6. La fin de la fin
- Inès ! A table !
Cela faisait maintenant un mois que sa mère l'avait forcé à raconter ce qui lui était arrivé. Elle avait absolument tenu à porter plainte "parce qu'il n'y a qu'un monstre pour faire ça à une jeune fille de dix-sept ans !". Même si Inès n'avait plus envie d'y penser, les évènements revenaient sans cesse à sa mémoire. Comment avait-elle pu être aussi idiote ? Elle avait eu confiance en lui, alors qu'elle ne le connaissait même pas. Elle avait honte de ce qu'elle avait fait, de ce qu'elle avait ressenti pour lui. Elle éprouvait un mélange de dégoût de lui... et d'elle-même. Elle n'arrivait pas à faire le tri dans sa tête.
- Inès ! Viens manger.
- Pas faim ! cria-t-elle à sa mère.
Comment pouvait elle encore s'asseoir face à eux ? Son père qui ne pouvait même plus la regarder en face et sa mère surveillait tout ses gestes. Elle avait l'impression d'être invisible et observée en même temps. Elle voulait être seule... juste seule. Comment aurait-elle pu leur dire la vérité ? Tout le monde la voyait comme une pauvre victime. Comment leur expliquer que c'était sa faute ? Qu'elle n'aurait pas dû lui faire confiance ? Qu'elle n'aurait pas dû l'encourager ?
- Je vais te monter une assiette alors, lui dit sa mère.
Elle avait bien vu la manière dont il la regardait pendant la séance photo. Elle s'était sentie spéciale, sexy même. Elle qui ne s'était jamais sentie à l'aise avec son corps... Voilà qu'il l'admirait sous toutes ses coutures. Quand il l'avait frôlée, elle avait eu envie de sentir sa main sur elle. Elle avait aimé être assise sur ses genoux, même si le geste avait été un peu brutal. Elle avait bien vite senti son érection dans son pantalon. Mais avant de savoir si elle appréciait vraiment cette sensation, il avait fait bouger ses hanches et glissé une main entre ses cuisses. Elle ne savait plus... Elle était perdue. Elle avait voulu sentir ses mains sur elle, mais pas comme ça, pas si vite ! Elle avait essayé de se dégager mais il avait resserré sa poigne. Dès qu'il avait entendu la porte d'entrée claquer, il l'avait lachée et elle était partie sans attendre.
- Ma puce, mange un peu, s'il te plaît.
Elle s'était changée dans la rue et avait attendu le plus possible avant de rentrer. Sa mère l'avait engueulée parce qu'elle n'était pas rentré pour le repas et qu'elle s'était inquiétée. La jeune fille s'était excusée, prétextant qu'elle n'avait pas vu l'heure. Quand elle avait reçu son message, elle l'avait directement effacé. Elle ne voulait plus y penser. Elle voulait reprendre sa vie normalement.
- J'ai pris un nouveau rendez-vous chez le docteur pour toi, demain.
Et puis... Après son cours de natation, elle s'était sentie attiré dans un vestiaire. Elle avait reconnu tout de suite son parfum. Il lui a dit plein de choses à l'oreille, elle n'a pas très bien compris. Elle avait peur. Malgré ses pleurs, il avait essayé de glisser sa langue dans sa bouche et ses mains sur elle. Elle n'osait pas crier, pas faire de bruit. Elle espérait qu'il arrêterait... mais non. Elle se souvenait qu'elle avait eu mal puis plus rien. Son entraineur l'avait retrouvée dans les douches. Elle ne savait pas comment elle était arrivé là, elle voulait juste que l'eau coule sur elle. Son prof avait appelé sa mère qui était venue la chercher. Elle l'avait interrogé toute la nuit, elle avait fini par lui dire ce qu'il s'était passé. Elles s'étaient rendues au commisariat le lendemain matin.
- Ok.
Elle avala deux pillules que son médecin lui avait prescrit. En général, elle s'endormait assez vite avec. Mais ce soir, Inès préférait ne plus rien ressentir, être anesthésiée. Elle finit la plaquette. Finalement, mieux valait l'obscurité que tous ces regards, y compris le sien.
Fin.
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