Une seconde

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« Si un jour tu me fais l’amour à La Tranche…. »

La phrase était restée en suspens. Je n’avais pas su quoi dire, pas su comment la terminer, parce que…parce que quoi ? Quelle pouvait être la suite d’une idée aussi folle qu’impossible à réaliser autrement que dans mes rêves…

Nous étions au téléphone, moi dans le lit cabane, toi dans ton lit pas cabane, et je te parlais de cet endroit que j’aime tant.

Je pourrais le détester, cet endroit, mais je n’y arrive pas. J’y ai vécu le pire drame de ma petite vie, et pourtant, je m’y sens tellement bien. Et, encore plus aujourd’hui.

J’ai dû te parler de la plage, de la mer, qui n’en est même pas une d’ailleurs, du sable fin, des vagues, parfois, des étoiles qu’on voit par milliers, des lumières de l’île de Ré, des voiliers qui se confondent avec les oiseaux, de mon chez moi, des couleurs douces, bleues, apaisantes, j’ai dû te décrire cet endroit avec toute l’admiration qui m’anime quand j’en parle, je le sais. Et dans mon élan d’envie d’y être, j’ai imaginé, une seconde, t’emmener avec moi.

Mais…juste une seconde hein.

Pas six cent quatre mille huit cents. Non. Jamais, de la vie, de la terre, de l’univers et de la galaxie (mes élèves me manquent je crois !!) je n’aurais pu imaginer toutes ces secondes, avec toi, là-bas.

Au moment où je te raconte les couchers de soleil, les promenades sur le joli pont et la piscine couverte, on se connait à peine, mais, je suis déjà bien accroc(hée) à toi.

On fait connaissance, chaque jour un peu plus, et je te dévoile là mon endroit préféré. L’association des deux me fait tourner la tête, ça me semble inespéré, impossible, et je me souviens de ce que j’ai ressenti en prononçant la phrase tronquée (ou…tranchée, devrais-je dire…) mais comment la décrire… et est-ce bien utile d’ailleurs (mais je vais le faire quand même). C’était un doux mélange de rêve et d’illusion, d’espoir et d’inespérance, d’envie et de retenue, rapidement étouffé par la réalité qui rendait impossible ce fantasme.

Et puis, environ cinquante quatre millions quatre cent trente deux mille secondes après avoir prononcé la phrase tranchée, une autre drôle de sensation s’empare de moi, quand tu franchis la porte de mon endroit préféré.

Pour de vrai.

Je peine à y croire, et pourtant.

Je ne l’avais plus envisagée, cette douce folie. C’était inutile, ça n’arriverait pas, c’était totalement infaisable, inaccessible et impensable. Donc, pas la peine d’y penser.

Mais, il s’en passe des choses, en plus de cinquante quatre millions de secondes… Et il suffit d’une seule pour faire basculer une vie et bousculer les rêves.

Et nous voilà donc, dans cet endroit, dans mon endroit.

De ce séjour magiquement parfait et parfaitement magique, je retiens la seconde où je t’ai vu dans ta voiture, la seconde où nos corps se sont retrouvés, et reconnus, la seconde où tu as sorti ta valise, la seconde où tu m’as donné le seau, et tellement d’autres belles choses, la seconde où tu as goûté mon gâteau, la seconde où tu t’es allongé sur mon lit…et puis, les nombreuses, très nombreuses, secondes de rires, de sourires, de jeux, de nages (de records !!) de discussions, de koalins, évidemment, d’orgasmes, de regards, de caresses, de sapin allumé, de promenades, de cuisine, de silences, de bisous, de baisers (non, ce n’est pas la même chose) de main dans la main, de partages, de tout.

J’ai toujours eu un problème de perception de temps quand tu es près de moi, alors dire que les heures passées avec toi semblent des secondes prend ici tout son sens…

Mon papa disait toujours (ce n’est pas de lui, mais…on s’en fout !) « une photo, c’est une fraction de seconde, fixée pour l’éternité ».

Alors on a aussi fixé des secondes, et qu’est-ce que j’aime les regarder… J’y passe des heures… Bon, j’exagère peut-être un peu (pas mon genre pourtant) mais, des minutes, ça c’est sûr.

Tu es venu à La Tranche, Belle Bouille…et…et je n’arrive toujours pas à finir la phrase tranchée, qui t’a fait devenir tranchais (c’est facile, mais j’aime bien). Mais je ne désespère pas de finir par trouver les mots manquants. Si tu n’es pas trop pressé, que tu peux attendre encore…juste une seconde.

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