En lice

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Agenouillée, les yeux rivés au sol, Flavia n’osait se retourner pour découvrir l’objet qui grinçait et tintait à la fois, mais le bruit métallique laissait augurer du pire.

Un bras l’agrippa sous l’aisselle pour la contraindre à se relever, et une main lui retira sa robe en la tirant vers le haut sans aménité. La culotte lui fut quasiment arrachée, avec une frénésie qui lui fit comprendre que les gardes du corps lui vouaient toujours une rancune pleine de hargne.

Indifférente à cette manifestation de haine, elle se laissa faire comme une poupée de chiffon, leur opposant la résistance passive de son corps complètement relâché.

Face à elle, les Colombiens avaient dévêtu Maddalena avec aussi peu de délicatesse qu’elle-même, réduisant son évanescente robe en lambeaux. Elle était nue à présent, contrainte de pratiquer une fellation profonde à l’un des gangsters, déglutissant, bavant, s’étouffant par moment. Mais son impitoyable bourreau ne s’en émouvait nullement, la maintenant contre son aine pour son seul plaisir. A peine eut-elle le temps de reprendre sa respiration que son acolyte lui enfourna un phallus de taille impressionnante à la place laissée vacante, et commença à lui marteler la bouche.

Pendant ce temps, un autre s’était positionné derrière elle et entreprit sans préliminaire de la pénétrer, la bousculant d’un coup de rein d’une extraordinaire agressivité.

Cette scène d’une extrême sauvagerie frappa d’une stupeur horrifiée la jeune fille, tant et tant qu’elle n’aperçut pas de prime abord les fines chaînes argentées dotées à leurs bouts de tiges recourbées jointes par un anneau plat. Pourtant, elle avait déjà subi de semblables assauts, dans les bras du parrain calabrais, mais le voir en spectatrice lui fit réaliser toute l’horreur de la situation. Quand Georgio la confronta, elle entrevit l’instrument de son futur supplice.

Presque au même moment, Andrea se saisit d’un de ses tétons et tira furieusement dessus. Flavia étouffa un cri, sous la flèche de douleur qui la traversa.

— Ils sont bien trop menus, constata-t-il, on aura du mal à fixer la pince dessus.

Circonspect, il roula la pointe sensible, qui durcit à ce contact.

— J’ai une idée, suggéra-t-il, avant de disparaître un instant.

Il revint après quelques minutes qui semblèrent une éternité à la jeune fille, et pendant lesquels elle eut encore le temps d’observer le spectacle terrifiant de Maddalena malmenée simultanément par les trois Colombiens. Couchée sur le premier, celui-ci la pénétrait de concert avec le second, à genoux derrière elle, pendant que le troisième lui tyrannisait la bouche. Cela n’était pas sans lui rappeler cette terrible nuit où Malaspina et son bras droit l’avaient prise en même temps, faisant de son corps le trait d’union entre les leurs, oubliant sa souffrance. Au mépris de son amour pour eux, ils s’étaient recherchés à travers elle, l’écartelant impitoyablement dans leurs assauts l’un vers l’autre.

Elle pinça les lèvres, le souvenir lui tordait toujours les entrailles quand il lui revenait en mémoire.

Elle n’aurait su dire si c’était heureux ou malheureux mais son attention fut détournée de ces souvenirs obsédants par les deux hommes qui se postèrent face à elle.

Andrea tenait deux petits objets tubulaires, faits de plastique transparent, terminés par des sortes de clés noires. Il en tendit un à son comparse.

— Prends-en une. Je m’occupe du gauche et toi du droit, annonça-t-il d’un ton glaçant.

Tout en positionnant le petit tube sur son téton, il eut un léger mouvement de recul.

— Hé, mais qu’est-ce qu’on lui a fait, à celle-là ? Quelqu’un lui a entaillé les seins ! s’exclama-t-il, stupéfait. Giorgio s’approcha et lorgna sur les fines cicatrices qui barraient les mamelons. Il hocha la tête, l’air aussi surpris que son amant.

Après les avoir examinées d’un œil incrédule, leur examen se porta simultanément vers l’entrejambe, qui portait les mêmes stigmates.

— Là aussi ! s’étonnèrent-ils de plus belle. Giorgio écarta brusquement les jambes pour entièrement découvrir les lèvres intimes. Il passa le doigt sur le tracé renflé avec une attention presque médicale.

— Eh bien, on ne t’a pas loupée ! C’est un vrai sadique qui t’a fait ça ! reprit-il, presque admiratif.

