Chapitre 01
Lève-toi,allez! Ouvre les yeux. Purée tu peux le faire c’est la même journée qui t’attend et le même boulot. Il n’y a pas mort d’homme non? mmh,si seulement...
Mon réveil sonna à nouveau, il était 4h45.
Il faisait encore nuit, le soleil n’était pas encore levé, qu’il fallait déjà y aller, quitter ce refuge. Le dos en compote, je pris mon sac et mes clefs: direction le centre.
En sortant de la maison, l’air frais me réveilla en douceur. Ici les rues étaient clean, sans mégots ni crottes de chien qui traînaient par terre. Vu l’heure matinale, il y avait peu de monde sur mon trajet. Les centres alimentaires, éducatifs n’étaient pas encore ouverts pour accueillir les humains de Phaidra, la Cité Éclairée.
Heureusement, il y avait ce barista IOTA qui était toujours ouvert sur mon trajet. Il y en avait douze dans chacune des villes, également douze centres alimentaires, douze centres hospitaliers. À croire que ce nombre était sacré pour les dieux.
D’ailleurs, à Phaidra, tout était parfaitement orchestré, chaque note était jouée à la perfection par chaque citoyen. Chaque personne était à sa place et faisait son travail comme il se doit. Comme ici dans ce coffee shop, où Joe, un humain, m’accueillit avec son regard laiteux et ce sourire qui me semblait faux, factice:
- Bienvenue, au Barista IOTA, que puis-je faire pour vous? À croire qu’il était programmé à dire ce genre de truc.
- Mmh, un chocolat chaud avec un pain au chocolat s’il vous plaît.
J’avais tellement faim, mais tellement. J'espérais qu'avec cette dose de cacao je pourrais tromper temporairement cet appétit. Mais elle n’était pas normale, aucune nourriture ici ne pouvait la combler, l’apaiser véritablement, même pas ce serveur, cet humain. Il n’avait plus rien en lui qui pourrait m’apaiser. Son regard était maintenant trop pur pour percevoir une nuance d’ombre en lui. Et j’avais participé à cette transformation. Perdue dans mes pensées, Joe les interrompit:
- Tenez mademoiselle!
- Merci.
- Le barista IOTA vous souhaite une bonne journée, à bientôt!, dit-il en gardant ce sourire qui me fit toujours froid dans le dos. Je m’y habituerais jamais.
En sortant, je croisai, Eva, qui se dirigeait comme moi vers le centre.
- Un petit creux?
- Toujours le matin! Mais ça va me calmer un peu .
- Tu verras ça passera dans pas longtemps. On devrait même avoir des catégories trois normalement aujourd’hui.
Elle était comme moi, une demi-déesse. Nous nous sommes rencontrés lors de notre convocation avec Zeus. Depuis que Gaïa, notre mère à tous, agonisait suite aux méfaits, aux désirs de conquêtes, de ces guerres, et de l'égoïsme de l’homme. Zeus avait convoqué plusieurs fois les dieux de l’Olympe pour prendre plusieurs décisions face à cela. C’était lors de notre première convocation, qu’il avait annoncé ses directives, à nous, les demi-dieux. C’était la première fois que je mettais les pieds sur le mont je me sentais si petite face à cette architecture et si terne face à cette lumière divine qui les entourait. Et c’est là que je l’avais vu, Eva. À travers son regard, je voyais qu’elle ressentait la même chose que moi. Et pourtant elle ne montrait pas son intimidation, elle était émerveillée par eux, par ces dieux, nos parents. Ce fut ma première amie demi-déesse.
- Encore en train de rêvasser? me taquina Eva, arrivée devant le centre d'absorption.
- Je repensais à notre convocation à l’Olympe. Ceux que nous sommes devenus pour vouloir atteindre l’objectif que Zeus nous ait proposé.
- Nous les sauvons, Liv. Zeus aurait pu faire pire et les tuer. Il a été clément face à ce qu’ils ont fait à notre mère à tous, Gaïa.
- Tu as peut-être raison mais je ne sais pas je sens qu’il y avait une meilleure solution à prendre, j’ai l’impression qu’on fait quelque chose de véritablement mal en le faisant passer pour du bien.
- Tu te prends trop la tête, allez viens notre patient est arrivé!
En rentrant dans le centre, personne à l’accueil ni dans le couloir, il faisait toujours nuit. On se dépêchait de mettre nos tenues de service et se dirigeait vers la salle de soin où on retrouva l’équipe de nuit. Durant les transmissions, j’apprenais qu’effectivement un humain catégorie trois avait été recueilli.
Dès que l’équipe de nuit partit, Eva et moi nous nous rendîmes vers la cellule de soin du patient. Il s’agissait d’un homme d’une quarantaine d'années qui était chef d’une entreprise de parfumerie. Sa boîte avait payé pour passer outre les réglementations. Elle avait donc rejeté pas mal d'agents toxiques dans les fleuves et avait eu un impact néfaste sur le reste du quartier autour d’elle. Les plantes ne poussaient plus autour, la terre était devenue aride, souffrante. Plus aucun animal ne venait se réfugier là-bas
En ouvrant la porte, je le vis attaché, paniqué à se demander ce qu’on va faire de lui.
- Bonjour, je suis Liv et voici Eva. Savez-vous où vous êtes?
- Non mais pourquoi je suis ici, et pourquoi je suis attaché ? Et que me voulez-vous? Rétorqua-t-il affolé.
- Vous vous trouvez dans un centre d'absorption. Ne vous inquiétez pas, ça va bien se passer. Vous allez vous sentir mieux et plus apaisé après. Liv, le premier est pour toi.
Plus je m'approchais de lui, plus mon appétit grandissait. Cette capacité que Zeus nous avait donné pour nettoyer la Terre n’était pas anodine. Elle permettait certes de sentir l’ombre présent chez les humains mais pas que. Tel un prédateur je m’approchais de lui, il était devenu ma proie, mon véritable repas. Il sentit cette tension, et recula au maximum de son siège malgré les attaches à ses poignets. Je posai mon front sur le sien et j’aspirai l’ombre. Il avait un goût aussi sucré et doux que le miel, mes papilles et mes sens étaient en éveil, j’avais l’impression que tout m’était possible. J’étais à cet instant devenue, ce que Zeus avait fait de moi, une mangeuse d’ombre. Cette attirance et cet appétit étaient enfin apaisés. A la dernière nuance d’ombre en lui, son regard était devenu aussi blanc que le lait. Il me souriait aussi froidement que le serveur de ce matin. Il était enfin connecté à lui.
- Comment vous sentez-vous?
- Bien, aujourd’hui je vais labourer la Terre pour que notre mère à tous, se porte mieux.
Ce changement d’attitude après le baiser me surprendra toujours, dire qu’il était avant chef d’entreprise. Je me demandais toujours si cette méthode n'était pas une solution drastique malgré la “clémence de Zeus”.
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