Je grogne. Une goutte de sueur perle sur ma tempe. Mes mains arrimées à ses hanches, elle à quatre pattes, je baise la demoiselle avec fureur. Sa chevelure brune oscille au gré de mes pénétrations vigoureuses. Dans cette chambre, nos peaux claquent comme un fouet qui fend l'air. Son vagin m'aspire, et putain ce que cette sensation m'avait manqué ! Deux semaines que je n'ai pas livré un corps-à-corps sauvage avec une femme. J'ai bien cru que ma queue allait finir par exploser.

 Au bord de la jouissance, mes coups de reins s’accélèrent. Sa grotte se contracte autour de mon sexe, et, prise de violents spasmes, elle crie son plaisir. Après quelques coups de reins, je jouis à mon tour, serrant davantage ma poigne sur sa croupe sous la force de l'orgasme. Sa peau est marquée par l'empreinte de mes mains.

 Ma respiration erratique se calme peu à peu. Mes membres tremblent, j'ai le cœur qui bat la chamade. Mes cellules sont en effervescence et pourtant, je ne me suis jamais senti aussi apaisé qu'à cet instant, après le sexe. Ça fait du bien, bordel !

 Je me retire de la demoiselle et jette le préservatif souillé dans la poubelle. Je me rhabille, tandis que le mari, resté assis sur le fauteuil en velours à se caresser, s'approche de sa femme. Il dépose un baiser sur son épaule et lui glisse quelques mots à l'oreille auxquels je ne prête pas attention. Ça fait partie de leur vie privée, je n'ai plus ma place entre eux. Le spectacle est terminé pour ce soir, le rideau se referme.

 Au moment de sortir, je me tourne vers l'homme qui me remercie d'un hochement de tête. Je referme derrière moi et traverse le long couloir sombre où défilent d'autres clients venus eux aussi s'adonner aux plaisirs charnels, sans tabous ni jugements, en couple ou à plusieurs. Puis je descends l'escalier en colimaçon et m'installe au bar. Je commande un verre de scotch en attendant Terrence.

 Je scanne ce lieu de débauche dans lequel se complaît toute la noirceur de mon âme. Elle s'y nourrit comme un vampire se sustente de sang humain. Ma prison. Mon enfer. Les lumières colorées dansent en rythme avec les invités. Certains jouent avec les barres de pole dance mises à disposition autour de la salle et sur la scène. Les femmes se trémoussent, se déshabillent au fur et à mesure pour faire grimper la température. Des caresses volent entre les clients au gré de leur désir bientôt accompagnés de doux soupirs. Une mélodie suave s'élève alors dans la salle.

 Dans un coin, une blonde aux belles courbes affriolantes offre un strip-tease à quatre hommes, tous plus âgés que la demoiselle, dont deux d'entre eux se masturbent avec lenteur.

 Ici, l'identité n'a plus sa place, seules les délices de la chair comptent. Tous les corps sont acceptés, peu importe leur couleur, leur poids, leurs cicatrices. On vient tous pour la même raison : se noyer dans le péché et y prendre goût. Le Plaisir Impérial est exclusivement réservé aux personnes fortunées et pour la majorité renommées. Un lieu où l'anonymat est de mise. Les gens nous pourfendraient si nos noms sortaient de ces murs. Nos carrières prendraient fin, l'espoir vain de revoir la lumière des projecteurs. Quand on n'a jamais connu ça, on ne peut pas comprendre un tel univers.

 La jeune femme s’assoit sur les cuisses d'un beau noir et s'empale sur sa queue. J'admire les lignes de son visage se crisper sous le plaisir que cet homme lui procure. Un autre, le plus vieux, se glisse derrière elle et s'enfonce dans son cul. Elle se cambre. Elle crie. Les deux autres lui proposent leur sexe à sucer. Elle les cajole avec gourmandise.

 Je n'aime pas partager ma proie avec d'autres hommes, mais je reconnais que ce spectacle a réveillé mon désir. Je balaie la salle du regard à la recherche de Terrence, mais toujours aucune trace de lui. Parfait. Je me lève, mais une femme d'environ vingt-cinq ans colle sa poitrine nue contre mon torse. Ses yeux fiévreux rencontrent les miens et je sais alors comment passer les vingt prochaines minutes. Cet endroit a le don de me rendre insatiable.

 Je lui prends la main et l'emmène dans une chambre inoccupée. La pièce feutrée respire la sensualité et la luxure. Face à la porte, le lit king size invite aux bacchanales. La lumière tamisée est orientée vers la scène. Quatre fauteuils sont placés dans les recoins de façon à avoir le meilleur angle de vue.

