Chapitre 2 : Bénis par Rhiam
« La Caste des Mahedi, ou Sœurs Rouges, est composée uniquement de femmes. Ce qui, dans une société majoritairement patriarcale, provoque colère, méfiance et jalousie. Dans certaines cités, les Mahedi ne parviennent pas à s’installer, sous peine d’être passées par le fil de l’épée. Jadis nombreuses et puissantes, ces sorcières ne représentent presque plus rien aujourd’hui. La défiance et la haine, propagées par la Foi de Rhiam, se sont chargées de leur déclin. »
Chroniques d’Ismahen (Livre du Lion)
— Que comptent-elles me faire ? demanda Sahar, interloquée.
— Je ne connais pas leurs ambitions, avoua Rimah, mais je pense qu’elles comptent savoir si tu es sensible à la magie ou non.
Sahar secoua la tête, troublée.
— D’après les livres d’Histoire, le Don Ancien a disparu à la fin du règne de Mithra Zhaleh. Ce n’est donc plus possible d’être sensible à la magie. N’est-ce pas ?
— Depuis quand de vieux parchemins poussiéreux détiennent la vérité absolue, Sahar ? Bien que je ne crache pas sur le travail remarquable des Frères Blancs, qui fournissent chaque jour des efforts considérables pour consolider nos connaissances, je reste sceptique quant à ce qu’ils savent réellement sur le Don Ancien. Ce sont juste des aigris qui ne tolèrent pas qu’une femme puisse utiliser la magie, et pas eux.
— Alors selon vous, Mère, c’est encore possible… de devenir magicienne ?
— Les Mahedi existent encore bel et bien, non ? Et ce, malgré ce que les prêtres propagent comme rumeurs horribles à leur sujet.
Sahar ne put qu’admettre cette vérité, même si elle n’avait jamais eu la chance de croiser le chemin d’une Mahedi.
— Comment je peux savoir si j’ai des pouvoirs ?
— Concentre-toi et écoute la Partition. Si tu l’entends, tu…
Une musique résonna dans le palais, empêchant la reine de terminer sa réponse.
Rimah Zhaleh déposa son verre de vin, se leva et plissa sa robe. Sahar l’imita, sachant qu’elle n’en apprendrait pas plus sur la magie pour le moment.
— Les Amjad sont là, déclara-t-elle. Ne les faisons pas attendre. La patience n’est pas l’une de leurs qualités.
Sahar se fendit d’un sourire : elle aimait le franc-parler de sa mère. Elle tenait cela d’elle mais contrairement à la reine, elle dérapait encore souvent. Ses propos dépassaient ses pensées. Plusieurs fois, elle avait dû présenter des excuses publiques, sous le regard de ses frères aînés, parce que sa verve qui manquait de tact offensait des nobles et des prêtres.
Rimah et Sahar gagnèrent le hall, au carrelage grenat et blanc qui arborait des motifs géométriques qui s’entremêlaient pour former un assemblage complexe, semblable à un soleil.
Le Soleil, la lumière sacrée, représentait l’Unique. Aucune maison noble ne pouvait arborer ce symbole, sous peine d’être accusé de blasphème par les Frères Blancs. Seul le Lion-sur-Terre jouissait de ce privilège, car il était le fils spirituel de Rhiam.
Dans le halo de lumière, Asmar se trouvait debout aux côtés de Rahim. L’aîné portait une longue tunique grenat sur laquelle se pavanait un majestueux lion brodé en fils d’or. Un foulard crème serrait sa taille et tombait jusqu’à ses genoux.
Sa femme, Nada Akrim, se tenait à sa droite, vêtue d’une robe cyan avec une capuche posée sur sa chevelure sombre. Elle tenait par les épaules ses fils, des jumeaux de trois ans. Son ventre rond présageait la naissance prochaine d’un troisième enfant.
Rahim inclina la tête quand sa mère passa devant lui. La reine se positionna devant ses deux fils et sa fille. Sahar, elle, s’arrêta à gauche d’Asmar et demeura silencieuse.
— Gardez la tête haute, ordonna la reine. Nous devons leur montrer que la Lumière de Rhiam est posée sur notre famille, non sur la leur.
