Je suis étudiante, et mon lieu favori sera la bibliothèque, tant pour travailler que pour me récréer. J'aime son atmosphère douce et studieuse, et je suis une lectrice acharnée. Aujourd'hui nous sommes samedi, et je suis là pour dessiner.

Je prends place à ma table favorite, oui, celle qui se trouve à droite de la fenêtre. Quand je suis fatiguée de mes cours, mon regard peut s'égarer au-delà de ce petit univers et me donner des ailes. J'observe alors les nuages qui s'étirent à l'infini et mon imagination s'égare dans les méandres de l'infini.

Je commence le portrait dont j'avais décidé la création depuis longtemps, mais que je n'avais pas encore eu l'occasion de commencer. Je suis concentrée, je n'entends pas rentrer le garçon qui s'installe dans le fauteuil face à moi. Mais quand je lève la tête pour lire l'heure à l'horloge du ciel, je ne peux pas le manquer.

Je manque d'avaler de travers.

Cela ne m'est jamais arrivé pour un "vulgaire" garçon, comme je le disais il y a peu à ma meilleure amie. (Cette dernière tombe amoureuse au minimum une fois par mois, à son grand désespoir - et au mien- .)

Impossible qu'il soit réel. Ma première et honnête réaction : est-ce un ange ? Je dois certainement avoir des visions.

Il est le portrait de l'inconnu de toutes mes utopies. De mes rêves les plus fous. Le héros de mes contes de fées.

Je secoue la tête, effrayée de ce qui me traverse l'esprit. Je ne le connaîs même pas ! Peut-être est-ce un psychopathe, qui sait ?

Je crayonne nerveusement sur ma feuille qui ne ressemble plus à rien.

Oh , et puis zut ! Tant pis pour le portrait. Je me plonge dans la lecture d'un pavé de deux mille pages, espérant occuper assez mon esprit pour l'oublier.

C'est peine perdue. Les mots dansent devant mes yeux, je saute des pages, je ne sais même plus ce que je lis.

Sa présence me trouble. J'en viens à souhaiter qu'il disparaisse de mon champ de vision, sans le vouloir vraiment.

En désespoir de cause, je décide de le dessiner. Je tente de me rassurer et me répétant que mon sens artistique doit le trouver beau. Et que je serai heureuse qu'il soit mon modèle.

J'esquisse quelques traits.

Rien ne va plus, je le trouve toujours plus enchanteur. Il semble avoir pris la pose pour qu'un artiste l'immortalise. Je n'en reviens pas. Impossible que cette beauté soit naturelle ou humaine.

Je souffle.

Je deviens folle.

Je suis complètement sous son charme et j'en perd toute objectivité. Je place les derniers détails. Je lève le regard pour l'observer un dernière fois.

Oh non... Ses yeux sont fixés sur... moi , bien sûr. A-t-il remarqué quelque chose ? Pitié, J'espère qu'il ne croira pas que je suis étrange ou obsédée !

Je pique du nez sur mon oeuvre dans l'espoir qu'il n'ait rien remarqué. Que faire ? Je ne peux pas garder cette image sans sa permission, et je n'ai pas envie de la déchirer.

Alors, advienne que que pourra.

Je signe de mon prénom et de la date derrière la feuille. Je rassemble avec un semblant de calme mes affaires, et le rouge aux joues je m'approche en silence de lui pour lui tendre l'expression de mon admiration. Sans plus attendre, je prend la fuite, le coeur battant, lance un au-revoir au bibliothécaire et me réfugie derrière la porte.

J'ai les jambes qui tremblent mais je l'ai fait. J'inspire profondément pour chasser la nervosité qui m'a envahie.

-Excuse-moi...

Je sursaute et me retourne brusquement. Il m'a suivie. Il penche la tête en me regardant avec ce sourire que je trouve tellement adorable qu'il est craquant.

-On peut se revoir ?