Sans s’en attendrir, les deux tueurs s’emparèrent des tendres pointes des petits seins de la jeune fille et y apposèrent les pompes qui étirèrent les chairs sous leur pression. Une souffrance sourde mais continue la tenaillait, elle serra les poings pour la supporter, fermant les yeux pour se concentrer sur autre chose.

Mais au contraire, plus rien ne la distrayait maintenant de l’impitoyable succion, elle les rouvrit donc bien vite. Au moment où un râle menaçait de s’échapper de sa poitrine haletante, ils arrachèrent ces minuscules instruments de torture qui découvrirent les tétons enflés par l’aspiration.

Flavia sentait l’irritation, mais elle préféra détourner le regard, fixant les tentures qui habillaient les murs de la pièce. C’est alors que les tueurs passèrent les mamelons entre les mâchoires des pinces, qu’ils resserrèrent au maximum. La vive pression qui s’y exerça brusquement la rappela à elle, une douleur nouvelle et fulgurante. Pour la contenir, elle inspira profondément, ainsi qu’elle s’y était déjà prise sous la cinglante morsure du ceinturon quand Malaspina la battait. Elle se faisait un point d’honneur à ne pas broncher, pour ne pas donner la satisfaction à ses bourreaux d’être témoins de sa faiblesse. La douleur s’atténuait peu à peu quand Giorgio déposa sa main sur le ventre de la jeune fille, et la descendit lentement, dans une fugace caresse, vers l’aine. En lui adressant un sourire sardonique, il happa le clitoris et prévenant un mouvement de recul, y agriffa l’une des petites ventouses. Toujours en narguant de son air mauvais, il l’actionna, dilatant le bourgeon de chair jusqu’à la limite du supportable. La suppliciée retint sa respiration et contracta ses muscles pour s’empêcher de hurler alors que l’homme de main le retira d’un coup sec avant de lui appliquer au même endroit une nouvelle pince.

La chair, déjà à vif, se révolta contre cette torture, semblable aux précédentes mais amplifiée par l’extrême sensibilité du bouton délicat. Néanmoins, encore une fois, elle parvint à se maîtriser. L’expérience de la souffrance lui devenait utile, constata-t-elle, elle s’endurcissait grâce aux épreuves qu’elle avait déjà traversées. À cette pensée, elle s’enhardit à lancer un regard provocant au mafieux qui se réjouissait ostensiblement des tourments qu’il lui infligeait.

Cette bravade le surprit au point qu’il lâcha la petite tenaille, mais il se reprit presque aussitôt.

— Fais bien ta maline tant que tu peux, je te garantis que ça ne durera pas, lui murmura-t-il à l’oreille en saisissant la chaîne qui reliait les trois fichoirs.

Sans s’assurer que sa menace avait fait son effet, il empoigna la chaîne pour vérifier qu’elle était solidement arrimée.

Le sang avait progressivement quitté les parties comprimées et la traction lui fit moins mal qu’elle ne le craignait… ou alors c’était encore le signe qu’elle s’était blindée face à ce genre de brimade.

Il la mena ainsi au Boss, qui agrippa à son tour cet étrange attelage pour l’attirer à lui. Flavia sentit son corps se liquéfier malgré elle sous le lent examen dont elle fit l’objet. Les yeux, calfeutrés par leurs obscures casemates, semblaient la parcourir attentivement . La main gantée du Boss leur succéda bientôt, de sa gorge à son antre intime, égratignant la peau nue des coutures rigides du cuir, longeant les cicatrices. Pendant ce long moment, la tête de la jeune fille lui sembla lestée et ploya insensiblement vers sa poitrine. C’était la conséquence de l’épouvante que lui inspirait irrésistiblement ce démon, songea-t-elle. Cette simple pensée lui suffit pourtant pour lui insuffler une nouvelle énergie et elle redressa le menton. Elle ne plierait pas devant l’assassin de Fabio, résolut-elle in petto. Une autre voix intérieure, inhabituelle, se fit entendre presque simultanément, l’exhortant à la prudence. Le Boss risquait de prendre cet acte d’audace pour une provocation, comme lors de la conférence à laquelle elle avait participé.

Elle rectifia donc immédiatement son attitude, et tout en continuant de le fixer par en dessous, y ajouta une touche de feinte timidité pour simuler la soumission.

Son cœur manqua un battement, elle demeurait immobile, craignant que ses intentions n’aient été trahies par son premier mouvement, mais les abîmes du masque demeuraient insondables.

