Scène 2
Le radis, la vieille courge
Le radis :
Ah ! Je te vois te lever, mon ami soleil !
Debout vous autres ! Voyez son éclat ! Merveille
Que ce jour nous offre ! Gorgeons-nous de rayons
Sucrés, de sa chaleur, de sa…
La vieille courge :
Mais tais-toi donc !
A mon âge, j’ai grand besoin de mon sommeil.
Le radis :
J’avais oublié : la revoilà qui grommèle,
La vieille courge… et tôt ! Dès le matin !
La vieille courge :
Et comment, le radis ! Tu n’es qu’un importun
Qui se délecte à perturber toutes mes graines !
En voilà des manières ! J’ai la migraine
Dès le lever ! Et avec toi, aucun moyen
D’être tranquille ! Tu es un mauvais voisin !
Le radis :
Eh ! Tu es bien la seule à dire cela,
Les autres…
La vieille courge :
Si je m’y intéresse !
Le radis :
Ne se plaignent pas…
La vieille courge :
Ils aiment le bruit !
Le radis :
Et sont bien contents, eux…
La vieille courge :
De dormir loin de ta cacophonie !
Le radis :
Quand je
Salue mon vieil ami, le soleil, là-haut,
Car chaque jour est comme une fête à nouveau.
La vieille courge :
C’est surtout qu’ils ont le sommeil lourd… comme toi…
Le radis :
Tu oses ? Vraiment, c’en est trop ! Eh ! Je m’insurge !
La vieille courge :
Contre quoi, s’il te plait ?
Le radis :
Mais c’est clair : tes insultes !
Voilà six longs mois que je dois les supporter,
Tu t’y mets dès le matin, à peine levée
Et ça dure, ça dure, ça dure… Je crois
Bien toute la journée ! Jusqu’au soir !
La vieille courge :
Ma foi,
Le radis, si je dormais, je me lèverais
Plus facilement du bon pied. Enfin,
Façon de parler.
Le radis :
Et je ne te parle pas
De tes ronflements ! La nuit, ça va de soit…
Mais le jour aussi ! C’est ainsi : et RON, et RON…
La vieille courge :
Petit patapon !
Le radis :
Tu ricanes ?
La vieille courge :
Supposons.
Le radis :
Ah ! Si je n’étais pas si bien élevé…
La vieille courge :
Hum… Plutôt bien bas.
Le radis :
Je t’entends murmurer !
La vieille courge :
Tu m’en vois contrite !
Le radis :
Cesse ton ironie !
La vieille courge :
Plait-il ? Et pourquoi donc ?
Le radis :
Mais c’est d’un malpoli…
La vieille courge :
Choquant ? Ah ! Mon petit, quand tu auras mon âge,
Que tu te seras lassé de ce paysage,
Du soleil, des voisins… de tout le potager
En somme, tu comprendras.
Le radis :
Quoi ?
La vieille courge :
Pourquoi j’ai besoin…
Le radis :
De quoi ? Voyons, enfin ! Parles, nom d’un pépin !
La vieille courge :
Mais de dormir, pardi !
Le radis :
Ah ! Nous y revenons !
Tu ne lâches jamais l’affaire, toi ?
La vieille courge :
Non.
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