37. Élégance
Exceptionnellement, j’ai remis mon masque. Malgré la prise de confiance en moi, je reste consciente de mon désavantage esthétique.
Je retrouve pour la dernière fois la tatoueuse, pas à sa boutique, mais à une adresse à Antony. Giulia m’accompagne, un peu par jalousie car convaincue que ça pouvait déraper entre moi et la tatoueuse.
Lorsqu’elle aperçoit le casque rose tenue à la main par une brune pâle au visage fin et aux grands yeux cernés, elle me murmure :
— C’est elle ?
— Oui.
— Mais elle n’est pas belle.
— Peut-être moins que toi, mais elle a du charme.
J’avance vers elle et lui fais une bise polie en présentant ma belle Italienne :
— Giulia, ma compagne.
La tatoueuse a un regard entendu, celui qui confirme qu’il n’y aura pas de dérapage, ce qui me déçoit presque un peu. Nous poussons la porte de l’immeuble puis nous sonnons à la porte verte d’un appartement.
Une petite blonde d’1,40 mètre nous ouvre, vêtue d’un simple débardeur et d’un pantalon de jogging. Malgré sa taille, son absence de forme, son visage est marqué par une trentaine d’années. Elle nous souhaite la bienvenue avec une voix nasillarde enjouée. Elle connaît bien la tatoueuse, car elle lui fait la bise en disant :
— Salut Lydie. Toujours avec l’autre ?
— Oui, je suis accroc. Elle sait faire des trucs qu’aucune autre ne fait.
— Ça c’est clair, mais tu sais, tout s’apprend, et tout ce qu’elle m’a fait, je l’ai bien retenu.
Lydie sourit simplement aux avances de la photographe. L’ex-petite amie de la collègue de ma tatoueuse me dit :
— Bon, par ici !
Nous passons dans une pièce qu’elle a couvert de draps noirs, entouré de spots coiffés de parapluies.
— Toujours okay pour poser nue ?
— Oui. J’ai promis.
— Je te laisse te déshabiller derrière. Puis dès que t’es prête, on se lance.
Il y a un simple paravent derrière lequel je m’isole, et j’entends la petite voix ajouter à l’attention de Lydie :
— Je n’ai pas de culotte.
Connaissant la tatoueuse, elle ne résistera pas longtemps à ce genre de provocation. Si Giulia n’était pas là, j’aurais appuyé un peu dans le sens de la petite blonde, histoire de ressentir le frisson d’un plan à trois.
Giulia reste près de moi, et m’admire m’effeuiller jusqu’à ce que je me présente telle Êve à leurs trois paires d’yeux. Je ne me qualifierai pas de femme pudique, mais deux frissons de gêne et d’interdit délicieux se poursuivent l’un l’autre sur ma peau. Après tout, chacune d’elles aime les courbes féminines.
— Un chef d’œuvre peint sur un chef d’œuvre, commente la petite blonde.
Ma vision verte permet de distinguer son cœur qui s’accélère légèrement, le désir qui l’emplit discrètement. Giulia me scrute comme si elle me découvrait pour la première fois, sans cacher un rictus d’appétit. Seule Lydie semble insensible, peut-être tracassée intérieurement par des soucis. Ce n’est pas grave si la tatoueuse n’est pas réceptive, de toute façon, ça semblait mort pour de la fantaisie. La blondinette me convie :
— Allez ! On commence à genoux. Plus de profil. Voilà, penche la tête, regarde-moi.
Les petites mains délicates de la photographe me guident, glissent mes cheveux derrière mes épaules, replacent un membre, et décuplent innocemment le désir de les sentir en des endroits plus érogènes. D’un bras, je cache ma poitrine, puis elle prend la première photo.
Les postures qui suivent me sont imposées, elle me demande de sourire, de parler d’inspirer ou d’expirer au moment où elle déclenche la rafale. À chaque minute, mes doigts s’imaginent lui baisser son jogging et ma bouche se scotcher à sa vulve, comme un poisson nettoyeur de vitre à un aquarium. Pendant ce temps, Giulia pourrait me câliner amoureusement les plus intimes de mes recoins.
Mes fantasmes brûlent et papillonnent en moi, les poignets graciles de la petite blonde m’effleurent toujours, sans vraiment de malice apparente. Elle me fait écarter les jambes face à elle pour photographier l’intérieur de ma cuisse.
— Cache avec une main.
Je masque mon pubis d’une main et m’étends, épaules aux sols avec un soupire, juste pour enflammer l’imaginaire des deux spectatrices. Une fois la rafale déclenchée, j’enfonce mon index dans mon intimité pour en mesurer l’humidité. Mon geste n’échappant à aucune des trois groupies, les hormones envahissent peu à peu la pièce. Le corps de Lydie commence à s’éveiller, Giulia est presque mal à l’aise, et la petite blonde semblent avoir un gain d’énergie. Les photos se succèdent puis l’artiste s’approche avec son appareil :
— Je vais faire les macros.
Elle braque ma gorge puis murmure :
— Si ta gonzesse n’était pas là, je te boufferais la chatte comme on ne te l’a jamais bouffée.
D’un regard appuyé, je lui fais comprendre que ça m’aurait bien plu. Elle fait le tour de mon corps sans ajouter un mot, puis déclare :
— Okay, j’ai fini. Je te laisse te rhabiller, on se retrouve après.
Elle quitte la pièce avec la tatoueuse, me laissant seule avec Giula. Ma belle Italienne me rejoint derrière le paravent et murmure :
— Pourquoi t’as fait ça ?
— J’avais envie de provoquer un peu.
— Sur moi, ça a été efficace.
— Sur vous trois ça a été efficace. Si on n’avait pas été ensemble, je me faisais un plan à trois.
— Tu regrettes qu’on soit ensemble ?
— Non.
J’embrasse délicatement sa bouche et murmure :
— On a toujours le temps pour un plan à quatre, si tu veux.
— Elles ne sont pas du tout mon style. Surtout la tatoueuse.
Malgré mon corps un peu déçu, mon cœur amoureux s’enorgueillit d’être sa favorite. Je l’embrasse à nouveau sur la bouche. Ses mains visitent chaleureusement ma peau avant que je ne la revête totalement.
— Je suis contente d’être la seule à ton goût.
Avant que j’enfile ma veste, elle ajoute :
— Par contre, toi, tu sautes sur tout ce qui a un vagin, non ? Brune, blonde, grande, petite…
— Certaines épreuves dans une vie te font apprécier chaque poussière dont tu peux profiter.
Elle sourit, ses yeux brillent de sentiments.
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