Aujourd’hui, j’ai rencontré deux nouveaux auteurs.

J’étais sortie dans le parc de la bibliothèque, que je n’ai pas encore entièrement exploré tant il est grand. Je suis sûre que ça t’impressionnerait, Mitsu, autant que moi quand je l’ai vu la première fois, il comporte deux grandes parties, un jardin pour la promenade et un gigantesque potager qui tiendrait plus du terrain agricole. Il paraît que sa création est liée à une anecdote assez amusante. En fait, les auteurs s’ennuyaient pendant leur temps en dehors des missions, et ils ont réclamé aux alchimistes de quoi s’occuper. Mais alors que tous cherchaient une solution, Mushanokōji s’est imposé et a clamé que l’agriculture était le meilleur moyen de combler le temps des écrivains tout en faisant collaborer leurs efforts à un projet vraiment utile. Et alors que tout le monde désapprouvait à chacun de ses arguments, il a fini on ne sait comment par l’emporter et les alchimistes ont créé cet endroit. Nos célébrités se sont donc retrouvées à devoir travailler la terre à leur plus grand désarroi, d’autant que l’instigateur du projet s’est plus investi en discours humanistes qu’en donnant de sa personne. Mais ces champs n’étaient pas une mauvaise idée. Finalement, les auteurs ne sont tout de même pas mécontents, même si certains s’y rendent moins que d’autres.

J’ai hâte de rencontrer Musha, comme on le nomme, il a l’air d’avoir un sacré caractère et ça pourrait être amusant.

À ce propos, il y a aussi un troisième espace végétal, mais il est de l’autre côté de la bibliothèque, et c’est plus un jardin intérieur. Mais je t’en parlerai une autre fois…

Donc, je reviens à mon histoire. J’étais à la limite entre les deux parcs, là où commence le sentier qui mène aux plantations. J’ai remarqué deux personnages qui paraissaient s’occuper d’un petit terrain à l’ombre et discutaient tranquillement. Je me suis approchée, curieuse, pour leur demander ce qu’ils plantaient. Le premier était en train de tasser de la terre autour d’une pousse de bambou avec application. J’ai cru que c’était un enfant, au début, il paraissait très jeune et timide avec ses cheveux clairs et ses yeux bleus. À côté de lui se tenait son ami, que j’ai directement associé au doré, avec les teintes de ses yeux ambrés et des reflets des ses cheveux aux touches de couleur sur ses vêtements, et sa personnalité amicale et chaleureuse qui se lisait au premier abord. En discutant avec lui, cette première intuition s’est confirmée, c’est le genre de personne auprès desquelles on se sent immédiatement bien et qui donnent naturellement confiance en nous. Il m’a expliqué que son camarade et lui aimaient bien les bambous et avaient décidé d’en planter quelques-uns ensemble, dans ce carré de terre. Celui qui m’avait paru plus réservé, Hagiwara Sakutarō, que tout le monde appelle Saku, avait toujours rêvé de faire un projet commun de ce type avec son compagnon d’écriture. Ce dernier, Murō Saisei, qu’on surnomme Sai, est son plus proche ami. Ils ont été élèves ensemble, et écrivent tous les deux de la poésie. Ils forment un duo attachant, Sai est comme un grand frère pour Saku qui semble se réfugier auprès de lui et lui voue une admiration sans bornes. En un sens, c’est compréhensible, Sai a beau être le plus jeune il possède une bienveillance accueillante et pleine d’assurance. Il paraît qu’ils sont très doués, ils ne me l’ont pas dit eux-mêmes mais c’est Shūsei qui m’a parlé de leurs œuvres après. Nous avons discuté un moment, à propos de nos plantes préférées, et pour finir ils m’ont proposé de faire une mission ensemble quand nous en aurons l’occasion.