Mon cher et tendre... Heir.
Ah, tu es revenu. J'en suis comblée.
De toutes ces personnes que j'ai réussi à toucher, j'espérai que toi, plus que quiconque, revienne.
J'ignore pourquoi...
Je n'ai jamais ressenti cela auparavant. Cette sensation dans ma poitrine... Est-cela que vous appelez « amour » ?
Peut-être... Peut-être est-ce que je me fourvoie. Ou peut-être est-ce que cette solitude qui m'a tellement pesée me fait si mal interpréter les choses...
Peut-être...
J'aimerais avoir la réponse. Peut-être l'aurais-je quand je te verrais. J'aimerais tant...
Mais vous étiez si nombreux... Peu étaient proches du but mais aucun ne l'a atteint.
Puis-je te confier un secret ? Je ne devrais pas mais au plus profond de mon cœur, je souhaite que tu réussisses à me rejoindre. J'aimerais te toucher. J'aimerais que tu me touches...
J'aimerais enfin sentir la chaleur d'un être vivant et ne plus ressentir ce froid solitaire.
Je ne puis t'offrir un amour charnel...
Mais...
Si... Si tu es vraiment tel que je l'imagine... Alors... Peut-être... Te contenteras-tu de ce que je ressens ?
J'aimerais y croire... Oui, je veux y croire. De tout mon être.
Je t'attends. Je t'attendrai toujours.
Oui, toujours.
Mon cher et tendre... Chevalier.
Une douce chaleur parcourue alors sa poitrine. Un feu s'alluma en lui...
Puis, il se leva...
***
Un jour, dans un désert de cendres, il y eut une explosion.
De cette explosion jaillit une colonne de feu sombre s'élevant jusqu'à un ciel nuageux qui masquait les rayons du soleil. Lorsqu'il ne resta plus que quelques flammes subsistant sur les cendres brûlantes, un bras emprisonné dans un gantelet s'en extirpa. Petit à petit, un corps jaillit de ces cendres encore chaudes.
Un Chevalier.
Son armure était tout ce qu'il y avait de plus banal ; identique à ce que porterait ces chevaliers que l'on retrouve dans les histoires pour enfant. Une armure grisâtre et usé par le temps qui semblait commencer à rouiller par endroits. Dans sa main, il tenait son épée. Une épée brisée aussi longue qu'un poignard.
Pendant que les cendres glissaient encore sur son armure, il tomba à quatre pattes sur le sol et se mit à respirer fortement comme si cela était tout nouveau pour lui, la main sur son plastron où derrière, sa poitrine semblait lui brûler de l'intérieur.
Viens...
Il entendit une voix. Une voix lui parlant directement dans sa tête l'appelait.
Viens... Je t'attends.
Le Chevalier se demandait à qui pouvait appartenir une voix si douce et aimante. Il brûlait étrangement du désir de le savoir.
Il se releva péniblement et tenta de lui répondre mais aucun son ne sortait de sa bouche, comme si quelque chose empêchait ses mots de prendre leur envol. Tout ce qu'il parvenait à faire sortir de sa bouche était des raclements de gorges sonores. Il insista un long moment avant de comprendre que c'était un effort vain. Le don de parole ne lui avait pas été accordé. Qu'importe. Cela n'allait pas l'empêcher de partir en quête de cette voix.
Il lui était impossible de déterminer son origine, étant donné qu'elle s'adressait à lui directement dans sa tête. Et dans ce désert de cendres, il ne voyait rien. Un désert gris et plat plongé dans une légère brume et sans repère apparent. Il entama alors son périple en prenant une direction au hasard et marcha.