Cependant, une voix profonde s’éleva, calme, contrastant avec la frénésie qui l’agitait à l’auditorium.

— Qui t’a fait ça, chienne ? demanda-t-il sur un ton parfaitement inexpressif.

A cette question, la jeune femme sentit une vague de panique la parcourir. Comment justifier ces lacérations sans évoquer Malaspina ? Et s’il se décidait à enquêter sur elle ? Elle serait perdue, et Marco avec elle, potentiellement. Il lui fallait rester la plus vague possible, tout en éteignant les éventuels soupçons qui pourraient naître de cette imprécision.

— Mon ancien maître, évoqua-t-elle, sibylline.

— Qui était-il ? rétorqua-t-il aussitôt. Sa voix s’était légèrement animée, se faisant impérieuse.

Cet intérêt pourtant prévisible déstabilisa davantage son interlocutrice.

Que répondre ? Elle était au pied du mur maintenant. Un mot pouvait précipiter sa chute ou la sauver. Elle se devait de le choisir judicieusement, soutenir le mensonge avec suffisamment de naturel pour ne pas paraitre suspecte… un véritable exercice d’équilibriste.

Tout l’art de la dissimulation qu’elle avait péniblement acquis ne servirait jamais davantage qu’à cet instant précis, décisif.

Les meilleurs mensonges étaient ceux qui se mêlaient de vérité, disait souvent Chiara.

— Un homme que j’ai aimé et que j’ai déçu, avoua-t-elle en baissant la tête en signe d’humilité. Il m’a punie ainsi avant de m’abandonner. Je lui avais désobéi.

Intérieurement, elle priait pour que l’interrogatoire n’aille pas plus loin, car elle n’avait rien prévu d’autre pour étayer cette version de l’histoire. L’imagination lui faisait cruellement défaut en cet instant crucial, son esprit était paralysé par la tension qui la crispait.

Allait-il vouloir en savoir plus ? Plus rien ne comptait en dehors de cette question. Ni les cris étouffés de Maddalena, ni sa position impudique, ni son avilissant harnais, plus rien ne l’atteignait. Le sang lui battait aux tempes, les acouphènes la maintenaient dans une gangue de coton insoutenable, elle doutait même que les paroles de son bourreau lui parviennent dans cet état.

— Oui, j’ai bien vu que tu étais orgueilleuse et insoumise, en réalité, observa-t-il simplement. Mais je vais te faire passer cette habitude d’insolence, je vais même m’en faire un plaisir, ajouta-t-il avec une évidente satisfaction.

Une longue minute s’écoula avant que Flavia ne réalise qu’elle avait involontairement opté pour la stratégie gagnante. En mentionnant son indiscipline, elle avait réveillé les instincts dominateurs de ce seigneur tout-puissant du crime, devant le défi que représentait son dressage. Il la dompterait, il s’en délectait à l’avance, alléché par cette vicieuse perspective.

Ses doigts s’enroulèrent dans les maillons, tendant la chaîne, tirant sur les mamelons et le clitoris boursouflés. La jeune femme se mordit les lèvres pour ne pas broncher à la distension de ses chairs, mais l’homme prit ce geste pour une promesse de cruels plaisirs.

— Allez, chienne, montre-moi ce que tu sais faire, lui ordonna-t-il en jouant avec le sautoir métallique pour impulser des élans de douleur à sa soumise.

Cet ordre fit entrevoir à Flavia la possibilité de s’attirer les faveurs de ce maître impitoyable, peut-être même de prendre un ascendant sur lui. Non, cela paraissait irréaliste, mais qui ne tente rien n’a rien, se raisonna-t-elle.

Résolument, elle l’enjamba, et passa un doigt sous la cravate serrée autour du cou de taureau du parrain.

Ce faisant, elle tentait de lire en lui afin de deviner jusqu’où elle pouvait s’aventurer pour le satisfaire, mais il ne bougea pas. Délicatement, elle dénoua le nœud, déboutonna le col, puis s’attaqua à dénuder le torse musculeux de cet amant de circonstance. Il n’était pas aussi bien dessiné que celui de son second, remarqua-t-elle malgré elle, mais il devait avoir l’habitude de l’exercice. La peau était plutôt pâle, veloutée, parsemée par une myriade de petits grains de beauté, au milieu desquels quelques poils noirs se détachaient. La texture, plutôt lâche, lui fit penser qu’il était plus âgé que les hommes avec lesquels elle avait déjà couché. Peut-être la cinquantaine, mais elle n’avait pas de point de comparaison pour pouvoir l’affirmer avec certitude.

