Dao avoua à Johany qu'il n'avait pas spécialement prévu de cuisiner pour dîner ce soir-là, il pensait finir les restes, mais puisque Johany était là et voulait apprendre des recettes laotiennes, il allait préparer un vrai repas.

Le jeune homme lui était reconnaissant qu'il lui accorde ainsi son temps et lui transmette ses traditions, sans rien attendre en retour.

• We are going to cook a meal named : "khao pun", annonça Dao en rassemblant les ingrédients.
• Okay, great. I don't know it, répondit Johany en hochant la tête, appuyé sur un bras contre le plan de travail.
• You will see, it's simple. Fast and easy to prepare. And very good.

Johany hocha encore la tête pour montrer qu'il avait compris et le regarda émincer un oignon et de l'ail, qu'il fit dorer dans un wok. Il y ajouta du lait de coco et du curry.

• What can I do to help you ? demanda Johany, voulant se rendre utile.
• You can cook the fish in the broth for a few minutes.
• Sorry ?
• Please cook it in the broth.
• Euh... What ? I don't understand this word, s'excusa Johany.
• Put the fish there, rigola Dao en lui montrant un bouillon.
• Oh, ok, sorry. Euh, yes, I can do that.
• Thank you.

Johany entreprit donc de pocher le poisson à feu vif dans le bouillon, et ajouta de la citronnelle selon les directives de Dao.

Durant la cuisson, il lui demanda l'air de rien, s'il était marié. Le laotien lui sourit et hocha la tête en signe de dénégation.

• No, no, I am not married... répondit-il en ajoutant des pousses de bambou, du gingembre et du combava. The girl you told me about this afternoon, Amber, she's married, right ?

Johany approuva d'un bref hochement de tête. Il était touché que Dao se souvienne du prénom d'Amber.

• I want to see her again, dit-il. After my trip here, on this island.
• It's going to be complicated, you know. If she has a husband...
• Yes, of course...

Johany soupira. Dao avait les yeux rivés sur le plat, qu'il remuait à l'aide d'une cuillère en bois.

Ils cuisinèrent en silence jusqu'à ce que le plat soit prêt.

Dao arrêta la cuisson des nouilles que Johany s'était chargé de faire cuire et les mit dans un bol. Johany plaça à son tour le poisson dans une assiette et la garniture dans de petits récipients, puis ils posèrent le tout dans la salle du restaurant vide, sur la grande rabanne.

• So, we're done. Bravo, it is perfect, déclara Dao.
• Yeah, and it smells very good, approuva Johany, émerveillé par la soupe qu'ils avaient sous les yeux.
• Do you want to taste ? demanda le jeune laotien en lui tendant une cuillère à soupe et un bol.
• Yes, thanks. It looks delicious.

Ils goûtèrent leur plat et y ajoutèrent la garniture de leur choix. Johany le trouva en effet très bon et Dao le félicita pour son travail.

La lampe qui éclairait la pièce d'une lumière tamisée était le seul éclairage qu'ils avaient, la cuisine était éteinte. Ils échangeaient des sourires entre deux bouchées lorsque leurs regards se croisaient.

Des ombres dessinaient les cils de Dao, les contours de son visage cuivré.

Ce ne fut que trois heures plus tard que Johany rentra chez lui, un peu déboussolé.

Ils avaient beaucoup parlé, Dao et lui, après avoir fini leur khao pun. C'était comme s'ils se connaissaient depuis des années. Ils n'avaient pas besoin d'expliquer comment ils se sentaient, ils avaient un caractère si proche qu'ils se comprenaient mutuellement.

Dans l'ambiance tamisée du restaurant, ils s'étaient confiés l'un à l'autre comme lors de leur discussion à midi. Tout était fluide entre eux. Johany songeait que c'était sans doute parce que Dao était quelqu'un de très naturel, ce qu'il appréciait beaucoup chez lui.

Ils avaient passé un très bon moment, loin des soucis du quotidien.

Johany ne comprenait pas exactement ce qui l'avait poussé, alors qu'ils parlaient de vélo, à se pencher vers Dao, qui l'avait imité pour que leurs lèvres se rejoignent.

Il savourait encore l'empreinte de leur baiser alors qu'il ouvrait la porte d'entrée de sa maisonnette.

Le chien errant l'attendait devant et lui tourna autour, sa langue pendant mollement sur le côté. Johany le caressa distraitement avant de fermer la porte derrière lui.

Il avait la sensation d'être déconnecté de la réalité.

Lorsqu'il se coucha, il ne pensa pas à Amber.