Il marcha et marcha sans pouvoir mesurer le temps : le ciel se cachait toujours derrière ces nuages sombres et sans lumière filtrant à travers, il lui était impossible de savoir s'il faisait jour ou nuit. Marchait-il depuis des heures ? Des jours ? Pourtant, il ne ressentait pas une quelconque fatigue. Il ne ressentait pas la chaleur ou le froid ; la faim ou la soif. Sa seule volonté semblait lui suffire pour mettre un pas devant l'autre. Au début, il titubait sans cesse comme un bébé qui apprenait à marcher mais bien vite, il put parfaitement maintenir son équilibre. Puis, lorsqu'il marcha enfin normalement, il essaya d'augmenter la cadence de ses foulées. Petit à petit, il apprenait à courir. Après cela, il conserva une vitesse de course constante pour évoluer plus vite dans cet endroit vide de toute vie. Que des cendres et de la brume à perte de vue...
Jusqu'à ce qu'il perçoive, après un temps indéterminé, une lueur. Elle était faible mais bien visible. Il marcha dans cette direction comme un papillon de nuit attiré par la lumière. Plus il avançait, moins la cendre était profonde sous ses pieds. Au bout d'un moment, il n'évoluait plus sur un terrain cendreux mais sur un sol de terre tout ce qu'il y avait de plus normal. La brume se dissipait et laissait place à des arbres. Il avait l'impression de quitter, sans transition, son désert de cendres et brumeux sans indication temporelle pour une forêt touffue en pleine nuit. La lueur n'était plus très loin et brillait encore plus à mesure qu'il avançait.
Il ne lui fallut ensuite que quelques pas pour finalement trouver la source de cette lueur.
Un feu. Un feu de camp en plein milieu de cette forêt où un vieillard, assis près de lui avec son grand sac, dans des vêtements miteux était en train de fixer les flammes en train de danser, en compagnie d'un chien semblant âgé lui aussi.
Prudemment, le Chevalier s'approcha. Le vieillard leva alors les yeux et contempla la venue de son visiteur inattendu.
-Tiens, tiens... Encore une âme perdue qui vient à moi.
Il se mit à ricaner.
-Bien que tu aies l'air bien maigrichon par rapport à ceux que j'ai déjà croisé.
Il ricana de nouveau, plus fort.
Le Chevalier resta silencieux. De toute façon, il ne pouvait toujours pas parler. Il aurait pu produire un bruit quelconque mais il s'en abstint, sentant que cela ne servirait à rien.
-Tu te demandes sans doute ce que tu fais ici et pourquoi.
En effet. Il n'avait fait que marcher depuis qu'il avait émergé des cendres à la poursuite d'une voix dans sa tête.
-Je n'ai pas de réponses à te donner...
Ces mots ne lui satisfirent nullement. Au contraire, cela ne faisait que nourrir une frustration grandissante. Il pointa alors son épée brisée dans la direction du vieillard. Même dans cet état, cela restait une arme dangereuse mais le vieillard ne fut nullement impressionné et, encore une fois, ricana en voyant la pauvre lame brisée.
-Tu penses que me menacer t'aidera en quoi que ce soit ? Qui plus est, penses-tu pouvoir survivre dans ce monde impitoyable sans armes dignes de ce nom ?
Le Chevalier en était bien conscient mais ne bougea pas. Lui et ce vieillard, dont les yeux étaient cachés sous son chapeau et sa chevelure blanche et sale, se fixaient comme si chacun attendait quelque chose de l'autre.
-Hum. Après tout, je ne suis qu'un phare pour les gens de ton espèce. Ce n'est pas à moi de te dire quoi faire de ta misérable vie.
Le vieillard caressa son chien puis montra au Chevalier une place où s'assoir.
-Je n'ai rien pour toi, ce soir, à part te donner l'occasion de te reposer ici. Tu devras partir au petit matin pour poursuivre ta quête, quelle qu'elle soit.
Comme le Chevalier le pressentait, ce vieillard ne lui serait d'aucune aide. Ce n'était qu'un « brave » homme campant dans ces bois sombres et qui, selon ses propres dires, avait pour habitude de croiser des gens se perdant ici. Le Chevalier consentit à accepter l'offre du vieillard et s'assit près du feu. Pour une raison qu'il ne comprenait, il sentit la chaleur des flammes lui apporter un certain réconfort, alors qu'il ne ressentait rien dans le désert de cendre. Bien vite, il se mit à somnoler, comme envahit par une fatigue soudaine. Il lui fallut encore moins de temps pour qu'il s'endorme profondément.
