Illusions
Goyle l'avait toujours trouvée belle.
Elle était détestable, évidemment. D'abord parce qu’elle était d'une prétention incommensurable et qu’elle savait tout sur tout, mais également par sa nature-même. C'était une Sang-de-Bourbe, et même si Goyle n'avait jamais cherché à comprendre pourquoi il vouait tant de haine à cette engeance, il avait appris dès le plus jeune âge à réprouver les gens de son espèce. De quel droit une née-Moldue pouvait se targuer de maîtriser tant de connaissances magiques, quand lui, un sorcier au sang pur, passait depuis le plus jeune âge pour un crétin congénital ? Il savait bien ce que l'on disait de lui dans son dos, jusque dans son propre entourage. Il ne se rappelait que trop le mépris avec lequel il avait été traité par Malefoy et les autres Serpentard, pendant toutes ces années, alors qu'ils se prétendaient ses amis. Seul Crabbe avait su être pour lui un vrai camarade, parce qu'il subissait le même traitement. Mais Crabbe était mort.
— Tâche de ne pas jouir en elle, prévint Bellatrix d'une voix étrangement chevrotante. Mieux vaut éviter d’engendrer un rejeton impur qui aurait de ton sang…
L'avertissement le stoppa quelque peu dans ses élans ; il n'avait pas pensé à cela. La mise en garde arrivait à point nommé, car il n'aurait guère fallu plus que quelques coups de reins supplémentaires pour qu'il prenne son plaisir. Il ralentit la cadence, tout en laissant courir ses doigts sur la peau nue de la jeune Gryffondor. Il aimait la caresser, presque autant qu'il savourait l'étroitesse de son intimité dans laquelle gambillait sa virilité. Elle était douce, frêle et fragile comme une fleur délicate, trop délicate pour être cueillie par un lourdaud dans son genre. Il avait beau la détester depuis le premier jour, ce sentiment s'émoussait à mesure qu'il se collait à elle. Elle sent bon. Le désir saugrenu de la prendre dans ses bras lui traversa l’esprit. Les filles l'avaient toujours regardé avec dédain, quand elles ne se contentaient pas de l'ignorer purement et simplement ; lorsqu’il rêvassait dans la solitude de ses draps en s'inventant des relations imaginaires, les corps éthérés de ses partenaires oniriques le gratifiaient des gestes câlins et des mots doux dont il avait toujours été privé. A présent, Granger était là, réelle et tangible, et il n'avait pas envie de se contenter de la posséder physiquement. S'il n'y avait eu le regard inquisiteur de Bellatrix qui contemplait la scène dans ses moindres détails, il l'aurait probablement enlacée comme une amante, posé ses lèvres sur les siennes. Mais il y avait Bellatrix, et Bellatrix lui faisait peur.
*
Paupières closes, Hermione ondulait du bassin. Trahie par son corps, que manipulait le charme lancé par Bellatrix, elle ne pouvait réprimer les vagues de plaisir que diffusait dans son bas-ventre la fusion de leurs sexes. Luttant contre le sentiment de culpabilité qui la rongeait - comme si ce qu'elle subissait était de sa faute ! - la jeune sorcière fit le vide dans son esprit, s’efforçant d'effacer du moment présent l'idée que Goyle soit à l'origine de son plaisir. Le sexe qui allait et venait en elle avait beau être le sien, le rustre aurait été bien incapable de lui inspirer le moindre désir sans recourir à la magie. Se réfugiant dans les tréfonds de sa psyché, Hermione trouva un refuge à sa conscience : elle pensa d'abord à Ron, mais il était trop difficile de penser à lui dans un moment pareil. Penser à Ron alors qu'elle s'adonnait, toute nue, à une étreinte bestiale avec Goyle sous le regard de Bellatrix Lestrange qui se caressait… cela était trop culpabilisant, elle salirait la pureté des sentiments qu'elle éprouvait pour lui. Elle trouva plus facile d'invoquer l'image de Viktor Krum ; elle n'avait pas de sentiments pour l'attrapeur bulgare, mais elle conservait de leur relation quelques souvenirs émoustillants qui, aujourd'hui encore, alimentaient quelques fantasmes secrets. Contrairement à Ron, elle avait déjà vu Viktor tout nu, même si elle n'avait pas voulu coucher avec lui à l'époque. Elle se concentra sur le souvenir de ses abdominaux saillants, de ses épaules et de ses bras forts dont elle appréciait l'étreinte, et tenta d'imaginer que c'était lui et non Goyle qui était en train de la pénétrer et de la caresser. Son esprit s'évada loin de ses tortionnaires, et, pour un temps, elle savoura l'illusion d'avoir repris un peu de sa liberté. Viktor, Viktor, Viktor…
La porte s'ouvrit tout à coup à la volée, mettant un terme à la trop courte évasion d'Hermione dans un fracas qui résonna entre les murs de la chambre. Goyle et elle sursautèrent tous les deux, tandis que Bellatrix ôtait prestement sa main des replis de sa robe et recouvrait un semblant de dignité.
Lucius Malefoy fit irruption dans la chambre, considérant tour à tour d’un oeil ahuri sa belle-soeur Bellatrix et les deux jeunes gens sur le lit. Son regard s'attarda naturellement sur Hermione, qui sentit le feu lui monter aux joues alors que le père de Drago Malefoy la découvrait en tenue d’Ève, en train de chevaucher le meilleur ami de son fils. Le sexe de Goyle était encore fourré dans le sien. Exposée comme elle l'était, incapable de cacher la moindre partie de son corps, elle sentit une nouvelle fois rugir les alarmes de sa pudeur.
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