2 juin 1663, 20 heures, cave.
J'étais assise dans un coin entre deux barils de vin, en train de fulminer contre ce salaud qui s'était permit de me punir quand mon frère aîné vint me sortir de là.
- Noé ?
Noé, c'était le surnom qu'il m'avait donné quand j'étais bébé, car il aurait voulut que je sois un garçon. Il s'appelait Nils, et avait 4 ans de plus que moi.
- Que veux-tu ?!
- Écoute, dit-il en s'approchant de moi, je sais pourquoi tu es ici, et je sais que tu as envie de te venger. Je te connais, tu es ma sœur, Noé...
- Je me fiche bien de ce que tu peux dire ! Où étais-tu quand il m'a enfermée là !? Je criais, et cela m'étais bien égal en cet instant.
- Ne crie pas s'il te plaît.
- Je crie si je veux ! hurlais-je en me levant, je vous hais tous ici ! Tous !
Et je m'enfuis en courant.
- Noémie Boncens ! Je te somme de venir ici t'excuser auprès de ton maître et de ton père ! »cria en vain Nils.
Je grimpais les escaliers quatre à quatre, et courus me réfugier dans la forêt, avec pour seule guide la lune qui brillait haut dans le ciel. Cette nuit-là, je dormis sur un lit de mousse au pied d'un grand chêne.
Lorsque je me réveillai, fourbue et encore en colère de la veille, je ne bougeai pas tout de suite, je gardai les yeux fermés et essayai de trouver une solution à ma situation. La seule que je trouvai fut de partir pour la ville.
Je me mis donc en marche, le ventre vide, les yeux dans le vague, et la tête vidée de toute pensée. Ce qui devait arriver arriva... la veille, j'avais couru sans savoir où mes pas me dirigeaient, et je me trouvais dans une partie de la forêt qui m'était inconnue. Je pestais contre le destin et contre toute vie humaine. J'étais perdue. J'avais faim. J'allais mourir ici, seule, les loups allaient me dévorer.
Je finis par perdre connaissance, trop affamée pour résister.
Ma tête me faisait souffrir. Où étais-je ? Les paupières lourdes, je ne réussi pas à ouvrir les yeux. Une femme. Une femme m'avait sauvée d'une mort certaine, mais comment m'avait-elle trouvée ? Ces bois n'étaient fréquentés que par de valeureux chasseurs, car on les disaient habités par des sorcières assoiffées de sang et par des loups-garous !
Malgré le poids qui maintenait mon corps plaqué au lit, je réussi à me redresser, et m'assis sur mon lit.
- Ah ! Tu es réveillée ! s'exclama la femme
- Qui êtes-vous ? Demandais-je sur mes gardes
La femme sourit :
- Je m'appelle Fendora. Je t'ai trouvée inconsciente au beau milieu de la forêt. Quelle idée a bien pu te passer par la tête pour que tu t'y aventure ?!
- Je...je ne sais pas, mentis-je
- Je ne te crois pas. Cela ne fait rien, ajouta-t- elle toujours en souriant, quoi qu'il en soit, je ne pouvais pas te laisser mourir ici ! Je ne t'ai pas demandé, mais qui es-tu ?
- Je m'appelle Noémie Boncens, j'ai 13 ans. Je viens du château de la famille Langlois.
- Oh ! Les Langlois...répéta Fendora en perdant son sourire
- Vous les connaissez ?
- Non. Repose toi. Si tu as faim, tu trouveras de quoi manger sur la table dans la pièce à côté.
Je compris que je m'étais aventurée sur un sentier glissant. Je me résignai cependant et me recouchai. Quand je me réveillai, j'avais perdu la notion du temps. Quelle heure pouvait-il bien être ? Haussant les épaules, je me levai et allais manger. Sur la table, je trouvais une assiette de soupe tiède, un pichet d'eau et une miche de pain. J'attaquais le tout avec voracité, car je n'avais pas mangé depuis deux jours. Fendora étais assise dans un fauteuil à bascule devant la cheminée qui servait à faire les repas et lisait. Je pris plaisir à l'observer tout mon soûl. Elle n'était pas vieille. Ses cheveux étaient maintenus avec un bonnet en lin beige, ses mains étaient fines, et n'avaient pas l'air abîmées par le travail. Son visage fin avait un teint pâle, presque blafard ; elle avait des joues creuses et un nez légèrement en trompette. En bref, elle était plutôt belle, et avait un mystère tournant autour d'elle.
Le temps de me remettre complètement sur pieds, je restais chez elle. Je tentais de percer le mystère de Fendora, tout en imaginant des plans pour la suite des choses.
- Fendora ? Demandais-je un jour
- Qu'y-a-t'il Noémie ?
- Comment vous êtes-vous retrouvée dans cette forêt ?
- C'est une question hasardeuse que tu me pose là.
- Je voudrais une réponse.
Fendora rit et ajouta :
- Soit. Alors voici ta réponse : je suis guérisseuse. Ce savoir ce transmet de génération en génération dans ma famille depuis toujours ; mais uniquement à la fille aînée de la maison. Après moi, j'ai deux frères et une sœur.
- Votre sœur, où est-elle aujourd'hui ?
- Tu la connais.
- Qui est-ce ?
- Madeleine.
- Madeleine...comme la gouvernante des Langlois ?
- C'est elle.
Malheureusement, je n'eut pas droit à plus d'explication. J'étais à la fois déçue et contente d'avoir obtenu une réponse.
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