Chapitre 2 - Bienvenue à Cleveland

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  Je pose ma tête contre la vitre arrière de la voiture et lâche un soupire. Ça fait des heures qu’on est sur la route pour rejoindre Cleveland et j’en ai assez de lire. D’autant plus que je commence à avoir la nausée, à force d’essayer de me concentrer sur les mots. J’ai donc arrêté mon activité pour faire passer ce malaise et plutôt me concentrer sur le paysage : des arbres et un peu de verdure entre toute cette végétation brûlée par le soleil trop présent et incandescent en ce moment.

  Regardant l’heure affichée sur le tableau de bord de la voiture, je me rend compte que ça fait une éternité que nous sommes en train de rouler. Cela fait plus précisément six heures, et le gps indique qu’il reste à peu près le même temps de route. Le désespoir m’envahit. C’est pas possible, mes parents veulent ma mort sur la conscience … Avec tous les voyages je devrais y être habituée, mais je crois que personne ne s’y habitue jamais vraiment. Car mes parents aussi semblent au même point que moi. Les yeux de mon père que je vois depuis le rétroviseur me confirment qu’il est complètement exténué. Ma mère, elle, a cédé aux bras de morphée. Je pense que je vais faire de même, je n’ai presque pas dormi de la nuit et nous sommes parti très tôt ce matin. De plus ça fera passer le temps plus vite, donc … Je m’installe au mieux, plaçant un coussin comme je le peux derrière ma tête et ferme les yeux.

  Une main me secoue doucement, me tirant petit à petit de mon monde de songes …

  • Réveille-toi ma chérie, on est arrivés, me dis ma mère de sa petite voix douce.

  J’ouvre les yeux avec difficulté, le soleil me brûlant la rétine. On est déjà arrivés ? Ça veut dire que j’ai dormis les six heures restantes, j’ai bien rattrapé mon manque de sommeil au moins. Ma mère, voyant que j’étais réveillée, est partie aider mon père à décharger les valises. Je détache ma ceinture et sort lentement du véhicule. Encore à moitié endormie, je me frotte les yeux et baille un peu bruyamment.

  • Bienvenue à Cleveland ! me dis mon père de façon enjouée, arrivant du coffre de la voiture avec ma valise à la main.
  • Super, encore une ville à ajouter sur notre liste déjà trop longue… ais-je répondu.
  • Allez ne fais pas la tête, tu sais que c’est pour ton bien qu’on fait tout ça.
  • Je sais, mais maintenant je suis quand même assez grande pour savoir contrôler mon don, alors je ne vois pas pourquoi on est toujours obligés de déménager tous les ans.
  • On en a déjà discuté, tu connais notre point de vue sur la question. Désolé mais nous n’avons pas le choix, même si je sais que c’est difficile pour toi. Maintenant, si tu veux bien récupérer ta valise pour la monter dans ta chambre à l’étage, ça m’aiderais bien. J’ai encore quelques affaires à sortir de la voiture, me dit mon père pour clore la discussion.

  Je m’exécute alors, récupérant la lourde valise que mon père à posé à mes pieds. Il m’adressa un petit sourire, son signe habituel voulant dire merci, que je lui rend à mon tour. Il part alors à nouveau vers le coffre du véhicule pendant que je me dirige vers l’intérieur de ma nouvelle maison. Vue d’extérieur, elle est plus petite que l’ancienne que nous avions à Norfolk. D'ailleurs, l'ambiance est tout autre ici, nous sommes complètement isolés avec notre grande cour, sans voisins aux alentours. J'approche de la maison et remarque que le bois dont elle est faite semble avoir subi bon nombre d’intempéries. Cependant, l’intérieur est tout autre. C’est bien plus accueillant que ce à quoi je m’attendais et j’en suis agréablement surprise. Les pièces sont lumineuses, la cuisine ouverte donne un sentiment de plus grand espace et ma future chambre, dans laquelle je viens d’entrer, est tout aussi lumineuse et spacieuse, prenant une grande partie de l’étage pour cette seule pièce. Cette maison n’est pas si mal que ça, finalement. Le seul point négatif que j’ai noté est que l’escalier grince énormément par endroit. S’il n’y a que ça, ce n’est pas si grave, d’autant que le poids de la valise à dû influer sur l’intensité du son.

