Vendredi 16 Novembre.

J'ai demandé à mes parents pour la soirée d'Agatha. Ils sont d'accord, à condition que je ne boive pas plus de deux verres d'alcool et que je ne rentre pas après minuit. À croire qu'ils s'en foutent si je m'amuse ou pas. Son anniversaire est dans huit jours, je sais pas trop quoi lui acheter. Elle va sans doute vouloir des fringues ou des bijoux, ce genre de trucs féminins avec lesquels ma mère me harcèle depuis des années.

J'en peux plus d'elle d'ailleurs. Je suis sûre qu'elle fait exprès de ne pas laver mes sweat-shirts et mon jogging. Non mais si elle se regardait, avec sa dégaine de fausse cougar et son T-shirt « j'peux pas, j'ai licorne » ? Je dois même dire que sa teinture blond platine ne lui va absolument pas.

Mon père, c'est pas mieux. À la fin de chacune de ses phrases, il me dit : Estelle. Il appuie sur le : Estelle. C'est bien, tu as eu dix-huit en histoire, Estelle. Va aérer ta chambre, ça sent le chacal, Estelle. Mais où est passée ta féminité, Estelle ? Ah ah, qu'elle est gentille et jolie, notre fille, elle fera tomber tous les hommes de la Terre, Estelle !

Aaaargh, je fulmine, mais si je fais le moindre faux pas, paf ! Estelle. Bah oui, Estelle, c'est ton prénom nan ? Bah oui, c'est marqué Estelle sur ton extrait de naissance. Bah oui je sais.

Aaaargh !

Et dire que je parlais de la soirée d'Agatha... Mais ça me rattrape, ça me court après comme le chien de tante Sylviane. Sale molosse ! Vie de merde.

Samedi 17 Novembre.

J'ai fini par confirmer, pour l'anniv d'Aggy. Je vais demander à ma mère pour aller lui acheter des fringues à H&M ou d'autres magasins du type. Bien que je suis sûre (bordel de mes habitudes d'écriture) qu'elle va me dégoter une mini jupe imprimé zèbre fluo ou une connerie pour gamine de ce genre. Ca me donne la nausée, rien que d'en parler.

Mais elle a besoin de quoi ? Que je me colle une fausse barbe ? Que je fasse la LGBT pride ? Je suis persuadé qu'elle le sait, au fond d'elle. Mais elle le refuse. Ca aussi ça me dégoûte.

Vie de merde.