Maé

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Les doux rayons du soleil hivernal se répandaient à travers les rideaux de la grande chambre de Maé, réveillant la jeune adolescente qui, encore fatiguée de la veille, mit du temps à prendre conscience et ainsi à se tirer du lit. Son réveil n'avait pas encore sonné, il n'était que 6h, mais la voilà déjà sur pied, s'étirant sur toute la longueur de ses 1m68.

Comme chaque matin, elle raya une case de son calendrier mural et regarda la case du jour : jeudi 2 février, rien de prévu. Elle n'avait quasi aucune expression sur son visage, si ce n'est un sentiment d'épuisement résultant de la soirée d'hier. La fameuse soirée... Elle ne voulait plus y penser. Elle voulait l'oublier et l'enfoncer loin dans sa mémoire pour ne plus jamais la retrouver, juste tourner la page et profiter de la journée. Malgré toute son envie intérieure, elle n'avait pas vraiment l'air de vouloir "sourire à la vie".

Elle partit dans la salle de bain en trainant des pieds, sa moue s'aggrandissant sur son visage. Une fois sous la douche, elle ne put s'empécher de penser à la soirée de la veille. Cette fameuse soirée ou elle avait perdu un mec, trouver un nouveau, puis perdu de nouveau, et finit dans les bras d'un autre encore à la fin ; cette fameuse fête où elle avait pour la première fois bu plus de sept verres, fumer, et vomi sur le buffet suite à ça ; ce fameux soir où elle découvrit le plaisir sexuel pour la seconde fois avec un inconnu, la seule différence entre les deux étant la présence de consentement ; cet anniversaire transformé en boite de nuit où elle s'était "foutue en l'air dans tout les sens du termes" selon ses propres mot.

Toutes ses reflexions continuait à la torturer une fois la douche passée tandis qu'elle cherchait sa tenue du jour. Robe bleue fleurie ? Jupe et chemisier rose ? Ou simplement jogging et t-shirt. Elle pensa pour sa séance de sport de ce matin et opta pour la troisième option. Elle descendit les escaliers une fois vêtue et trouva sa mère dans la cuisine, assemlant une salade de fruits.

  • Bonjour mon sucre d'orge. Tu as passée une bonne nuit ? lui souira sa mère en levant la tête vers elle.
  • Horrible, souffla la jeune femme. T'as pas quelque chose pour les migraines ou les maux de crânes ?
  • Elle s'est si mal passée cette soirée ? s'étonna sa mère.
  • Plus horrible encore que ma nuit, t'imagine pas à quel point.
  • Eh bien vas-y, raconte tout à ta maman chérie, ça t'aideras.

Maé soupira et s'assit sur l'un des hauts tabouret de l'îlot central noir, face à sa mère, et la regarda dans kes yeux :

  • T'as vraiement la tête à écouter les histoires d'une adolescente sur une soirée avec ses amies ? Ca devrait être le cadet de tes soucis !
  • Mais non dis pas ça ! Tu n'est pas le cadet de mes soucis et tu ne l'a jamais été.

Sa mère posa doucement la cuillère avec laquelle elle mélangeait la salade de fruits et s'approcha de Maé, les yeux pleins de tendresse.

— Chérie, tes soucis, quels qu’ils soient, sont toujours importants pour moi. Peu importe si c’est une soirée ou quelque chose de plus grave, si ça t’affecte, je veux le savoir. Et puis, tu sais bien que je suis toujours prête à t’écouter, même quand ça concerne des histoires d'ados.

Maé esquissa un sourire, un peu rassurée, mais toujours tourmentée par ses pensées. Elle baissa les yeux, jouant nerveusement avec un brin de ses cheveux, hésitante à se confier.

— Tu ne comprendrais pas... commença-t-elle à voix basse.

Sa mère s’assit en face d’elle, prête à entendre la suite.

— Essaie-moi, Maé. Je ne te jugerai pas, promis. Juste, dis-moi ce qui te tracasse. Ce qui te pèse autant ce matin.

Maé resta silencieuse un instant, la gorge nouée. Finalement, elle décida de se lancer, non pas parce qu’elle se sentait prête, mais parce que la douleur était trop lourde à porter seule.

— La soirée d’hier... c'était un vrai désastre, maman. J’ai fait des choses... des choses que je n’aurais jamais dû faire. Je me suis sentie... si perdue, et je crois que... je ne sais même plus qui je suis.

Sa voix se brisa sur ces derniers mots, et des larmes commencèrent à lui monter aux yeux. Sa mère, sans un mot, se leva et l’entoura de ses bras. Maé ne chercha pas à retenir ses larmes. Ce simple geste d’affection brisa ses dernières barrières, et elle laissa enfin éclater ce qu’elle retenait depuis la veille.

