Taishō, 12 ; Mois des lettres ; Jour du métal, 10 :
J’ai appris tant de choses ! Cela fait deux jours que je suis arrivée, je ne suis pas encore partie en expédition, mais je n’ai pas manqué d’occupations pour autant. J’espère que je vais retenir tout ce qu’on m’a dit, car en voyant l’expression de l’assistant qui m’expliquait le fonctionnement de la bibliothèque chaque information paraissait vitale.
Mais j’y pense, tu n’as même pas eu droit aux bases, Mitsu ! J’étais tellement enthousiaste la dernière fois que j’ai écrit que j’en ai oublié de te raconter ce qui était évident pour moi. Permets-moi de remédier à cela tout de suite.
Premièrement, la bibliothèque est un lieu destiné à protéger la littérature. Les alchimistes qui l’ont créée se sont donné pour vocation de lutter contre les impuretés, des créatures qui contaminent les livres. Elles sont les ennemies de tout texte écrit, et cherchent à les détruire en les corrompant. Pour le faire elles procèdent toujours de la même façon, ce qui ne nous facilite pas forcément la tâche. Elles ciblent un auteur et s’introduisent dans l’un de ses livres pour l’altérer. L’esprit de celui-ci s’y retrouve piégé, et il faut alors agir au plus vite. Les impuretés essayent de modifier le cours de l’histoire, et si elles y parviennent l’œuvre ainsi que son créateur son détruits. Le moyen de les contrer est donc de s’assurer que l’intrigue se déroule et surtout se termine comme elle a été écrite.
Et c’est là que ça devient intéressant. Car pour combattre nos ennemis, il faut s’infiltrer à notre tour dans le monde du récit. Des équipes d’auteurs, généralement secondés par un alchimiste, se chargent de cette partie et vont chercher leur camarade et éliminer les menaces. Il paraît que chaque mission est différente, puisqu’aucun livre n’est identique, et je suis impatiente de parcourir tous ces univers ! Même si ça veut dire qu’un auteur est en danger à ce moment-là… Est-ce que c’est égoïste de ma part ?
Il existe quatre catégories d’armes : les lames, les arcs, les fouets, et les pistolets. La première est la plus répandue, je crois, et elle contient aussi bien des épées que des couteaux à lancer ou même des faux ! C’est celle des auteurs de romans et de nouvelles. Les arcs représentent la littérature naturaliste, les fouets sont pour la littérature populaire, et les pistolets représentent soit la poésie soit la littérature pour enfants.
Avec toutes ces données, j’espère ne pas en avoir laissées pour compte. Heureusement que je tiens ce journal, ça me permettra toujours de m’y référer en cas d’incertitude. Et je noterai aussi tout ce que j’apprendrai ultérieurement !
Je n’ai pas eu l’occasion de croiser beaucoup d’auteurs, mais j’ai quand même revu Odasaku. Il était avec Ango, un de ses amis, qui s’affairait en cuisine. Apparemment, c’est l’un de ses passe-temps, et il est variablement doué. Disons que les plats qu’il réalise ont soit un goût divin, soit l’inverse absolu ; d’autant qu’il aime tenter de nouvelles expériences. Et quand on sait que sa spécialité s’appelle le « Pot-au-feu de la déchéance » … C’était d’ailleurs le plat qu’il préparait, et il m’a permis de goûter pour célébrer mon arrivée ici. J’ai risqué le tout pour le tout sous le regard amusé d’Odasaku… et j’ai eu de la chance. C’était vraiment excellent !
Quand je me suis présentée, Ango a dit que mon nom, Hiraizumi, était bien trop long, et a proposé de m’appeler Izumi. Je sens que cette histoire de surnom va me suivre…
Même si les alchimistes manquent de personnel ils ne négligent pas ma formation et ne m’enverront pas en mission avant quelques jours. En attendant, j’ai l’intention d’explorer la bibliothèque !
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