 Ma partenaire pose ses lèvres sur les miennes. Ses mains partent à la découverte de mon torse, impatientes, tandis que je palpe son petit cul. Je me permets de lui administrer quelques fessées qu'elle semble apprécier. Elle me griffe légèrement les tétons avant de retirer mon t-shirt. Je l'empoigne par les cheveux et l'embrasse avec passion. Nos langues se livrent un duel acharné à l'issue duquel la victoire est mienne. Je lui mords la lèvre inférieure, elle geint. Ma partenaire semble apprécier l'autorité que j'exerce sur elle.

 Ma main s'insinue à l'intérieur de son string en dentelle. J'enfonce deux doigts entre ses lèvres gourmandes et trempées. Elle soupire de plaisir. Je joue avec ses petites lèvres sensibles. Mon pouce torture son bouton gonflé pendant que je la doigte. Son corps tremble, la chair de poule couvre sa peau, sa cyprine coule sur le sol. Elle feule.

 J'aime regarder une femme jouir, elles sont si belles lorsque l'orgasme les fauche. On dirait une œuvre d'art que je façonne à mon image et que je ne me lasse pas d'admirer. Je me sens si fier de les avoir amenées dans cet état de plaisir suprême. C'est dans ces brefs instants que je comprends pourquoi l'orgasme est appelé par certains la petite mort. Elles s'abandonnent, vaincues, emportées par les limbes. Intense, foudroyant, mortel. Comme moi.

 Après que ma future amante ait repris ses esprits, elle se détache de moi et tombe à genoux. Elle me regarde, un sourire malicieux au coin des lèvres, et libère mon sexe de sa prison de tissus qu'elle descend jusqu'aux chevilles. Un grognement m'échappe lorsque sa langue caresse mon gland d'une manière obscène. Elle le suçote, le lèche, puis sa bouche m'accueille, et je sens mon corps bouillir un peu plus.

 Mes doigts se perdent dans sa chevelure brune. Je bascule la tête en arrière, mes yeux se ferment pour mieux apprécier ces attentions. Je donne par moment des coups de reins pour m'enfoncer davantage dans son antre.

 Le bruit de succion chargé d'érotisme répondent à mes grondements qui s'intensifient. Elle s'amuse à me défier avec le rythme. Tantôt lent, tantôt rapide. Cette femme sait comment rendre un homme heureux ! J'envie son mec, si toutefois elle en a un. Mais là, tout de suite, je n'en ai cure.

 Au bord du gouffre, je l'arrête. Je veux jouir dans sa chatte. Elle semble le comprendre, puisqu'elle retire aussitôt son string et se place à califourchon au bord du lit. Je lui donne une claque sur ses fesses qui rebondissent à merveille. Elle lâche un petit cri de surprise, glousse. Ses hanches se dandinent. Je souris. Elle aime ça. J'adore quand elles se comportent comme des chiennes !

 Une autre fessée s'abat sur son popotin. Puis une troisième et une quatrième jusqu'à ce que son épiderme se colore d'un beau rouge vif.

 Impatiente, elle gémit.

 — Viens, pas la peine de mettre un préservatif.

 Je darde alors ma queue à son entrée et la pénètre jusqu'à la garde comme un sabre dans son fourreau. Je n'ai aucun souci à me faire : ce club est réputé pour être à cheval sur l'hygiène de ses clients. On n'accepte pas n'importe qui ici.

 Dénuée de la barrière en plastique, les sensations sont décuplées. Ses douces parois intimes m'enserrent avec possessivité, je sens ma virilité humide de sa mouille, ce qui décuple mon plaisir. Je la baise rageusement. Le claquement de nos corps s'intensifie. Je tire sur ses cheveux pour faire basculer sa tête en arrière et lui murmure de sortir la langue telle une chienne obéissante.

 — Oh, putain ! Continue, baise-moi comme une salope !

 Ces mots crus m'excitent, me renvoient en ces jours cruels et font frémir mon cadavre. De dégoût ? De plaisir ? Je sens mon bas-ventre brûler d'un feu ardant que ma partenaire se plaît à intensifier par ses paroles salaces. Un puissant poison dévore alors mes cellules. Ma main empaume son sein droit, le masse avec rage, mes doigts entortillent son clitoris de désespoir. Nos carcasses se transforment en un puissant brasier qui semble consumer la pièce entière tant l'orgasme nous submerge. Ça y est, vais-je enfin mourir ?

 Après un court instant, je quitte son intimité dégoulinant de nos nectars. Je reprends mon souffle et me rhabille pour la deuxième et dernière fois de la soirée. La jeune femme fait de même, puis on s'échange à son initiative un ultime baiser fougueux. Elle me sourit.

 — Bonne nuit, bel étalon.

 Elle quitte la pièce. Désemparé, je m'assois sur le lit. Ma tête me semble lourde. Elle tourne. Des images qui font tordre d'amertume mon estomac me reviennent. Mon corps tremble. Je me hais pour laisser encore son souvenir me hanter malgré les années. Disparais ! Sors de ma tête ! Je me sens si faible et misérable.

