En ce venteux jeudi de novembre, le littoral était désert. Pas un camping-car sur le parking ! Après une vingtaine de minutes de marche, nous atteignîmes le bout de la péninsule. Prenant place sur un morceau de granit, nous restâmes coi devant le spectacle... Grandiose ! Un épais plafond de ouate cendrée s'étirait jusqu’à l'horizon brumeux pour y embrasser la mer dans un flou artistique pudibond. Le fracas des vagues déferlant sur le promontoire nous comblait d'humilité face à la puissance des éléments.

Nous étions aux premières loges. Une impression étrange s’empara de moi : comme si Dame Nature nous offrait l’exclusivité de cette représentation, balcon VIP au théâtre de l’océan pour ce ballet d’automne. L'intensité de l'instant prit des allures spirituelles, mystiques. Même le chien, à sa manière de nous observer, semblait le ressentir. Bien au-delà de la beauté de ce paysage de bout du monde, ce que nous éprouvâmes alors scellait les liens de notre amitié à tout jamais. Un état de grâce, une symbiose, un tout petit moment où deux terriens se rejoignent en tous points. Les âmes pieuses parleraient de communion, si tant est qu'un joint d'herbe en guise d'hostie soit acceptable... et qu’on laisse Dieu en dehors de tout ça !

Matic me jeta alors un regard avec au coin des lèvres ce sourire espiègle, trahissant notre pensée commune :

De tout le territoire français, nous sommes actuellement les deux les plus à l'ouest !

Oui, à n'en pas douter, nous étions, sommes et resterons à l'ouest… Car nous nous y trouvons bien.

“ C’est bien d’amitié vraie qu’il s’agit lorsque deux amis, sans échanger un seul mot, sont heureux d’être ensemble.”

Georg Ebers.