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 Deux ans plus tard, je ne ressemblais plus en rien au fringuant trentenaire, jeune père de famille aux yeux rieurs, que j'étais encore ce jour-là.

J'évitais de me regarder dans la glace, mais chaque fois que ça m'arrivait, mon reflet me balançait sans pitié l'image désolante d'un homme brisé, aux traits tirés et anxieux, dont les tempes et la barbe prématurément grisonnantes accentuaient l'impression qu'il avait pris quinze piges en une simple paire d'années. Et, pour renforcer ma déprime, ce n'était pas qu’une impression.

Ces deux ans qui m'avaient vieilli plus vite qu'un abonnement quotidien aux UV du soleil niçois, m'avaient bel et bien détruit. Je les avais passés à supporter les accès de rage et de jalousie maladive de Thelma, sans un RTT de répit. Parce que je l'aimais, et que je tenais à ce que notre couple perdure pour notre fille, j'avais essuyé des insultes et des paires de baffes – ce qui n'était qu'une sombre plaisanterie comparé à ce qu'elle pouvait m'infliger lorsqu'elle était de très mauvaise humeur –, presque chaque jour.

Avec le recul, je ne me serais pas laissé tomber si bas, même dans l'intérêt d’Angèle, la prunelle de mes yeux (après tout, il y a bien des couples qui se séparent pour quelques différends et qui laissent leurs gosses derrière sans se poser plus de questions).

Elle-même ne bénéficiait plus du traitement normal qu'une petite fille pourrait attendre de la part de sa mère : depuis qu’Angèle était rentrée des vacances qu’elle avait passé chez ses grands-parents, peu après ma première dispute avec Thelma, cette dernière l’ignorait complètement. Elle avait cessé de la chouchouter, de lui parler sur ce ton agaçant de mièvrerie que j'employais sans doute aussi pour m'adresser à elle, de la couvrir de baisers aimants… Elle ne lui parlait plus, ne la regardait même plus, ne la touchait jamais.

Heureusement, elle n’était pas violente envers elle ; s'il en avait été autrement, j'aurais fui avec Angèle depuis longtemps. Mais puisqu'elle ne subissait pas la haine sélective de Thelma, et que j'étais le seul à endurer son tempérament violent, je n'avais pas jugé primordial d'agir.

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