Chapitre 1 - SACHA
le 25/04/2020 & le 18/02/2022
- Astrid, je ne suis pas ton ennemi! Je fais partie de l'Organisation!
Malgré toute notre technologie, une caméra est trop dure à fixer durablement. Il était tout à fait prévisible qu'elle allait se débarrasser de ses vêtements dès que possible, aussi l'intégrer au tissu n'était pas une option. Nous avons donc dû nous résoudre à simplement entendre, mais c'est le principal. Et c'est également ce qui me permet à présent de savoir avec précision que l'Organisation a enfin retrouvé Alexy.
Alexy ?
Ce n'est pourtant pas avec ce prénom que le jeune homme qui lui parle l'a appelée. Comme une énième confirmation qui vient balayer définitivement mes doutes.
Sans doute bouleversé de voir son... amie s'enfuir devant lui, il a oublié provisoirement qu'elle ne s'appelle, en principe, plus comme avant. Ses habitudes ont repris le dessus. Nous avons donc bel et bien affaire à l'arme secrète de l'Organisation, sinon il n'aurait pas commis cette erreur de lapsus.
Astrid.
Moi qui me demande, depuis la première fois que je l'ai vue, quel est son véritable prénom, j'ai enfin ma réponse.
Astrid.
Je ne saurais décrire ce qu'il provoque en moi.
N'est-ce pas un nom trop affirmé pour la personnalité si discrète et effondrée que j'ai observé au début ? Mais en même temps, il est évident que la résistante n'a rien à voir avec la petite fille peu sûre d'elle qu'elle a été forcée de devenir. Et pour avoir accepté de prendre tous ces risques, son caractère doit effectivement être solide et bien trempé. Elle a été élevée par l'Organisation, dans un monde de danger permanent, et en plus de tout ça, c'est une fille, qui a dû apprendre à se défendre des hommes.
Une battante. Voilà ce que m'inspire son vrai prénom, une battante qui ressemble déjà beaucoup plus à la personne qu’elle est devenue par la suite. Astrid, Astrid comme les étoiles, comme quelque chose de supérieur, au-dessus de tout, et en même temps si relié à nous.
Astrid.
Un vague instant, je me mets à songer à sa vie avant la mission. Etait-elle amoureuse, dans cette autre vie, avant que tout ne change ? Tenait-elle à quelqu'un plus qu'à quiconque, lui a-t-elle offert son coeur, avant de devoir tout oublier définitivement ? Quels sacrifices, en plus du danger auquel elle s'exposait, a-t-elle dû consentir à faire ?
Puis je me rends compte de l'absurdité de mes pensées, et je me morigène moi-même. Quelle importance ? Ca ne change rien, rien à mon plan. Sentiments ou pas, elle va nous mener à l'Organisation, je vais la faire payer, et c'est tout ce qui compte. Pourquoi ai-je dévié vers ce sujet, d'ailleurs ? Je ne devrais même pas m'y intéresser, même pas y penser.
Je la hais.
Le bruit des respirations hachées s'arrête soudain.
Le micro caché a-t-il subitement cessé de fonctionner ?
Non, cette coupure ressemble plutôt à... une expression de stupéfaction. Et je ne peux que comprendre Alexy, ou plutôt Astrid. A sa place, cette déclaration m'aurait également laissé pantois. Le croit-elle ? Va-t-elle essayer de lui échapper, persuadée qu'il ment ? Et si elle réussissait ? Et si l'Organisation n'arrivait plus à la retrouver ensuite ? Non, impossible. Ils ont des traqueurs beaucoup plus compétents qu'Astrid. Enfin, peut-être pas avant, mais maintenant, elle a oublié sa formation, et n'a aucune expérience de la survie.
- L'Organisation ? répète Astrid d'une voix faible.
Je donnerais cher pour voir l’expression de son visage en ce moment, mais l’idée qu’elle retrouve des personnes auxquelles elle tient me fait horreur. J’aurais voulu qu’elle reste dans le flou, qu’elle continue de souffrir ainsi, déboussolée, pendant bien plus longtemps. Ses retrouvailles avec l’Organisation sont essentielles à mon plan, ça ne les en rend pas moins difficiles à avaler pour moi.
- Sais-tu... sais-tu qui nous sommes ?
Mais au lieu de répondre, comme je m'y attendais, Astrid me surprend une fois de plus :
- Non! Non, vous ne faites pas partie de l'Organisation! C'est eux, je le sais, j'en suis sûre, ils me poursuivent. Ils m'ont retrouvée, et maintenant, ils veulent me piéger. JE NE ME LAISSERAI PAS BERNER! hurle-t-elle.
- Pardon, murmure alors son interlocuteur.
Un bruit de lutte nous parvient, puis comme un coup asséné, et enfin, un cri étranglé.
Astrid s'écroule lourdement à terre, mais à l’idée de toutes ces nouvelles informations que je vais bientôt pouvoir rapporter à Mr. Carren, la satisfaction me submerge.
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