Presque machinalement, elle se pencha pour baiser les pectoraux, léchant la ligne velue qui descendait au nombril, puis s’affaira à détacher la ceinture et à ouvrir la braguette.

Le phallus attendait là, nullement ému des manœuvres de la jeune femme. La tâche s’annonçait ardue pour le réveiller, pressentit-elle. Elle n’était pas sensuelle comme Maddalena, qui savait certainement mieux que quiconque attiser le désir d’un homme. Il lui fallait donc agir autrement.

S’imaginerait-elle avec quelqu’un d’autre pour surmonter le dégoût qu’il lui inspirait, comme elle le faisait toujours ? Se rêverait-elle en compagnie de Malaspina, Leandro, ou bien Marco ? Non, elle ne pouvait plus penser à eux sans qu’une amertume insupportable lui mette le cœur au bord des lèvres… Tous l’avaient utilisée, sans qu’aucun n’ait eu pour elle une quelconque estime.

Elle s’enfonça les ongles dans la paume de la main pour se recentrer sur son objectif, qui trônait là, en face d’elle.

Maître absolu et incontesté, il devait profondément jouir de sa position. La carte de l’ego lui parut la plus appropriée dans cette situation.

Avec douceur, elle baisa le pénis couché comme s’il avait véritablement été un objet de vénération. L’enveloppant avidement de la langue, elle l’aspira avec ferveur, le prenant entièrement dans sa bouche, caressant ses bourses velues. Elle se dégagea lentement en léchant la hampe avec application et réitéra plusieurs fois l’opération. Enfin, au bout de quelques va-et-vient, elle sentit le sexe se dresser entre ses lèvres. Cependant, aucune autre réaction ne vint accompagner ce déploiement d’ardeur. Elle s’activa donc de plus belle sur la verge désormais rigide.

Mais la veine courant, pulsant le long du phallus insolemment érigé, témoignait enfin de l’excitation invisible qui travaillait en profondeur l’homme. Elle le sentait au fond de sa gorge, vibrant d‘un battement subtil tandis qu’elle le flattait tout entierde sa langue avide.

Elle continua à honorer ce sceptre de pouvoir jusqu’à ce qu’un souffle profond se fasse entendre, alors qu’une main empoignait la chaîne pour la redresser et l’installer à califourchon sur lui. A plusieurs reprises, elle avait aperçu Maddalena chevaucher le Boss, elle connaissait donc l’étendue de ses talents. Comment faire le poids à côté d’elle ?

Sa perplexité ne devait pas être perçue, de même que son absence totale d’excitation. Pourtant, il le sentirait dès qu’elle tenterait de le prendre en elle. Autant en prendre son parti, décida-t-elle.

Ostensiblement, elle suça son index et son majeur et humecta ses lèvres intimes et l’orifice réticent, puis sans attendre, elle l’avala en elle. Elle initia le mouvement lentement, pour ne pas effaroucher l’érection en s’appesantissant sur elle trop brusquement. Une fois qu’il fut lové au fond d’elle-même, elle fixa le masque pour essayer de déceler des indices de son éventuel plaisir, mais les pupilles noires la dévisageaient sans expression. Alors elle se souleva et le happa encore et encore, cambrant ses reins pour offrir une pénétration plus profonde.

Ce faisant, elle interrogeait toujours les profondes orbites, qui semblèrent s’illuminer peu à peu d’un sombre éclat. Cependant, sa concentration se faisait de plus en plus ardue à maintenir. Dans cette position, son clitoris s’enflammait progressivement au contact du pubis de son partenaire, malgré son douloureux bijou et irradiait son bas-ventre d’ondes de bien-être. Le feu montait entre ses cuisses, tant et tant qu’elle ruisselait maintenant. Il s’immisçait en elle si facilement que le va-et-vient se fit plus rapide, caressant toujours plus intensément le bourgeon sensible.

Ses entrailles se contractèrent bientôt violemment dans la jouissance, l’immobilisant sur le coup. Ses sens en étaient chamboulés, elle ne voyait ni n’entendait plus rien de ce qui se jouait autour d’elle.