Le vieillard recommençait à admirer les flammes danser pour lui pendant que son chien dormait paisiblement. Il poussa ensuite un long et profond soupire.
-Combien de temps encore dois-je guider ces choses jusqu'ici ?
Il jeta ensuite un œil au Chevalier et soupira une nouvelle fois.
-Une flamme bien faible que voilà pour un Chevalier... M'est d'avis qu'il ne vivra bien longtemps.
Le temps défila mais la chaleur du feu demeurait...
Le Chevalier finit de se réveiller après ce qui lui semblait des heures de sommeil. Bien qu'ayant du mal à passer à travers les branches et les feuilles des arbres, la lumière du soleil lui indiqua bien que le matin était levé.
Lorsqu'il fut totalement réveillé, il vit que le feu de camp avait disparu. Pas éteint avec des restes de bois calciné. Il n'y avait plus la moindre preuve qu'un feu avait brûlé à cette endroit. À sa place, il y avait une torche plantée dans le sol et il fut surpris de ne pas voir le vieillard ni son chien. Il n'y avait même pas de traces de pas indiquant qu'il y avait eut quelqu'un à part lui. Tout ce qui restait était une inscription écrite sur le sol :
Puisse ta flamme guider tes pas.
Le Chevalier ne comprenait pas. Sa flamme ? De quoi parlait ce vieux fou ? Et où était-il ?
Ces questions ne lui restèrent pas plus longtemps en tête car la voix... La voix l'appelait de nouveau. Il devait se remettre en route.
Sans réfléchir davantage, il se saisit de la torche et reprit sa route.
Il marcha pendant ce qui lui semblait des heures dans cette forêt étrange où la faune semblait absente : pas une fois il n'entendit chanter les oiseaux ou ne serait-ce qu'un animal se faufiler entre les herbes. Il n'y avait rien, à part lui et les clinquements de son armure qui donnaient signe qu'il y avait un être vivant à des lieux à la ronde. Et encore une fois, il ne sentit ni le besoin de boire ou celui de manger. Par contre, il ressentait à présent la fatigue et il dût par moment s'arrêter pour reprendre des forces mais cela ne durait jamais très longtemps.
La voix et ses pas lui firent quitter la forêt et l'emmenèrent se perdre dans les montagnes rocheuses. Là aussi, pas âmes qui vivent. Il se demandait jusqu'où il devrait aller pour trouver ce qu'il cherchait et combien de temps cela lui prendrait.
Alors que son errance s'éternisait, la voix fut plus forte qu'auparavant.
Tu es proche. Continue sur cette voie.
Il tomba alors sur un sentier. La voix semblait lui suggérer de le suivre pour atteindre ce qu'il cherchait. Il l'emprunta alors jusqu'à tomber sur une grotte dans laquelle il s'engouffra. Cette dernière était sombre et il s'y serait plus facilement perdu s'il n'avait pas avec lui cette torche bien utile.
Après ce qui semblait être des heures de marche, il sortit enfin de la grotte et trouva un autre sentier qu'il suivit. Le soleil commençait à tomber lorsqu'il arriva devant les marches d'un escalier. Était-il arrivé dans un lieu habité ? Il entendait du bruit provenant du haut des marches. Prudemment, il les grimpa en tenant fermant le reste d'arme qu'il possédait. En haut, il tomba sur un attroupement de... Il ne saurait dire quoi, à vrai dire. Ils avaient l'air humain mais ça n'avait que la peau sur les os, c'était d'une maigreur effroyable et leurs yeux... Leurs orbites étaient complètement vides. Le Chevalier remarqua que certains d'entre eux portaient des armes tel que des masses, des gourdins ou des épées.