— Je me suis perdue hier soir, maman... j’ai bu trop, j’ai fait des choses avec des gens... des choses que je regrette déjà tellement. Je ne me reconnais plus. Pourquoi j’ai fait ça ? Pourquoi j’ai laissé les choses aller si loin ?

Sa mère la serra plus fort contre elle, caressant doucement ses cheveux.

— Tu es jeune, Maé. On fait tous des erreurs. Ce qui est important, c’est que tu t'en rendes compte, et que tu apprennes à ne plus te faire du mal comme ça. Ça ne change en rien la personne incroyable que tu es. Tu as juste eu une mauvaise nuit, mais cela ne définit pas qui tu es.

Maé renifla et s’accrocha à sa mère, comme si ce contact pouvait effacer la culpabilité qui lui rongeait le cœur. Peut-être qu'elle n'était pas encore prête à pardonner ses erreurs, mais les mots de sa mère, leur douceur et leur amour, offraient au moins un peu de réconfort.

Maé resta un instant dans les bras de sa mère, silencieuse, le regard perdu dans le vide. Elle aurait voulu rester là, figée dans le temps, où tout semblait un peu moins compliqué. Mais la réalité la rattrapait, et elle savait qu'elle devait affronter ce qu’elle ressentait, même si elle préférait l’enfouir.

Sa mère se détacha doucement, la regardant avec cette expression empreinte de bienveillance qui ne faisait qu'accentuer la culpabilité de Maé.

— Tu n’es pas obligée de tout m’expliquer maintenant, tu sais. Prends ton temps, mais n’oublie pas que je suis là, toujours.

Maé hocha vaguement la tête, mais une part d’elle se demandait si elle réussirait un jour à se confier entièrement. Certaines choses paraissaient trop lourdes, trop honteuses pour être partagées, même avec sa mère.

Elle prit une grande inspiration et se leva du tabouret, contournant l’îlot central.

— Merci, maman... mais je crois que j’ai besoin d’être seule un moment, lâcha-t-elle tout en attrapant une pomme du panier de fruits sur la table.

Sa mère la suivit du regard, légèrement inquiète, mais respecta son besoin de solitude.

— Je suis en bas si tu as besoin, ma chérie.

Maé hocha à nouveau la tête sans répondre et monta à l’étage. Chaque marche semblait plus difficile que la précédente, comme si ses jambes pesaient une tonne. Une fois dans sa chambre, elle se laissa tomber sur son lit, fixant le plafond, encore vêtue de son jogging. Les souvenirs de la veille revenaient en rafale, malgré elle.

Elle se revoyait dans cette fête, la musique trop forte, les rires débridés de ses amis, les verres qui se remplissaient sans fin, l’alcool qui coulait à flots. Au début, c’était amusant. Elle se sentait libre, vivante, comme si rien ne pouvait l’arrêter. Mais au fil de la soirée, tout s’était brouillé. Les visages devenaient flous, les rires moins sincères, et tout avait commencé à se mélanger dans un tourbillon chaotique.

Elle se souvenait de lui… ce garçon dont elle avait à peine retenu le prénom. Leur premier baiser, rapide et presque sans émotion, suivi par cette suite de décisions qu’elle regrettait désormais amèrement. Comment avait-elle pu se laisser aller à ce point ? Comment avait-elle pu se perdre aussi facilement ? Le poids de la honte l’écrasait, et chaque souvenir était une nouvelle lame qui s’enfonçait dans son esprit.

Maé serra son oreiller contre elle, cherchant désespérément à faire taire ses pensées. Mais les images de cette nuit étaient trop vives, trop présentes. Elle se sentait dégoûtée d’elle-même. Le visage de ce garçon, l’odeur de l’alcool, les regards des autres invités qui semblaient la juger... tout la hantait.

Elle ferma les yeux, essayant de respirer profondément, mais une larme silencieuse glissa sur sa joue. Pourquoi avait-elle eu besoin d’aller aussi loin pour se sentir "vivante" ? Pourquoi avait-elle ressenti ce besoin de tout expérimenter, sans réfléchir aux conséquences ?

Le bruit de son téléphone la fit sursauter. Elle l’attrapa et regarda l’écran : plusieurs notifications. Des messages de ses amies, des photos de la soirée... Elle se mordit la lèvre en voyant une photo d’elle, riant, verre à la main. À ce moment-là, elle paraissait heureuse, insouciante. Mais maintenant, cette image ne lui inspirait plus rien d’autre que de la tristesse et du regret.

Elle éteignit rapidement l’écran et posa son téléphone face contre le lit, comme si ignorer ces messages pouvait effacer ce qu’elle ressentait. Mais au fond, elle savait que rien de tout ça ne disparaîtrait aussi facilement.

La journée promettait d'être longue...

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