S’était-elle évanouie, chavirée par l’orgasme ? Non, pas avec Lui, ce n’était pas possible… C’était simplement mécanique, il ne pouvait en être autrement. Suffoquée, elle prit une grande inspiration, comme si elle émergeait après être restée en apnée, et ouvrit les yeux. Une étreinte inusitée s’exerçait sur ses hanches. Étonnée, elle baissa les yeux pour découvrir les larges mains du Boss lui enserrant la taille, la plaquant contre lui. L’esprit embrumé, elle expirait sous la poigne de fer de son ennemi, mais elle réalisa avec surprise que lui aussi reprenait péniblement son souffle, alors qu’une émanation tiède et gluante s’échappait d’elle.

Elle le considéra un moment, ébahie, mais les doigts se fichèrent profondément dans sa chair.

— Tu m’as sali. Nettoie, lui enjoignit-il le plus stoïquement possible. Et il tira pour la faire ployer vers le membre viril qui gisait, mou, luisant de semence et de ses effluves à elle.

Entraînée par la pointe distendue de ses seins, elle obtempéra, à demi-consciente, et lécha jusqu’à la dernière goutte de sperme sur la verge, fouillant les poils pour les débarrasser du liquide visqueux. Le goût âpre et salé, la fragrance alcaline lui arracha une grimace qu’elle dissimula tant bien que mal, mais elle parvint à se contenir malgré tout. C’était plus facile de tout avaler en pleine fellation qu’ainsi, songea-t-elle en faisant disparaître les dernières traces poisseuses sur ses lèvres. Comme l’odeur résiduelle la révulsait toujours, elle se prosterna pour étouffer un haut-le-cœur.

Ce mouvement parut plaire infiniment au Boss. Après avoir réajusté son pantalon, son attention se reporta sur sa petite esclave. D’un geste, il l’invita à se rapprocher de lui.

— Tu as bien travaillé. Tu n’arrives pas encore à la cheville de Maddalena, mais c’était agréable, déclara-t-il, sur un ton sentencieux. Je te félicite, ajouta-t-il laconiquement.

La nausée qui troublait toujours la jeune fille fut bientôt balayée par un éclair de souffrance qui électrisa tout son corps quand il lui arracha brutalement les trois pinces, l’une après l’autre. Elle serra la mâchoire et ravala le gémissement qui montait dans sa gorge alors que le sang irriguait à nouveau douloureusement sa peau.

— C’est bien, vous pouvez disposer, les congédia-t-il. Brenno…fit-il signe à son second pour raccompagner les deux femmes.

Flavia remarqua alors le silence assourdissant qui avait succédé à ce dernier ordre et tourna la tête vers le sofa. Maddalena gisait, sa somptueuse robe lacérée, ses bras gracieux étaient maculés de lignes pourpres. Les trois Colombiens, torse nu, avaient regagné leur place non loin d’elle, et avaient rallumé leurs cigares. Un frisson incontrôlable réveilla la jeune fille qui dans un élan de compassion horrifiée, s’élança vers sa compagne.

— Maddalena, Maddalena, il faut y aller maintenant, susurra-t-elle à son oreille, très émue de l’état misérable dans lequel elle la retrouvait.

Comme celle-ci ne réagissait pas, elle la hissa en faisant appel à toutes ses forces pour la redresser. Elle chancela, la prostituée était plus grande et plus lourde qu’elle, elle ne pourrait pas l’extraire du lieu de son supplice.

Alors qu’elle allait la lâcher, ses doigts glissant sur la peau maculée de sang, un bras puissant s’enroula autour d’elle pour l’aider à l’emmener hors de la pièce. C’était Alteri qui venait lui prêter main-forte. Tous deux traînèrent Maddalena, plus morte que vive jusqu’à la voiture, où le Consigliere lui fit boire un verre de brandy. Flavia, qui avait enfilé à la hâte ses vêtements, perçut la vague de détresse qui ranimait sa camarade d’infortune, et cédant à une urgence vitale, l’entoura de ses bras.

— Reste là, avec moi, ne m’abandonne pas, la supplia la prostituée. alors qu’enlacées, elles laissaient derrière elles le Q.G. Si la peine de sa compagne s’était communiquée à elle, un poids venait de libérer les frêles épaules de Flavia comme elle s’éloignait de ce lieu de perdition, siège du Mal qui ravageait le pays.

À chaque fois qu’elle quittait le Boss, un sentiment intense de soulagement lui redonnait du courage, comme si la lumière parvenait enfin à transpercer les ténèbres. Elle avait survécu, encore une fois, mais elle n’était pas certaine qu’il en serait de même pour Maddalena.

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