— Avec joie, Mère, sourit férocement Rahim.
— Qu’ils restent dans les Ténèbres de la Grande Ombre, ajouta Rimah Zhaleh.
Les portes d’or s’ouvrirent et des gardes entrèrent.
Leurs boucliers étaient ronds et ornés de trois scorpions noirs, symboles de la maison Amjad. Leurs plastrons sombres laissaient leurs bras dénudés et leurs tuniques de lin blanc descendaient jusqu’à leurs genoux. Ils étaient chaussés de sandales en cuir et leur tête était casquée. Peu rassurée par l’aspect féroce de ces guerriers, Sahar jeta un coup d’œil à leurs propres soldats, postés un peu partout dans la pièce. Leur présence soulagea la princesse, qui se détendit.
Derrière les gardes arriva un couple à l’allure altière.
Il s’agissait sans doute d’Abdel Amjad, seigneur d’Aslem, et de son épouse, Myriam Belkel, connue pour être sa cousine. Sahar abhorrait ce genre d’union.
L’homme, trapu mais vigoureux, arborait fièrement une très longue natte sertie de pierres précieuses et une barbe taillée à la perfection. La femme, plus grande, déployait son élégance et sa majesté par les vêtements qu’elle portait. Elle embrassa la pièce d’un regard arrogant avant de poser ses yeux sur Sahar, qui s’obligea à demeurer silencieuse. Mais la princesse n’aimait pas la façon dont cette femme, de rang inférieur à sa famille, la scrutait.
A la suite du couple, cinq jeunes personnes pénétrèrent dans le palais : quatre garçons et une fille. Les enfants de la maison Amjad, au vu des scorpions présents sur leurs habits ou en broche pour tenir leurs capes. Sahar s’attarda sur le fils aîné, Rayan. Celui qui lui était promis. Même s’il était très beau, savoir qu’il appartenait à la maison Amjad et qu’il provenait d’une union consanguine l’empêchaient de le trouver plaisant.
Le deuxième fils, Elias, avait une tête de moins que son aîné et paraissait moins vaillant. Il baissait la tête et tripotait nerveusement la boucle de sa ceinture. Contrairement à sa jeune sœur Nayla, qui faisait la même taille que lui et projetait sur les Zhaleh un regard provocateur. Quant aux deux derniers garçons, ils n’étaient encore que des enfants. Ils furent présentés à la reine sous les pseudonymes d’Ilyan et d’Iyad.
Des esclaves entrèrent dans la pièce et apportèrent des coffres d’or au poids conséquent, car ils les portaient à bout de bras. Sans un mot, ils les posèrent aux pieds de la reine, s’inclinèrent et s’agenouillèrent devant elle. Ils venaient du peuple dragan, au vu de la pâleur de leur peau.
Sahar décida de se focaliser sur la façon dont l’entretien de bienvenue allait se passer.
— Que la Lumière éclaire vos pas, déclara le seigneur Abdel Amjad. Puisse notre union se perpétrer sur des générations. Nous vous offrons ces maigres présents, en gage de notre bonne foi et de notre bienveillance.
Ces maigres présents, pensa Sahar avec un rire ironique.
Soit ils étaient vraiment très riches, et dans ce cas ils cherchaient à impressionner la famille royale, soit ils mentaient et venaient de s’appauvrir.
— Que le Soleil vous bénisse, répondit poliment Rimah. La maison Zhaleh vous souhaite la bienvenue à Ilmaz et vous remercie pour vos cadeaux. Cette marque de générosité ne sera pas oubliée. Je vous invite à prendre quelques rafraichissements en attendant la venue du Grand Frère Blanc pour le mariage de votre fille avec mon fils. Mon époux s’excuse de ne pas être présent : un incendie s’est déclaré dans la ville.
— C’est fort dommage, concéda le seigneur. Il devait s’entretenir avec moi d’un sujet de la plus haute importance. Il voulait renforcer nos lignages, d’après ce que j’ai lu dans le faucon qu’il m’a envoyé. Un deuxième mariage est-il d’actualité ?
La reine coula un bref regard vers Sahar, qui supplia intérieurement sa mère de taire ce sujet.
— Je laisserai le Lion-sur-Terre vous exposer son projet, Messire.
