Il fallait vraiment qu'on vienne me déranger maintenant ! J'avais l'esprit enfumé de mécontentement. J'étais sur les dents depuis que mon réveil avait sonné, alors la personne qui venait de toquer à ma porte allait s'en prendre plein dans la figure. Il n'y avait aucune raison pour râler sur quelqu'un qui n'avait rien mérité mais je n'étais pas en mesure de me contrôler. C'était comme ça. J'ouvris grand la porte avec une violence qui aurait pu l'arracher de ses gonds.

- Qu'est-ce qu'il y a encore ? Vous êtes qui !

La personne qui me faisait face n'était pas un adulte. Elle ne devait pas se tenir là dans un office de bureau.

- Rejoins ta maman. Tu t'es perdu, ce n'est pas ici que tu devrais être. Oust, dis-je avant de trouver quelque chose de plus acerbe à cracher.

Je refermai la porte mécontent, toujours et d'autant plus de m'être déplacé pour rien. Je m'en allais rejoindre mon bureau lorsqu'on retoqua. Quoi ?

- Je t'ai dit que…

Les yeux grands et brillants de la jeune fille avaient laissé place à un mètre quarante de jugement et de supériorité. Elle entra dans mon bureau me poussant sur le côté. Je n'étais pas plus qu'un meuble. Elle s'assit sur mon fauteuil.

- Toi et moi on doit parler !

- Pardon ! Je ne sais pas ce que vous faites là, ni qui vous êtes mais…

- Paix homme ! Je suis la Paix. Ironiquement sœur de Guerre et au vu de ton attitude tu l'as plus connu que nécessaire, débita-t-elle.

- Et…

- Je viens rétablir l'équilibre.

- Ah…

Je soufflais du nez balayé par ce caractère dur et intransigeant.

- Paix ? Vous ! Laissez-moi rire. Vous ne devriez pas vous occuper de quelques autres problèmes dans le golfe arabo-persique au lieu de me déranger dans mon office de travail. Vous voulez me faire quoi ? La morale, ironisais-je furieux.

- Bien sûr, sourit-elle ironiquement. Malheureusement ça ne marche pas ce genre de choses. Approche !

- Non, je n'ai pas besoin de tours de magie ou de conseils à la noix. Cela fait bien longtemps que vous auriez dû faire quelque chose.

- Quoi ?

- N'importe quoi pour améliorer… ça.

Elle traversa mon espace en coup de vent pour venir me plaquer contre un mur. Petite, sa tête ne m'arrivait qu'à la poitrine mais elle dégageait une rage effrayante.

- Les excuses et insultes se crachent avec les mots, la paix n'a pas besoin de langue. Elle se tait pour être effective.

Elle ménagea une pause pleine de signification et de mise en garde implicite.

- Apprenez à vous marcher un peu sur les pieds et à aplatir votre ego avant de parler. Peut-être qu'avec ça, ma paix sera plus efficace.

Elle partit aussi vite qu’une bourrasque, arrachant définitivement la porte et faisant claquer ses chaussures dans l'office. Je me retrouvais seul, terrorisé et définitivement calmé.