 Les minutes défilent. Je retrouve un semblant d'accalmie, lorsqu'un homme au bras de jumelles riant aux éclats entre dans la chambre. Les trois amants s'arrêtent lorsqu'ils me remarquent.

 — Oh, veuillez nous excuser, on ignorait que c'était déjà occupé.

 Je me lève et m'empresse de les rassurer.

 — Non, ne vous inquiétez pas, j'ai terminé, vous pouvez y aller.

 — Sauf si vous préférez nous rejoindre ? me propose-t-il, un sourire en coin.

 Les deux sœurs s'extasient à cette idée et me lancent des œillades équivoques qui semblent décupler le plaisir du mec.

 — C'est très tentant, mais je vais devoir décliner, je ne serais bon à rien ce soir.

 — Je comprends, quand on a tout donné avant, hein....

 Il m'adresse un clin d’œil complice. Je souris, plus par politesse. Si tu savais, mec... Je dépasse le trio et donne une tape amicale sur l'épaule de l'homme.

 — Bonne soirée, mon pote.

 Je retourne dans la grande salle et retrouve Terrence assis au bar, accompagné de Maéva, la patronne de la boîte. Son tailleur blanc qui lui sied à merveille et ses cheveux blonds polaires impeccablement coiffés ne s'apparient pas à ce genre de soirée. Elle ferait presque tache dans ce décor. Pourtant, malgré ses quarante ans, son charisme et sa beauté la rendent irrésistible auprès des hommes et femmes. Elle a ce pouvoir de vous charmer au point que sa tenue devienne secondaire, même en ces lieux. Bon nombre de queues voudraient se fourrer entre ses cuisses, mais elle n'accorde ce privilège qu'à quelques rares élus.

 — Mec, tu en as mis du temps, tu t'es bien amusé ? Elle était chaude ? me demande mon meilleur ami, goguenard.

 — Anastasia est toujours chaude et son mari toujours prêt à l'offrir à qui la voudra. Une vraie salope.

 — Mmh... Arrête, Maéva, tu m'excites, gémit Terrence.

 — Et je pourrais te faire bien plus, mon chou...

 La patronne fait glisser sa main sur la cuisse de mon pote et la caresse. Le souffle de Terrence s’accélère à mesure qu'elle monte vers son entrejambe. Elle finit par la retirer. Terrence se renfrogne, agacé.

 — Pourquoi t'es-tu arrêtée ?

 — Toutes les bonnes choses ont une fin, chéri.

 — C'était trop court, se plaint-il.

 Maéva rigole.

 — Si tu es sage, peut-être que la prochaine fois je me montrerais gentille avec toi.

 La patronne nous lance un clin d'œil avant de nous laisser. Terrence bave devant son fessier et ses jambes fuselées mis en valeur par sa jupe.

 — Il n'y a plus aucun doute, cette femme me veut !

 Un rire m'échappe. Il dit ça à chaque fois que Maéva lui montre un peu d'intérêt. Depuis trois ans que Terrence lui court après. Il tente de faire avancer un yacht avec deux pauvres rames : impossible. Bon nombre de femmes se prosterneraient à ses pieds s'il le leur demandait, mais il s'entête à désirer ce qu'il ne peut avoir, comme tous les hommes.

 On décide de boire un dernier verre à notre victoire d'aujourd'hui. 115-113. Un match intensif durant lequel aucune des deux équipes n'était prête à céder. Je mets volontairement sous silence ce qu'il s'est passé ce soir avec la deuxième fille. Mon meilleur ami a déjà assez souffert à cause de moi, je ne souhaite pas lui remémorer le pire.

 Nous descendons ensuite aux vestiaires récupérer nos affaires. Ici, tout objet de transmission d'informations est interdit. Seul notre corps est autorisé.

 J'allume mon smartphone et découvre cinq appels manqués et trois messages provenant de ma cliente. Je lui envoie une rapide réponse afin de la rassurer, mais je sais qu'il est inutile.

 Comme souvent, Mme Calabera entrera en trombe à la première heure dans mon bureau et me prouvera une fois de plus que sa stupidité n'a d'égale que sa beauté. Cette femme râle plus qu'elle ne parle. Bon Dieu, comme je souhaiterais la faire taire en lui enfonçant ma queue dans la bouche ! Ce n'est pas étonnant que son mari allât voir ailleurs, même si j'exècre ce genre de comportement. S'engager avec quelqu'un n'est pas à prendre à la légère. Si c'est pour batifoler à droite et à gauche, on quitte la personne. Point. Pourquoi se compliquer la vie à être infidèle, quand on peut jouir de sa liberté ?

 Nous prenons l'ascenseur et descendons au parking souterrain où des voitures rutilantes plus chères les unes que les autres défilent. Je m'installe à l'intérieur de mon Aston Martin DB9, mon bébé. Ouais, je suis ce genre de mec amoureux de sa caisse et je ne m'en cache pas.

 Je salue mon meilleur pote, puis brave les ténèbres pour rentrer chez moi.