Une fois assuré que son lui du passé est sauvé, Milo s'engouffre à son tour dans l'hôtel... et ressort par les poubelles d'un vaisseau.

— Tu as vu ça, mon booon Milo-bulot ? Je suis un génie littéraire ! Personne n'avait jamais pensé à rejoindre la fin par le début ! C'est une sorte de... de récirculaire !

Il se tapote le dos et s'éclipse aussitôt.

— D'a... d'accord.

— CORDUVAC ! T'étais caché où exactement ?

Milo déglutit. Qu'a-t-il encore fait ? S'il vous plaît, pas taper !

Ruleck affiche une moue déçue. Le reste de l'équipage aussi, certainement, mais difficile à dire quand ils sont tous écroulés sur le plancher. Notre gavanturier examine la salle et s'étonne de ne point reconnaître le poste de pilotage, qui a bougrement rétréci. Mais c'est peut-être la présence de toute la ménagerie qui lui faire dire ceci. Chrotais et ses amies se sont serrées entre deux canapés, Barbe-à-Rat joue aux dés avec les lémuriens, quelques requins louvoient dans le réservoir sous ses pieds et d'autres étrangetés qu'il n'a pas le loisir de remarquer.

— Mais... Le vaisseau... il a changé, on dirait.

— Ah ! Remue pas le couteau dans la truite !

Il écarquille ses yeux paumés.

— Mais... Qu'est-ce que j'ai manqué ?

— Fais pas le malin ! Le jour où on déménage, tu disparais ! Espèce de glande-rien !

Même Cicéron, l'interface 8-Millenium soudée sur la tête, a l'air éreinté.

— J3 sa1s que 7u 4s de5 pr0blèmes 4u cervel3t (3t auss1 5ur l3s côté5), al0rs j3 v4is t'expl1quer : 4vec 1'argent d3 la li5te 0n a ach3té un v4isseau, tu t'3n souv1ens ?

Absolument pas. Mais est-ce la faute de sa mémoire ou de ses absences imposées ? Et surtout, qui le croirait ?

— Euuh... D'accord.

La voix aiguisé de Spara tranche l'air.

— Et on avait dit qu'on déménageait aujourd'hui ! Je veux bien croire à ton mystérieux handicap portuaire ou je sais pas quoi, mais par moments ça m'a l'air très propice à la rien-faisance !

— Et il se ramène pile pour les réjouissances, comme une fleur bleue !

— Mais... Je vous jure que...

— Bon allez, coupe Louboutou d'un ton qui refuse la négociation. Le Cargonef 221B est mort, longue vie au Bernard Lavilliers 2.

Son air et sa télécommande austères inquiètent le mésaventureux Milo.

— Mais... Vous n'allez pas...?

— Et comment on brouille les pistes, autrement ? Allez Loubou, c'est parti !

Un doigt s'écrase au ralenti sur le bouton de destruction tandis que tout l'équipage, faune diverse incluse, file dans les sièges attacher sa ceinture de sécurité. Et alors une

         DÉFLAGRATION

(silencieuse, puisque le son ne se propage pas très bien sans air, ce cancre)

                                 dévore le vide spatial. Ses langues de feu lèchent le Bernard Lavilliers 2 qui grille un peu, mais déploie sa voilure et s'échappe à toute allure de la morsure des brûlures vers de futures aventures.

DANS LE PROCHAIN ÉPISODE :

EXPLOSION

FONDU ENCHAÎNÉ

EXPLOSIONS

NARRATION INSPIRANTE

EXPLOSION FOIS CINQ

Des gouttes de sueur rincent le front bardanien et s'échouent sur sa victimorée préférée.

EXPLOSION AU CUBE

MONTAGE ACCÉLÉRÉ DE DÉCENNIES D'HILARITÉ

EXPLOSIONS x1000

Milo parvient à se faire pousser un duvet de moustache. Est-ce un clone ? Est-ce qu'il attaque ?

SUPERNOVA

L'Architexte assemble un tribunal pour décider si, oui ou non, Milo est un gros con.

— Eh, mais ça me dit quelque chose, ça !

— Chhhhh !

UN MILLION DE BIG BANGS SIMULTANÉS

Fondu enchaîné sur Spara. Ton grave, elle fixe la caméra : « Faisons la guerre pacifiquement ».

MONSTRE EN SPAGHETTI VOLANT

« Ça n'a pas marché ! »

FAILLE SPATIO-TEMPORELLE

« Je commence à choper le coup de main », dit Milo avant son accident mortel.

CRASH

Zoom sur une bouillie couleur chair. Violons tristes et trois notes de piano.

Jump cut sur le spray anti-portes et son regard COUPABLE

Transition. Épitaphe de Milo : « J'avais dit pas aujourd'hui, je suis très occupé. »

Spara accroche un insigne sur le torse d'un Milo jeunot confus. Rires du public.

Fondu vers le noir.

Crédits :

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

Architexte

— C'est vraaaiment dommage que le producteur de l'univers ait annulé la sériiie.

— Quelle... Quelle série ?

— Mais enfin ! La tieeenne, évidemmeeent !

— Je suis une... série ?

— Mon paauuvre petit... Viens par ici, tu n'as encore rieeen compris.

Ici s'achève notre témoignage scrupuleux, car qu'ajouter une fois les zones d'ombre éclaircies ? Une fois la lumière faite sur des événements jadis sans queue ni tête ? Quand tout a trouvé réponse et que nous avons dénoué les nœuds du fil rouge ?

C'est bien là le problème des mystères : dès lors qu'on atteint leur terme, tout devient limpide, et ne reste qu'à refermer l'ouvrage.

Quittons donc Milo et les secrets mis à nu de Nulle-Partout, ce monde désormais aussi banal que celui qui vous a vu naître. Quittons-le et n'y songeons plus, car sa monotonie déjà nous ennuie, nous alanguit, nous assoupit.