Ils étaient là, debout et grognant face à de grandes portes de pierre ornées de statues diverses. Ils la grattaient désespérément comme s'ils ne pouvaient pas l'ouvrir. Juste avant la porte se trouvait un calice géant posé sur un socle en pierre.
Il s'avança un peu. Il continuait d'entendre la voix l'appeler et le pousser à continuer comme si son origine se trouvait derrière ces portes. Il avança encore et dépassa le calice avec son armure qui clinquait à chacun de ses pas. Les choses devant lui se retournèrent alors et à sa vue, poussèrent des cris inhumains avant de se ruer vers lui.
Comme poussé par son instinct, il lâcha la torche et se rua vers ces choses avec son épée brisée en main. Avec sa main libre, il repoussait et avec l'autre, il poignardait ceux qui étaient à portée. Les coups à mains nues de ses opposants étaient insignifiants et leurs mouvements avec leurs armes étaient prévisibles au-delà du risible.
Il ne lui fallut que peu de temps pour les terrasser mais il songeait qu'il aurait été plus rapide avec une meilleure arme. Il récupéra alors l'une des épées de ces créatures. Elle était en mauvais état mais ferait l'affaire pendant un temps. Il ignorait si c'était par nostalgie ou autre chose, mais il conserva son épée brisée et l'attacha à sa ceinture. Au cas où.
Il reprit ensuite sa torche puis la voix revint dans sa tête et lui indiqua la marche à suivre. Il s'approcha ensuite du calice et y jeta la torche. Juste après, l'intérieur du calice s'embrasa et créa un grand feu. La poitrine du Chevalier lui brûlait tout d'un coup, comme si en lui aussi un feu s'agitait. Brusquement, les grandes portes en pierre s'ouvrir lentement dans un grand bruit rappelant le tonnerre. Dès qu'elles furent grandes ouvertes, elles dévoilèrent un chemin pavé. Sans réfléchir, le Chevalier traversa la porte et emprunta ce chemin, alors que les portes se refermaient lentement derrière lui.
Durant son avancée, il tomba sur des corps. Des Chevaliers à l'armure et à la corpulence diverses. Certains avaient une apparence proche des humains, d'autres faisaient plus penser à des bêtes à qui on s'était contenté de poser des plaques d'armures. Des corps, il y en avait de plus en plus à mesure qu'il avançait. Comme si ces Chevaliers s'étaient battus contre quelque chose en avançant le long du chemin. À moins qu'ils se soient battus en eux...
Au bout de la route, il aperçu ce qui semblait être un forum et des bruits assourdissants y provenant. De l'acier qui s'entrechoquait. Un combat ?
Le Chevalier hésita un peu à continuer. S'il se fiait aux bruits, l'affrontement était violent et il était quasiment sans protection. Son armure avait été efficace jusqu'ici mais elle n'en demeurait pas moins rouillée par endroit et rien ne lui garantissait qu'un choc trop violent ne la briserait. Il chercha parmi les cadavres de ses pairs et emprunta un bouclier en fer en plus ou moins bonne état qui ferait temporairement l'affaire. Il s'avança alors, épée et bouclier en mains, et pénétra dans le forum.
Cette place d'échange recouverte de toute part de bougies éteintes : certaines semblaient avoir servis plus d'une fois et d'autres paraissaient comme neuve. L'intérieur était un véritable charnier de Chevaliers. Certaines armures de ces corps étaient couvertes de rouille, comme pour indiquer qu'ils étaient là depuis des lustres.
De l'autre côté de la place, il vit... deux Chevaliers en train de se battre. L'un, un Chevalier d'une corpulence banale et se battant avec une épée seulement, se faisait massacrer par l'autre, bien plus imposant avec une armure cendrée et une hallebarde. Finalement, le Chevalier cendré envoya voler son adversaire de l'autre côté de la place pour qu'il s'écrase contre un mur. Il poussa alors un cri puissant et inhumain avant d'accourir aux grandes portes se dressant de son côté et cogner dessus de toutes ses forces sans qu'elles ne bronchent.
