8. Le Mur
Mathilde s’inquiéta rapidement face à ces étrangetés. Elle observait Arthur avec une attention de plus en plus soucieuse, sentait que le fossé entre eux s’élargissait tel un fossé qu’elle ne savait comment combler. Elle s’efforçait de comprendre, mais plus elle cherchait à percer ce mystère, plus celui-ci s’épaississait.
- Tu ne vas pas bien, tu devrais aller chez un médecin, dit-elle un soir, alors qu’elle débarrassait la table.
Sa voix était douce, mais teintée d’une anxiétépalpable. Elle espérait que cette proposition le ferait réagir, briserait la coquille dans laquelle il s’était replié. Arthur se contenta de hausser les épaules, un geste léger et presque mécanique, comme pour masquer la véritable angoisse qui se nouait dans sa poitrine.
Comment lui expliquer que ce simple mot, « médecin », lui faisait plus mal que n’importe quelle douleur physique ? Chaque fois qu’il tentait de le prononcer, sa gorge se contractait violemment. « Médecin », considéré comme une solution, une porte vers un soulagement, s’était transformé en un tourment insurmontable.
Arthur baissa les yeux, évitant Mathilde. Il avait peur qu’elle perçoive ce vide qui grandissait en lui, cet abîme où les mots se perdaient sans espoir de retour. À cet instant, il sentit à quel point la carence de ce mot – et tant d’autres – le séparait non seulement de lui-même, mais aussi de ceux qu’il aime.
Annotations
Versions