Sur ce, elle les invita à entrer.
Les échanges, courtois en apparence, semblaient tendus. Cela n’échappa pas à l’instinct de Sahar, qui lui soufflait de rester méfiante. Un mot de travers pouvait mettre le feu aux poudres. Le seigneur Amjad parut déçu de ne pas être accueilli par le Lion-sur-Terre. Il masqua cependant cette marque de déshonneur par une risette faussement compréhensive.
La reine conduisit ses invités dans un salon richement décoré. La reine se plaça entre ses deux fils ; Sahar s’assit à côté de l’épouse de Rahim. De sa position, elle pouvait surveiller du coin de l’œil l’attitude de Rayan Amjad, qui se tenait tout aussi fier et droit que son père.
Une fois confortablement installées, les matriarches échangèrent quelques politesses avant de converser économie et politique. Sahar écouta leurs paroles avec attention et sirota son jus de grenade, tandis que sa mère régalait son invitée de paroles mielleuses. La reine excellait dans la manipulation des esprits des gens pour les ranger de son côté. Mais là, la princesse estimait que sa mère prenait trop de pincettes. Les Amjad étaient puissants, certes, mais l’étaient-ils à ce point ? Leur influence pouvait-elle faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre ? Sahar savait que les tensions entre leurs familles venaient de l’époque de Mithra Zhaleh et ne s’étaient pas apaisées depuis. La moindre querelle, même bénigne, pouvait rallumer l’étincelle d’un conflit de plus grande ampleur. Deux mariages suffiraient-ils vraiment à rétablir une paix solide et pérenne entre deux maisons qui se haïssent et se méprisent ?
Sahar se saisit de sa coupe et s’apprêtait à boire quand elle captura le regard insistant que lui lançait Nayla Amjad depuis quelques secondes. Elle devait avoir le même âge qu’Asmar, mais une lueur malveillante animait ses pupilles. Cela ne rassura pas la princesse, qui préféra détourner les yeux.
Sahar portait sa coupe à ses lèvres pour se rafraîchir quand elle entendit quelque chose résonner dans son esprit. Comme une note de flûte traversière. Sahar en frémit. Elle fronça les sourcils et regarda autour d’elle, sans comprendre. Son regard fut attiré par les pierres précieuses qui ornaient le magnifique collier de Myriam Belkel. Un rubis, un saphir et une émeraude sertis dans l’or. Les minerais produisaient une étrange lueur colorée qui fascina Sahar.
Soudain, des gardes apparurent dans la pièce, suivis par le Lion-sur-Terre.
Tous se levèrent à la venue du roi et s’inclinèrent.
— Que la Lumière vous bénisse, Majesté ! souffla Abdel Amjad.
— Veuillez excuser mon retard, Messire. Un incendie s’est déclaré dans ma cité.
— Rien de grave, mon roi ? demanda Myriam Belkel.
— Tout est rentré dans l’ordre, assura Sahin. Le Grand Prêtre arrivera d’ici dix minutes. Cela me laisse assez de temps pour vous exposer plus en détails ce que je vous ai suggéré par faucon.
— Je suis tout ouï, Majesté.
Tandis que tout le monde se rassit, Sahar chercha à capter le regard de son père, pour l’empêcher de proposer cette union qu’elle jugeait contre nature. Jamais une Zhaleh ne convolerait avec un Amjad. L’inverse suffisait amplement.
Asmar, en sa qualité d’échanson, servit les rafraîchissements. Sahin brandit son verre et afficha un sourire confiant :
— Aux maisons Zhaleh et Amjad !
Les invités portèrent un toast à cette déclaration. Sahar, elle, fit semblant de boire. Elle porta simplement la coupe à ses lèvres, sans avaler la moindre goutte de jus de grenade.
— Nous sommes réunis aujourd’hui, nous les maisons les plus anciennes du royaume, pour assister au mariage de mon fils Yashar avec votre fille Assla. Bien que cette union ne puisse qu’être bénéfique pour nos deux familles et pour Ismahen, je souhaite davantage la consolider, en vous proposant un autre mariage.
Abdel Amjad échangea un regard appuyé avec son épouse avant de sourire. Sahar, pour sa part, fulminait intérieurement.