  Je pose ma lourde valise que j’ai eu du mal à monter. Mon père en a clairement fait exprès de me la laisser. J’en ai eu la confirmation quand je l’ai entendu rire de plus loin en observant la scène. Il me le paiera un jour, dès que j’aurais une nouvelle idée et l’occasion de la mettre en place. C’est comme ça depuis des années entre lui et moi. On cherche toujours à se chamailler, à se moquer gentillement de l’autre, c’est notre façon bien à nous de nous dire qu’on s’aime. Avec ma mère, c’est différent. Elle est beaucoup plus douce que mon père et à besoin de plus d’attention, de câlins et de lui dire qu’on l’aime directement. Ils sont bien différents à ce niveau là avec moi, et je les aiment tous deux énormément. Après tout, ils ont pris soin de moi et m’ont gardée avec eux malgré les risques que je représente.

  Observant ce qui est désormais ma chambre, elle est tout ce qu’il y a de plus normal. Un lit double un peu vieillot dans un coin, une grande armoire ancienne sur le mur d’en face, un bureau en bois contre l’autre mur … Je remarque un grand miroir ancien accroché juste à côté de la porte d’entrée de la chambre. Je m’en approche alors, observant mon reflet. J’en profite pour arranger un peu mes cheveux bruns emmêlés. Ce que c’est pénible parfois d’avoir de long cheveux épais, c’est pour ça que j’ai préféré laisser mon visage dégagé. J’observe ensuite mes quelques mèches bleu roi. Je les avaient dès ma naissance, mes parents n’ont jamais su pourquoi. Ça restera un mystère à jamais je pense. En plus elles sont de la même couleur que mes yeux. Mais je les aime bien, elles me donnent un style un peu spécifique. En observant mon visage, je me rend compte que mes traits ressemblent très fortement à ceux de ma mère. Elle me dit toujours que je suis “la plus jolie”, mais honnêtement je ne lui arrive pas à la cheville. Elle est bien plus belle que moi, plus gracieuse aussi, car pour ça j’ai hérité de mon père je pense. Une chose que je me suis toujours demandée par contre, c’est pourquoi notre teint de peau est aussi clair. Car en effet mon nom de famille, Uila, est tout de même particulier. C’est un nom Hawaïen, et de toute évidence, je n’ai pas du tout un teint Hawaïen et mes parents non plus. Ma mère m’as dit un jour que ça s’explique par le fait que sa famille a vécu longtemps hors d’Hawaï et ils ont donc perdu cette “caractéristique” … J’en suis toujours moyennement convaincu mais soit. Enfin bref, je décide de redescendre afin d’aider mes parents à finir de s’installer.

  Une fois l’installation terminée, il faisait déjà presque nuit. Ma mère prépare à manger et mon père regarde la télé installé sur le canapé, pendant que je me trouve de l’autre côté de celui-ci, plongée dans mon livre de science-fiction. Appelés pour manger, on s’installe tous les trois autour de la petite table en bois de la salle à manger. Nous avons donc ensuite débuté le repas.

  • Tu te sens prête à commencer ta dernière année la semaine prochaine ? C’est vrai que cette année on est parti tard de Norfolk à cause du travail de ton père, mais j’espère que ça va aller pour toi, tu n’as pas beaucoup de temps pour connaître Cleveland et sortir un peu, me dit ma mère pendant qu’elle servait tout le monde.
  • Ne t’en fais pas maman, cette année de toute façon je ne compte pas me faire d’amis, je compte me concentrer à fond sur le bac pour l’avoir.
  • Tu n’a pas tant besoin de te concentrer, avec ce que tu sais tu peux être sûre de l’avoir déjà en poche ! Me répondit alors mon père sur le ton de la plaisanterie.
  • Mais tu ne compte pas te faire d’amis ? Tu vas te sentir seule … reprit ma mère d’un air inquiet.
  • Non je ne préfère pas, les adieux sont plus difficile à vivre que la solitude.

  J’avais employé un ton plus sec que je ne l’aurait voulu. Mes parents ne dirent rien, affichant seulement un air désolé. Je sais que ce n’est pas de leur faute et qu’ils font tout ça pour mon bien, mais toute cette tristesse accumulée avec les année s’est peu à peu transformée en amertume et ils en subissent les conséquences malgré moi.

  • Désolé, je sais que ce n’est pas de votre faute, c’est juste que … J’ai pris ma décision par rapport à ça, c’est tout.
  • On comprend ma chérie, ne t’en fais pas, répondit ma mère avec sa voix douce mais un peu triste.

  Le reste du repas se fit en silence. Après avoir aidé à débarrasser la table, je suis directement montée dans ma chambre. Me couchant sur le lit, j'observais le plafond, perdue dans mes pensées. Il me reste une semaine avant de commencer cette nouvelle année. Et tout ce que j’ai prévu de faire pour passer le temps : Lire.

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