Viens. Tu es proche. Il me tarde de te contempler enfin...
La voix semblait sous-entendre qu'elle l'attendait derrière ces portes. Il s'avança et ses clinquements furent entendus par le Chevalier cendré. Ce dernier se retourna et grogna fortement en le voyant. Maintenant qu'il le voyait de plus près, il se rendit compte que l'armure de celui qui allait être son adversaire était bien usée et partait en morceaux par endroit.
Le Chevalier cendré fit tournoyer sa hallebarde au-dessus de sa tête puis sauta. D'une roulade, le Chevalier évita la frappe dont le choc fit résonner le métal en ces lieux puis, profitant d'une ouverture, il planta son épée dans l'une des parties non recouvertes de l'armure de son ennemi, situé juste sous le bras. Ce dernier poussa un hurlement de douleur et repoussa le responsable de cette dernière d'un revers de la main. Le Chevalier leva rapidement son bouclier mais cela ne l'empêcha de décoller du sol et d'aller s'écraser plus loin. Il lâcha son bouclier, son bras le tenant étant tordu de toute part à cause de la puissance du choc. Le Chevalier cendré hurlait et s'agitait alors qu'un liquide sombre et épais s'échapper de sa plaie. Il lâcha alors son arme et était sur le point de retirer celle qui était plantée en lui. Voyant là une occasion rare, le Chevalier fonça vers son adversaire et d'une charge d'épaule après une course véloce, il le renversa et le mit à terre. Il dégaina rapidement son épée brisée et d'un coup lui demandant presque toute ses forces, il l'enfonça dans l'ouverture du casque de son ennemi lui permettant de voir. Le Chevalier cendré se débattait et était sur le point d'attraper celui qui lui causé tant de souffrances lorsque ce dernier lui asséna un nouveau coup au même endroit avec la même force. Puis il cessa de bouger...
Le Chevalier se releva et contempla le corps de son adversaire défait. Il ressentit de nouveau cette chaleur dans sa poitrine mais elle était plus vive qu'auparavant.
Soudain, il ressentit quelque chose de vif comme si son bras gauche était transpercé à plusieurs endroits par des lames acérées. Depuis son réveil, il ne l'avait pas ressenti. La douleur.
Il rangea son épée brisée mais l'autre semblait bien coincer dans le corps sans vie de son ennemi vaincu et l'abandonna. Il décida de laisser son bouclier aussi, le jugeant trop gênant avec un bras en moins.
Il s'approcha des grandes portes puis les bougies présentes de toute part s'allumèrent subitement d'un coup. Les portes s'ouvrirent alors et un nouveau chemin pavé se dressa devant lui. Blessé, il l'emprunta tout de même et une fois encore, les portes se refermèrent derrière lui. Il vit au loin un étrange bâtiment, relié à une haute tour, au bout du chemin. Il se traîna presque jusque-là, espérant enfin mettre un visage sur cette voix qui l'obsédait. Arrivé devant l'étrange bâtiment, qui était d'ailleurs à moitié en ruine, il vit les portes grandes ouvertes et n'hésita pas à y entrer. L'intérieur n'était qu'un grand hall sur deux étages éclairés par d'innombrables bougies dont certaines semblaient flotter dans les airs.
Dans ce même hall était présent des Chevaliers, bien vivants. En le comptant lui, ils étaient cinq. Lorsqu'il s'approcha d'eux, un Chevalier dissimulant une armure sombre avec des dorures sous une cape à capuche, vint lui barrer la route. Pensant d'abord qu'il comptait se battre, ce dernier lui montra alors des escaliers au fond du hall. Les deux Chevaliers s'échangèrent un long regard et le nouveau venu consentit à suivre la direction indiquée.
Il grimpa les escaliers tout en grognant, la douleur de son bras devenant insupportable. La pensée de ne pas continuer à cause de cela lui traversa l'esprit mais l'autre, celle qui lui rappelait ce qu'il avait traversé pour arriver ici, le poussa à mettre un nouveau pas devant l'autre.
