Nouveau meurtre
— ... ! Et personne n'a rien vu ni entendu ? Mais c'est quoi ce bordel ? Ça s'est quasiment passé devant vous ! Fouillez-moi cette auberge de fond en comble ! Lieutenant, vous qui aviez de l'humour à revendre tout à l'heure vous m'avez bien dit que les toilettes avaient été inspectées ?
— C'est exact commandant, il n'y a pas d'autre porte que celle qui donne dans la salle, et personne n'est passé par la fenêtre. J'ai vérifié les lieux avec le brigadier, ils étaient vides dans les trois WC, il n'y a aucun autre endroit où se cacher.
— Vous avez entendu quelque chose ?
— Non rien, aucun bruit de lutte ou autres, aucun cri. Au bout d'une dizaine de minutes, ne la voyant pas revenir, ses amies se sont inquiétées, alors nous sommes allés voir et l'avons trouvée, étendue sur le sol devant les lavabos, morte, égorgée, le ventre ouvert. Il n'y avait absolument personne. J'ai ouvert la fenêtre qui était fermée de l'intérieur, pour appeler le garde qui m'a confirmé que si quelqu'un était sorti par là, il l'aurait vu.
— Commandant ! Venez voir dans le WC du fond...
— Oui Gym, tu as trouvé quelque chose ?
— Regardez ces traces bizarres au sol et là, on dirait de la poussière de plâtre et quand on examine le plafond, il est composé de grandes dalles posées sur des rails métalliques, je crois qu'il en a soulevé une , est descendu commettre son forfait et est reparti par là, il est sans doute caché à l'étage.
— Prends des hommes avec toi et va voir... Vous êtes la propriétaire, qu'y a-t-il là-haut ?
— Mon appartement , mais au-dessus des lavabos c'est le toit en pente et il y a un grenier non utilisé, il n'y a pas de plancher , le faux plafond est accroché aux poutres. On y accède par une porte à droite en haut de l'escalier...
— Vas-y Gym, faites gaffe, l'homme est dangereux ! Que chacun se tienne prêt et que les équipes se reforment à l'extérieur...
— On y est commandant, il n'y a personne ici, il a utilisé une échelle pour descendre puis est remonté et s'est servi de l'échelle pour passer sur le toit par un vasistas , le brigadier est monté inspecter les lieux, il n'est plus sur le toit. Il a dû profiter du moment où les hommes sont entrés pensant qu'il était à l'intérieur quand on a trouvé le corps.
— Finissez de fouiller l'étage, mais je veux un hélico pour ratisser tout le secteur, des barrages dans toute la région ! Lieutenant faites le nécessaire auprès de la gendarmerie, j'appelle le préfet.
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Dans le bureau du commissaire
— Entrez commandant, prenez place, je vous présente Madame Louise Dissète la Substitut du procureur chargée de notre affaire. Madame la Substitut, je crois que vous connaissez déjà la commandante Marie Carelle ?
— Nous nous sommes croisées brièvement lors des constatations du précédent meurtre.
Tu parles ! Tu m'as complètement ignorée, oui. Quelle pimbêche !
— Bien, commandant, vous aviez trente hommes avec vous, toute la zone était sous surveillance depuis six heures ce matin, comment a-t-il pu entrer, et surtout, comment a-t-il pu vous échapper ?
— Il a dû profiter de la soirée des supporters de l’équipe de foot locale qui se tenait hier, dans l’auberge, de vingt heures à minuit, pour se glisser au milieu des clients, se camoufler dans la cohue pour monter à l’étage sans se faire remarquer, et attendre, caché dans le grenier au-dessus des toilettes. Après le passage des agents chargés d’inspecter les lieux, il a tranquillement soulevé une plaque du faux plafond, descendu par l’échelle et patienté jusqu’à ce que Madame Hélène Tiréssis entre seule dans le local.
Le meurtre accompli, il est reparti par le même chemin, a remonté l’échelle, remis la plaque en place et s'est enfui par la lucarne sur le toit. Les policiers situés à l’extérieur sont alors entrés en force dans l’établissement croyant qu’il s’y était dissimulé. Il n’a eu qu’à sauter au sol par-derrière et disparaître dans la forêt pendant que nous le cherchions à l’intérieur. Quand le lieutenant Janau a compris qu’il était passé par le plafond, il était déjà loin. On ne l’a pas retrouvé.
— Il y a quelque chose de bizarre dans cette affaire, vous avez relevé des empreintes sur la scène du crime de Madame Fro, la précédente victime, elles ne figuraient pas dans notre banque de données, comme il est Britannique, pour ce que l’on sait, nous les avons adressées à Scotland Yard qui les a identifiées comme celle d’un homme disparu… depuis mille huit cent quatre-vingt-huit.
— Vous voulez dire mille neuf cent quatre-vingt-huit, patron !
— Non vous m’avez bien entendu, mille huit cent quatre-vingt-huit ! Et le plus incroyable, c’est que ce sont celles du dénommé Jack l’éventreur de sinistre renommée !
Ça y est ! Il débloque complètement.
— C’est impossible patron, il aurait au moins cent soixante ans et sans doute plus.
— Elle a raison, Monsieur le commissaire, il ne peut s’agir que d’une erreur ou alors cet homme utilise de fausses empreintes, bien que je n’aie vu cela que dans des séries télé plutôt farfelues.
Et l'autre, là, il faut qu'elle ramène sa fraise... J'n'ai pas besoin de quelqu'un pour enfoncer les portes que j'ai déjà ouvertes.
— Les Britanniques ont conservé toutes les preuves et indices relevés à l'époque, il n'y a aucun doute, ils ont vérifié à plusieurs reprises. Nous sommes là, dans une situation totalement inédite. Prenez ça, commandant, c'est le rapport de Scotland Yard que j'ai reçu par e-mail il y a un quart d'heure. Tenez-moi au courant des avancées de votre enquête à tout moment.
Et dire qu'il va falloir que je raconte ça à mon équipe maintenant... On nage en plein délire...
— Entendu, patron, je vais briefer mes hommes et mettre un plan d'action sur pied.
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(à suivre)
JI 24/06/20
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