Le petit corniaud

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La cloche de la petite église sonnait la sortie de la messe. C'était le moment de la matinée où je passais chez le boucher pour me procurer la viande dominicale. Je me plongeai dans la liste de courses que mon épouse m'avait remise.

— Un poulet avec les abats pour le chat ! Comme d'habitude ! Avec ça, qu'est-ce que je te mets Pierrot ?

— Deux kilos de plat de côtes, vingt-six merguez, vingt-six côtelettes d'agneau...

— Ah ! j'ai plus de merguez... Je te mets des saucisses de Toulouse ?

— Ouais, ça va le faire.

— Y a plus de côtes d'agneau non plus, à la place, je te mets des côtes de porc ? Dans l'échine, ça marche !

— Ça marche Patrick. Il me faudrait aussi du collier de mouton... T'en as ?

— Ah non, désolé. C'est pas la période du mouton, par contre si tu veux, j'ai des chipolatas, je peux faire un beau collier avec !

— Ah ! Ah ! T'es marrant aujourd'hui ! Allons-y pour un collier de chipolatas.

— Après ça ? Il te faut autre chose ?

— Euh, je sais pas... Qu'est-ce qu'on peut mettre encore comme viande dans le couscous ?

— On a reçu du boudin... Super frais. Je t'en mets combien ?

— Oh non ! Pas du boudin, trop dur à digérer, avec la semoule. Alors ça sera tout pour moi.

— Ok Pierrot ! Emballé c'est pesé ! Ça nous fait cinquante-cinq euros !

En sortant de la boucherie avec mon paquet, je pensai que pour le couscous, il n'existait pas de recette bien définie... Il faut être souple dans la vie, élastique... On pouvait sûrement l'adapter avec ce dont on disposait. Subitement, un violent orage s'abattit sur le village. Un réel temps de chien !

Tiens ! À propos de chien... Un petit corniaud se mit à me suivre en tirant la langue. Bien vite, je compris que les parfums de mon paquet de viande l'avaient mis en appétit. J'accélérai le pas, mettant de la distance entre moi et l'animal, mais ce gourmand me rattrapait sans cesse, comme si nous étions reliés par un élastique. J'essayai de le semer en me faufilant dans l'entrebâillement d'une porte cochère, mais le filou grâce à son flair, me collait toujours au train.

Enfin, j'arrivai à la maison, non sans avoir filé un coup de pied bien senti au petit canidé qui abandonna sa filature avec un couinement de douleur. Il s'enfuit alors, vers d'autres saucisses, en reniflant, le nez collé au trottoir. Ouf ! Adieu le clébard !

A peine entré dans l'appartement, j'entendis la voix de ma femme qui m'interrogeait depuis la cuisine :

— Chéri ! On doit se dépêcher ! Tu as rapporté ma commande de la boucherie ? On a le couscous à préparer pour la fête des voisins et il est déjà midi et demi ! Tout le monde va nous attendre devant la mosquée !

— J'arrive, j'arrive !

— C'est pas trop tôt ! Et c'est quoi ce chien derrière toi ?

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