Un panneau illisible indique à ceux qui savent déjà où ils sont qu'ils se trouvent bien là où ils pensaient être. À la sortie de la spatioroute, ils garent leur coquille de noix et rejoignent le lieu du rendez-vous tant teasé. Ne prêtez pas attention aux éclaboussures de vomi ; merci.

— J'4i pa5 tr0uvé l'holodat3ur.

— Tant pis. L'amende sera pour la vieille.

Milo se flétrit, d'une parce que ses fluides se sont fait la malle, de deux par sympathie pour la vieille karaïkidoka.

— Te fais pas de mouron, Milo. Ça vaut pas une cacahuète les amendes, ici.

Accaparé par sa culpabilité, il ne voit pas l'arbrificiel qui fait exprès de dépasser juste assez pour le calotter. Le souffrant se frotte le front, et remarque des sacs de noisettes au pied de l'assaillant, dans lesquels Bardan pioche allègrement.

— Hé ! C'est pas gentil ! Ça appartient sûrement à quelqu'un !

Pour toute réponse, le colosse lui châtaigne le bleu.

— Oui, ça appartient aux écureuils, du gland. Et je m'en cogne le coing.

Milo s'énerve ou hyperventile, difficile à dire, et plutôt que de ronger son frein, lève ses petits bras comme pour coller un marron à ce corsaire à la noix qui les lui casse. Les noix, donc.

— Stop vous chercher des noises, tous les deux.

Il a de toute façon déjà baissé les poings quand il s'est souvenu, preuve visuelle à l'appui, qu'il ne dépasse pas le nombril autour duquel tourne sûrement le monde selon les lois de la gravitation. Même l'écureuil qui passe semble attirée par le corps massif du barbare.

Notre petit héros marque un temps d'arrêt. Ce rongeur en mini-jupe transparente, au parfum enivrant, rouge à lèvres fluochsia et lourd mascara gigolindigo, les longe d'une démarche féline et... aguicheuse ?

— Qui a déguisé ce pauvre écureuil en prosti...

— Dis pas ça, malheureux ! C'est insultant !

— F4ut dir3 « pér1patétipute ».

— Ah... Ah bon ?

— T'es tellement spéciste, au fait.

— Hein ? Pourquoi ?

— Présupposer que tous les écureuils sont des péripatétiputes, franchement... Bon, il se trouve que celui-là l'est, mais quand même.

Une migraine point, mais Milo persévère à travers son amer calvaire crânio-bulbaire.

— T'as une tache... lui signale la grosse voix derrière le gros doigt du gros Bardan qui le désigne tout entier avant de lui planter une grosse pichenette sur le nez. Pistache ! Ta grand-mère a des moustaches.

— Oui ? s'enquit Pistache, l'écureuil qui travaille. Oui... elle en a besoin pour voir... C'est à quel sujet ?

Bardan rougit, ce qui surprend même Spara.

— Mais ! Le baraque de Bardan serait-y pas un peu cucul la praline sur les bords ?

Le sol tremble, tant Bardan serre les dents. L'équipe se presse dans l'entrepôt d'Okazions de Katrième Cinkième Main, où se présente un agent qui ne semble pas du tout travailler pour quelque chose d'aussi roturier que le marché des pièces usagées.

— Ravis de vous rencontrer, mielle Spara, la main tendue vers le costardé tiré à quatre épingles du jeu.

— Hm-hm. Indifférent. Dépêchez-vous, mon temps vaut beaucoup d'argent.

Milo se fend d'un large sourire. Les coups et blessures ont-ils tracés leurs fissures jusque dans sa hure ? L'agent serre son cravapillon et lui jette un regard importuné :

— Pourquoi cette tête d'attardé ?

Mais Milo n'en est que plus extasié :

— Vous êtes un cliché vivant, c'est incroyable !

L'agent renifle.

— Eeeet ceci va rendre ce que je m'apprête à faire bien plus satisfaisant.

À son claquement de doigts, une cage choit du toit et emprisonne l'équipe de choc dans sa poigne de fer et de somnifère.

Ils ferment les yeux, et...