— J’aimerais, continua Sahin, vous offrir la main de ma fille, la princesse Sahar Zhaleh. Elle vient de fêter ses vingt-et-un ans et demeure pure.
Tous dévisagèrent Sahar. Loin de se sentir gênée, la jeune femme décida d’assumer son rôle, au grand plaisir de sa mère. Intérieurement, elle bouillonnait et maudissait son père d’oser lui faire subir cet affront, mais face aux Amjad, elle savait qu’elle devait tenir son rang. La reine y veillait personnellement.
Abdel Amjad ne s’attendait visiblement pas à une telle proposition. Il mit un certain temps avant de répondre :
— L’unique fille Zhaleh depuis la glorieuse époque de la Reine Rouge est un excellent parti pour notre fils Rayan.
— Nous ne pouvions espérer mieux, Majesté, compléta sa femme.
Glorieuse époque, s’étonna mentalement Sahar, surprise d’entendre cela d’un Amjad.
— Dois-je comprendre que vous acceptez d’unir votre fils aîné à ma fille ?
— Oui, Majesté, approuva Abdel Amjad.
Sahin sourit et se mit debout. Il présenta sa main à Sahar, qui posa son verre et obéit. Elle se leva, imitée par Rayan Amjad, et se plaça face à lui. Le jeune homme la dépassait d’une tête et possédait une certaine prestance, mais Sahar refusa de l’admettre.
— Moi, Sahin de la maison Zhaleh, Lion-sur-Terre béni par Rhiam, fiance en ce jour Rayan Amjad à ma fille, la princesse Sahar Zhaleh.
Comme l’exigeait la tradition, le jeune noble s’inclina devant Sahar et murmura :
— C’est un honneur, princesse.
Sahar repoussa sa colère et choisit bien ses mots avant de répondre :
— L’honneur est pour moi, seigneur Amjad, murmura-t-elle.
Les membres du clan Amjad applaudirent bruyamment. Sahar remarqua que seuls Sahin et Rahim répondirent avec le même enthousiasme. Asmar et Rimah les imitèrent par respect, mais sans grande conviction.
— Le Grand Prêtre vient d’arriver, informa alors un héraut.
— Parfait ! s’enthousiasma le roi. Allons au Temple du Soleil !
Sahar laissa passer les hommes, tout en essayant de calmer sa colère. Elle serra les poings et tenta de repousser la vague d’indignation qui déferlait en elle. Alors que sa digue menaçait de sauter, une main se posa sur son épaule. Elle tourna la tête et vit Asmar, la mine inquiète.
— Calme-toi… Les verres tremblent…
Sahar jeta un œil aux coupes posées sur la table basse. En effet, elles bougeaient comme si un tremblement de terre secouait la ville. Certaines s’étaient même fissurées.
Troublée, Sahar échangea un regard intrigué avec son frère.
— Allons au Temple…
Asmar opina.
Le Temple du Soleil.
Le bâtiment trônait au sommet de la plus haute colline de la capitale. Les récits historiques racontaient que le Temple du Soleil était l’édifice le plus ancien de la ville, construit jadis pour servir de demeure à la famille royale. Cela remontait loin dans le passé, à une époque bien antérieure à celle amenée par la reine Mithra Zhaleh. Cette dernière décréta, en arrivant au pouvoir, que le palais était trop majestueux pour abriter de simples Mortels. Elle dédia le bâtiment à Rhiam. Dès lors, les Frères Blancs y rendaient tous les hommages à l’Unique.
Le Temple était immense et imposant. Son dôme doré reflétait les rayons du soleil et les renvoyait sur la ville, telle une bénédiction divine. Sept minarets en grès poli et en or perçaient le ciel, comme pour créer un lien entre Rhiam et ses fidèles. Le plus haut d’entre eux se dressait derrière le dôme. La façade principale, longue de trois cents mètres, était ornée de dorures et de gravures. Des dragons de jade se tenaient de part et d’autre de l’escalier en marbre qui menait à l’entrée principale. Des draps rouges étaient tendus à l’occasion du mariage royal. Au-dessus des portes ouvertes, une tête de lion en or était gravée dans la pierre blanche, symbole de force et de protection. La crinière du félin formait des rayons dorés qui s’étiraient comme un soleil.
