Quand je marche
Trente mois que mon fils a été enlevé. Trente mois que je ne respire plus. On me dit de retourner au travail, de répondre aux questions. Mes parents m’appellent tous les jours mais je ne réponds plus. Je voudrais parler mais je ne sais plus comment faire. Alors je ne fais rien. Et puis il faudra que je pense à demain, à manger, respirer. Et puis dimanche, j’irai voir mon père. Il me posera des questions et je répondrai “oui mais je ne sais plus”.
Je vois que le temps passe et c’est le pire. Je fais tout pour être ce que je veux mais c’est moins important que ce que je suis. Je ne veux plus être là mais je le suis encore. Alors je vais en vouloir à quelqu’un d’autre. Pardon, tant pis, pardon, tant pis…
Stop, allez, j’vais marcher. Je vais dire adieu aux craintes, à cette angoisse paralysante. Je vais me relever et avancer sans flancher. Je vais marcher parce que je rêve quand je marche et j’ai besoin de rêver. Je vais me relever, marcher, réapprendre à être heureux et sourire. Pardon, tant pis, j’vais marcher…
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