Chapitre 33 - 1er décembre 2014

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- Sebastiano, mon ami !

Cet accent de merde ! Il fallait vraiment que je lui dise qu’il imitait très mal les italiens… Mais, une autre fois, peut-être.

- Salut, poto, ai-je répondu d’une voix triste.

- Je suis content de passer une soirée entre gars!

- Mouais, enfin, je vais être de mauvaise compagnie, tu sais.

- Je l’ai senti au téléphone, tout à l’heure. Toujours tes soucis avec Norah ?

Je soupirais fortement.

- Elle vient de me demander le divorce.

- Oh merde… Je suis désolée, mec. Je savais pas que c’était aussi grave, quand tu m’en parlais.

- Je savais pas non plus. Enfin, je me voilais la face...

On est restés silencieux pendant un petit moment. Il a pris mon sac, l’a posé dans sa chambre d’amis et m’a finalement dit :

- Tu sais qu’elle est prête pour toi, comme d’hab.

- Merci, toi t’es un pote, ai-je répondu en hochant la tête.

- En tant qu’abstinent, je pense pas être le meilleur des potes, mais bon.

- J’ai pas besoin de boire...

- Je sais pas comment tu fais. J’aimerai tellement, moi aussi.

- Je sais, mec. Je suis désolé.

Je souriais affectueusement.

- On se mate un petit Dragon Ball ?

- Si tu me prends par les sentiments…

On a rigolé et je lui ai donné une petite tape sur l’épaule.

***

Le lendemain, je suis allée récupérer Anouk, comme prévu. Ça m’a fait tout bizarre de voir Norah. En vingt-quatre heures, toute ma vie avait changée. Il y avait de la distance, de la froideur. De la gêne, aussi. Surtout de la gêne. Je ne pouvais plus la toucher. Je devais faire attention à ce que j’allais lui dire, à la manière dont j’allais m’adresser à elle. Je redoutais de lui dire des mots doux par habitude, alors que je n’en ai plus le droit.

- Je suis désolée, je sais que j’ai tout gâché, a-t’elle fini par dire.

- …

J’ai soupiré fort, n’arrivant à rien faire d’autre. Je ne l’aimais plus, de tout façon. Mais ça me perturbait beaucoup de me dire qu’on n’allait plus vivre ensemble. Qu’est-ce qui avait bien pu se passer ? Peut-être que je l’aimais encore, que ce n’était qu’une phase ? Et si on se trompait ? J’allais la perdre pour toujours !

- C’est depuis qu’on a déménagé que tu m’aimes plus ?

- Je serai pas aussi catégorique…

- Tu m’as trompé, donc, niveau sentiment, je pense que ça veut tout dire.

- Tu seras toujours quelqu’un de très important pour moi.

- Stop ! Arrête ça, s’il te plaît !

Elle a eu la décence de ne rien répondre.

- Je dirai que quand j’ai fait ma fausse couche, notre relation a pris un sacré coup.

- J’ai énormément souffert !

- Je sais, moi aussi.

- Pourquoi tu ramènes toujours tout à toi ?

- Pardon. Je suis désolée que tu l’aies aussi mal vécu. Et aussi de ne pas avoir su mieux te comprendre. C’était impossible !

Après quelques secondes, elle a ajouté :

- Je ne t’ai pas trompé, au sens propre du terme. J’ai rencontré quelqu’un… Pardon si ça te fait du mal mais j’ai des sentiments. Ce n’était pas juste…

- Oui, bon, d’accord, j’ai compris ! C’était pas un coup d’un soir, c’était beau et romantique, c’était de l’amour ! Je pense avoir saisi l’idée, lui ai-je coupé la parole en faisant des moulinets avec la main droite. Tu vas me raconter vos parties de jambes en l’air, aussi ?

- Y’en a pas eues…

- C’est bon, je veux pas savoir ! L’ai-je coupée en tendant le plat de ma main vers son visage.

J’étais moins serein que la veille, quand elle me l’a appris. J’avais eu le temps de cogiter à ce qu’allait devenir ma vie, maintenant. Et franchement, j’en savais rien du tout.

Il y a autre chose que je ne savais pas et qui, tout-à-coup, est devenu important à mes yeux :

- C’est qui ?

- Qui ça ?

- Je suis pas en colère, je veux juste savoir avec qui tu es en couple ?

- Tu vas te mettre en colère, si tu l’es pas déjà…

- …

- Je te le dirai plus tard.

- T’en as trop dit. Je veux savoir, maintenant.

- D’accord…

J’ai entendu un bruit horrible lorsqu’elle a déglutit. On aurait dit qu’elle n’avait plus de salive et que sa gorge s’était écorchée au contact sec de sa pomme d’Adam.

- C’est… Shannah.

- Pardon ?

- T’as compris.

- Tu déconnes, j’espère ?

- Non. Je suis désolée…

- T’es désolée ?

- Oui..

Je devais être moche tellement je sentais les traits de mon visage tirés. J’avais envie de renverser chacun des meubles que je voyais. Je voulais hurler. Je sentais la tension dans mon bras qui ne demandait qu’une chose, être évacuée avec une bonne claque. Mon torse était comprimé et je sentais une chaleur foudroyante à l’intérieur de mon ventre.

- Tu sais que tu parles de mon amie, là ? Tu pouvais pas trouver quelqu’un d’autre ? Et elle… à quoi elle joue, putain?

- C’est pas de sa faute ! Elle voulait qu’on attende !

- Elle voulait pas que tu me le dises ?

- Non, elle voulait qu’on attende avant de se mettre ensemble…

- Vous vous êtes bien foutues de ma gueule ! Bon, j’en ai assez entendu. Passe-moi la petite. Je te la ramène demain. Maintenant, c’est pour Anouk qu’on se parle, sinon je sais pas qui t’es et je m’en fous.

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