour les choses indignes qui ont lieu autour de cette chute d'eau, dans l'eau glacée et sous les premiers rayons chauds du soleil, Madame SKy !

La foule retient son souffle et les regards sont pendus aux lèvres de l'accusée. En réalité, les rumeurs ont déjà fait le tour de la ville comme des électrons tournant autour des atomes et tout le monde connaît déjà la réponse à la question. Ce qu'attendent les personnes présentes, ce sont des aveux sortant de la bouche même de cette femme de peu de vertu. On est venu entendre des confessions, des détails, des révélations, du croustillant...