La famille royale et celle de la mariée assistèrent à la cérémonie aux premiers rangs.
Assla Amjad arriva dans la pièce, portée sur un trône doré par quatre hommes vêtus de tuniques aux couleurs de sa maison. La jeune femme, souriante, saluait la foule qui l’applaudissait en chantant. Elle portait une magnifique robe rouge sertie d’arabesques brodées en fils d’or et agrémentées de rubis scintillants. Du henné cuivré couvrait ses mains, ses bras et une partie de son visage. Assla Amjad arborait un maquillage parfaitement fidèle à la pure tradition hisham.
Une troupe de danseurs et de musiciens suivait la future mariée. Ils jouaient une mélodie qui résonnait joyeusement dans le Temple du Soleil. Asmar, debout aux cotés de Sahar, applaudissait en rythme et fredonnait la mélopée. La princesse, quant à elle, tapait dans les mains uniquement pour ne pas offenser la famille de sa belle-sœur. Et aussi parce que Rayan Amjad la surveillait du coin de l’œil, ce qui l’agaçait.
Parvenus à mi-chemin de l’escalier qui menait à l’autel, les porteurs ployèrent les genoux et laissèrent Assla descendre. Là, la jeune femme se plaça entre son père Abdel et son frère Rayan pour être amenée devant son fiancé.
Yashar, un sourire serein aux lèvres, l’attendait près du Grand Prêtre. Le prince Zhaleh était vêtu d’un jabador traditionnel, blanc et doré. Le lion de sa maison, brodé sur ses épaules, accompagnait les autres motifs géométriques cousus en fils jaunes. Il tenait entre les mains une cape rouge frappée du lion royal et regardait sa promise venir à lui.
Abdel Amjad prit la main de sa fille et la dirigea vers Yashar, qui descendit une marche pour venir réclamer sa fiancée. Ce faisant, le seigneur d’Aslem s’inclina devant son beau-fils et recula pour se confondre dans la foule.
Yashar et Assla gravirent ensemble la dernière marche et se présentèrent devant le chef de cérémonie. Le Grand Prêtre salua poliment le jeune couple et invita Yashar à placer sa promise sous sa protection. Yashar déplia sa cape et la plaça sur les épaules d’Assla. Le lion Zhaleh en fil d’or se dressa sur l’ensemble du dos de la jeune femme. Sahar vit Yashar étirer ses lèvres en un sourire satisfait.
Puis, le couple se tourna face au Grand Prêtre, qui récita de longs et barbants extraits issus des textes sacrés. Sahar eut du mal à masquer son ennui. Cette cérémonie commençait à durer trop longtemps à son goût. Asmar regardait ses pieds et s’amusait à frotter le sol du temple avec la semelle de sa botte. Cela lui valut une sévère réprimande de la part de Sahin. Réprimande qui ne passa pas inaperçue : Yashar lui-même le remarqua car il tourna brièvement la tête vers son jeune frère.
Asmar baissa les yeux et s’efforça de se faire oublier. Sahar, compatissante, se rapprocha de lui et posa sa main sur son épaule.
Le Grand Prêtre referma son livre, au grand soulagement de la princesse, et procéda au liage des mains des époux. Il prit un un ruban blanc brodé d’un scorpion Amjad et d’un lion Zhaleh qu’il noua autour des mains jointes du jeune couple.
L’assemblée, jusque-là silencieuse, chanta une homélie religieuse. Quand les voix moururent, Yashar et Assla mangèrent des grains de grenade donnés par le Grand Prêtre et burent dans une coupe dorée chacun leur tour.
Les deux époux se firent face et prononcèrent en chœur leurs vœux de mariage :
— Tu es à moi et je suis à toi. Dans la Lumière de Rhiam, nous ne formons plus qu’un seul être, un seul cœur et une seule âme. Je promets de te rester loyal et fidèle, de ce jour jusqu’à mon dernier jour.
Lorsque leurs voix moururent, le prince Zhaleh se pencha vers son épouse et l’embrassa.
— Soyez bénis par Rhiam, déclara le Grand Prêtre sous les applaudissements de la foule.
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