La fin des vacances
Après le diner, nous nous éclipsâmes, Gilles et moi, et sortîmes des bâtiments du centre.
Du haut de nos quinze ans nous étions déterminés et savions que nous voulions passer ces grandes vacances ensemble. Nos parents respectifs n’ont pas posé de problème pour nous inscrire à cette colonie, trop contents de nous voir occupés et surtout loin de ce maudit quartier. Ces trois semaines sont passés très vite, trop vite. Dans deux jours il faut rentrer, déjà.
Notre balade digestive nous guida, sans nous en rendre compte, sur la falaise. La vue nous donnait le vertige. L’air des embruns nous fouettait le visage. Le cri rauque des mouettes nous sortit de notre torpeur. Pensaient-elles que nous voulions en finir ensemble et sauter, qu’elles sont venues en bande comme pour nous dissuader d’un tel projet. Il ne faut pas se mentir, il est sûrement vrai que cela nous a effleuré l’esprit à l’un et à l’autre, voire, à la même seconde.
Notre jeunesse nous a ramené à la raison et nous en sommes arrivés à la conclusion qu’il était préférable de nous battre pour rester ensemble, et vivre notre histoire. Nous avions décidé que personne ne pouvait se mettre entre nous et notre amour. Notre décision prise, nous devions trouver le moyen de rester ensemble, vivant plutôt que dans la mort.
L’esprit vif de Gilles, proposa une idée. Comme nous avions pris chacun un sac à dos avec quelques vêtements dedans, nous nous déshabillâmes et enfilèrent vite des habits de rechange pour ne pas attraper du mal. Il valait mieux jeter ceux que nous portions aujourd’hui pour faire croire à un saut de l’ange et que la mer avait emporté avec elle nos corps meurtris et méconnaissables.
L’idéal pour nous serait d’embarquer à bord d’un sous-marin afin de nous permettre de nous éclipser loin de tout et tous, s’échapper à mille lieues de ces obstacles. Regarder notre passé, que nous laissions derrière nous, à l’aide du périscope, comme d’une grosse lorgnette.
Et pour rester dans la rêverie d’une escapade romantique, je nous imagine, grimper vers l’étrave et contrairement au Titanic, remonter à la surface de temps en temps.
De nouveau, un cri éraillé nous sortit de notre sommeil, Gilles me regarda en souriant et me dit :
—Vient ma Louise, on s'est endormis ! Rentrons, tu vas attraper froid ! On trouvera bien une meilleure solution que cette belle aventure pour rester ensemble, je te le promets !
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