Milson
Le commandant Leone avait quitté le général Douma et croisa dans les couloirs de siège national de l'armée un visage familier.
« Marco ! Comment vas-tu ?
- Colonel Milson ? fit Marco, souriant de cette surprise. Vous êtes également à la capitale ?
- Oui, un simple passage. Une fois par semaine, je me permets de m'échapper de la frontière Ouest. Il ne s'y passe rien depuis le début de la guerre. Et toi ? Comment va le front de l'Est ?
- Oh... Bien, très bien. Il faut que je vous montre quelque chose, colonel Milson. C'est important et cela vous concerne.
- Pas la peine de m'appeler colonel, Marco. On a été camarades de promotion à l'école militaire, d'accord ? Allez, montre. »
Le commandant Leone tendit à son ami un feuillet que Milson lut attentivement.
« C'est un message du Coq que nous avons intercepté. Qu'en dis-tu ?
- Ah, le Coq ! Je comprends tout. Eh bien, tout va bien ! Il parle bien de ma frontière ?
- Oui, mais...
- Alors je pourrais presque augmenter mon séjour ici ! La capitale n'est qu'à moins d'une centaine de kilomètres, ce n'est pas si loin...
- Mais enfin, Milson ! Quelque chose cloche !
- Quoi donc ? Tu connais comme moi la réputation du Coq. Une andouille qui ne sait pas accomplir une seule mission sans être la risée du monde des renseignements !
- Mais justement ! L'enjeu est beaucoup trop important ! Je ne peux pas croire que tout siot si simple. La même manière de coder, l'indication dans le message, l'annexe avec la ponctuation... C'est trop. Et puis regarde ses formulations. Pourquoi utiliser le mot lacédémonien, par exemple ? Pourquoi ne pas dire spartiate ? Et le coup de la nuit éternelle ? Il n'avait pas besoin de faire cette métaphore. Je passe sur l'emploi d'un proverbe latin.
- Tu paniques pour rien. Le Coq fait son intéressant, voilà tout. Il aime utiliser des mots compliqués et des formules littéraires alambiqués et poétiques.
- Dans un message secret ? Ça n'a aucun sens !
- Toute la carrière du Coq n'a aucun sens. Mais ne t'en fais pas, je retourne à la frontière.
- Quelque chose nous échappe. Ça ne me plaît pas du tout.
- Il faut que tu te reposes, Marco. Tu es épuisé par les attaques que tu mènes. Tu es l'un des hommes clés du front de l'Est, alors ne laisse pas un espion raté te faire perdre pied. Bon, je te laisse. Ne t'inquiète pas, tout ira bien. »
Et le colonel Milson abandonna le commandant Leone, qui n'était pas rassuré pour autant. Quelques heures plus tard, Marco était dans le train qui le ramenait sur le lieu des opérations dont il avait la responsabilité. Songeur, celui-ci avait conservé le bout de papier où était écrit le message caché, et récupéré le message d'origine sur un autre.
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