Il arriva enfin au bout des escaliers, au sommet de la tour qu'il avait vu au loin. Une dernière porte se dressait devant lui et contrairement aux autres, cette dernière s'ouvrit facilement.
Il débarqua dans une chambre, illuminée aussi par d'innombrables bougies, dont le mobilier semblait comme neuf, contrastant avec le reste qui tombait en ruine. Sur le rebord de l'unique fenêtre, une femme à la chevelure cendrée était assise. Elle était vêtue de vêtements sombres ornées de dorures et malgré le fait d'avoir les yeux bandés, elle semblait regarder au loin. Qui pouvait-elle bien être ?
Il s'avança un peu et de nouveau, les clinquements de son armure attirèrent l'attention. La femme se tourna dans sa direction, comme si elle pouvait le voir, et lui adressa un sourire sublime, avant de lui parler d'une voix plus que familière :
-Bienvenue à toi, mon cher et tendre Chevalier. Tu es le dernier que j'attendais. Celui que j'attendais le plus.
Elle se leva, s'approcha de lui et posa délicatement ses mains sur son casque :
-J'avais confiance. Je savais que tu parviendrais à me rejoindre. Je suis si heureuse de te voir enfin...
Elle vit ensuite son bras blessé et le toucha, ce qui le fit reculer en grognant.
-Tu es blessé...
Elle s'approcha de nouveau et le prit dans ses bras. Surpris, le Chevalier ne savait que faire : la repousser ou lui rendre son étreinte en apparence inoffensive ? Il préféra ne rien faire et voir comme les choses allaient évoluer.
-Pardonne-moi... Me rejoindre impliquait le risque que tu sois blessé. J'aurais aimé l'éviter mais cela était impossible. Et malheureusement, tu risques de te blesser à nouveau et souvent, à l'avenir.
Elle s'écarta un peu.
-Oh, mais où sont mes manières ? Je m'adresse à toi comme si nous nous connaissions depuis toujours et tu ignores mon nom.
C'était vrai. Il l'avait longtemps cherché et son nom lui demeurait inconnu.
-Mais avant, permet-moi de la contempler...
Elle posa délicatement ses mains sur le plastron du Chevalier. Ce dernier sentit encore une fois une chaleur dans sa poitrine et il la vit sourire.
-Cette flamme... Elle était si petite mais si lumineuse lorsque je l'ai aperçu pour la première fois. Aujourd'hui, il a grandi et continue de grandir. Qui sait ? Peut-être finira-t-elle par devenir un grand brasier...
"Oui... Tu essaies de te souvenir. De ce qui était avant. Hélas, il n'y a point de repère pour ce voyage et se perdre est si aisé. Néanmoins, que tu te finisses par te souvenir ou non, tu conserveras toujours ta place auprès de moi. Allez, il est temps...
Lentement, le Chevalier vit ses mains s'enflammer d'un feu sombre. Petit à petit, les flammes s'étendirent sur tout son corps. Mais il n'avait pas l'impression de brûler. Ce feu était doux et apaisant. Il semblait lui apporter du réconfort. Dans un mélange de bruits de chair, d'os et de métal se tordant, son bras repris lentement sa forme initiale. Son armure couverte de rouille retrouva peu à peu son éclat, purifié par le feu. Une nouvelle lame remplaça celle brisée de son épée, baignant pendant un instant dans des flammes vives avant de s'éteindre. Enfin, de ses épaules, une cape d'un rouge vif avec un calice brodé en or dessus lui descendit jusqu'à ses chevilles.
Plus que guérir, le Chevalier avait l'impression de renaître. Encore.
-Moi, Hestia de Valanor, fais de toi mon champion et te donne le nom de Heir, Chevalier des Flammes Cendreuses.
À cette annonce, celui qui s'appelait dorénavant Heir se mit à genou devant elle, en prenant appui sur son épée,et se jura de la protéger au péril de sa vie.
-Puisse ta flamme toujours guider tes pas, mon cher et tendre Heir.
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