Un compagnon de voyage
L'àlfar se retourna et fit face à Argos en prenant la parole.
- Il y a quelques moments, j'ai eu des réflexions au sujet de mon parent que je n'ai guère rencontré, dit Naranwe d'un regard évasif. J'ai entrevu l'endroit de ma nativité et je présume que je ne risque de revenir à l'Olympe. C'est pour cela que je te propose de voyager en ma compagnie, cependant je ne peux t'assurer qu'on ne rencontrera d'imprévus au cours d'un passage dans la demeure.
Naranwe l'observa, attendit une réponse de sa part. Le jeune dieu baissa les yeux, ne pouvant prononcer une affirmation. Ce fut la première fois que l'àlfar se confia à propos de son passé dès lors de son altércation si subite dans le cellier, suite à l'assaut des kobalos. Il eut le souvenir d'un compagnon distant et froid, de celui qui paraissait indisposé à vouloir apporter une quelconque connivence. Il pensa alors au discours prononcé par son paternel à propos de l'accueillir dignement, d'une certaine reconnaissance qui semblait quelconque de l'élémentaire de glace ayant retrouvé son âme. Il se sentit confus dans ses impressions et davantage dans ses jugements. Il prit toutefois sa décision.
- J'accepte ta demande ainsi que de connaître ton ascendance, dit Argos. Tu m'as soustrait d'innombrables fois à des créatures monstrueuses, tu peux par conséquent considérer cela comme un dédommagement.
- Je te ferais donc part de la conjoncture du départ, dit Naranwe. Cet imprévu qu'est la découverte de ces élémentaux me fait prendre conscience que les créatures les plus dangereuses possédaient la plupart du temps un acte d'abnégation.
Naranwe tourna légèrement la tête puis reporta son attention vers son compagnon de voyage. Il lui informa que son paternel était dans sa bibliothèque, le conseillant de lui rendre visite. Argos ne fut guère surpris par cette information car les àlfars ayant une ouïe très fine, pouvaient percevoir le moindre bruit provenant d'une pièce ou d'un lieu éloigné. Il le laissa dans le hall, montant les escaliers menant à son appartement mise à sa disposition. Quand au jeune dieu, il sentit l'angoisse l'envahir. Il décida d'avancer vers les escaliers et lorsqu'il fut sur le palier, il marcha en direction de la porte de la bibliothèque entrouverte. Il hésita à franchir le seuil lorsqu'il reconnut une voix féminine, celle d Artémis. Il fit irruption dans la pièce, voyant la déesse de la chasse qui tourna la tête en le voyant. Elle adressa un sourire de soulagement, s'approcha de son demi-frère, lui fit une accolade de bienvenue et s'éloigna. Elle sortit de la bibliothèque en le laissant en compagnie de leur paternel qui l'interpella.
Il traversa la pièce de taille moyenne, contourna les tables disposées à l'horizontale. Elle était illuminée par les chandeliers accrochés entre les étagères contenant des ouvrages, disposées contre le mur. Il aperçut Zéus debout devant une grande fenêtre dépourvue de draperie. Il s'arrêta devant le dieu, s' attendant à recevoir des remontrances.
- Je ne doute guère que tu es conscient de la gravité de tes actes, bien que Naranwe t'ais prévenu au sujet de la pierre, dit Zéus en maîtrisant le ton de sa voix. Je te rappelle qu'il est ton compagnon de voyage malgré le fait que vous ayez quelques différents.
Argos baissa les yeux à ces mots. Il reconnut qu'il a été insouciant en dissimulant la découverte du Cor Luminis. Il se souvint des renseignements de l'àlfar à ce sujet qu'il n'avait jugé d'en tenir compte, provoquant sa disparition dans un autre univers.
-Il a été désigné car il a une bonne expérience des corps pouvant être malveillants, dit-il. Tu as failli ne revenir de cet endroit.
- Je reconnais que ses intentions ne semblent être décentes, dit Argos. Malgré cela, il demeure un àlfar altier et froid.
-Il est vrai que Naranwe est de nature indifférente, dit Zéus. Promets-moi que tu seras prudent dans les jours à venir.
Argos leva les yeux en le voyant poser une main rassurante sur son épaule. Il pensa toutefois à cet engagement conféré à l'àlfar.
-Je vous le promets, dit Argos.
Son paternel lui fit une accolade, rapprochant le visage de son fils sur son torse. Il recula de quelques pas, l'informa que son appartement détruit avait été restructué en son absence, qu' un plateau l'attendait, posé sur sa table de chevet. Il lui souhaita bonne nuit, son regard se posa sur la cape d'Argos qui s'avança en direction de la porte de la bibliothèque.
Le jeune dieu retourna vers son appartement et entra. Il aperçut que la pièce a effectivement été rehabilitée, identique à celle d'origine avant qu'elle ne soit pulvérisée. Il décida en premier lieu de se laver, un bienfait qu'il n'avait ressenti depuis deux journées, nettoyant sa peau maculée de suie. Il se sécha, se vêtit d'un khiton plié sur l'alcôve. Il prit le plateau de la table de chevet chargé de mets. Lorsqu'il eut finit son repas, il souffla les flammes des chandeliers puis s'avança vers son lit à baldaquin. Il s'allongea, prit sa couverture, pouvant reposer ses membres. Il ferma les yeux, souhaitant malgré lui que cette quête ne fut qu'un songe.
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