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Tu me manques, mais je le tairai car c'est une brèche à ne pas creuser : mon cœur d'écailles s'effrite avec une aise qui m'effraie, et l'on fourrerait bien par ces failles notre système solaire entier.
On se présente déjà ce mercredi soir comme d'autres avant lui : déposer tes valises dans mon appartement de transit, babiller cuisiner palper somnoler, puis prendre le wagon du temps le lendemain. Une porte sur la réalité, sus aux chimères. Je crains ne pas pouvoir donner corps à cela. Teins mes seins de toute ta bouche, je n'en serai pas moins songe de l'univers ; l'écueil de l'amour sans cœur est ma peau qui contre une main se change en écume, et les remous s'élancent en quête de ce coquillage perdu autrefois sur les rivages de France, que l'Homme a depuis lors dépossédé de son éclat.
Tu me manques, mais je tuerai dans l'œuf cet écart de jugement car ce n'est qu'un bref instant d'émoi hagard à ne pas encourager : mon cœur tricoté à grandes mailles lâches s'effiloche avec une hâte qui estompe l'existence d'un futur, et l'on remplirait bien ces alvéoles vides d'une nouvelle présence, un autre système solitaire tout entier.
On se présente déjà ta personne comme une bouture du présent dense, feuillu, presque trop garni qui pousse comme un sauvage, barbare déjà à l'assaut des cordages du Bazar. Ma plume te métamorphose en greffon qui prend ma tête - et plus encore - pour une terre fertile où proliférer. Pourtant, mon œil est arctique et mon cœur, indigent. Teins mes seins de toute ta bouche, je n'en serai pas moins pôle stoïque d'une planète en mouvement ; l'écueil de l'amour sans cœur est l'étau de tes mains qui me change en écume, et les remous s'élancent en quête de ce rafiot rompu sur toute la coque qui aurait autrefois fait naufrage sur les côtes de France.
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