— Kira ! tambourinait quelqu’un contre la porte en bois de sa chambre. Kira ouvre !

— Quoi, grogna-t-elle en réponse.

— Tu n’as pas entendu l’alerte ?

— Quoi ? Encore ? Ils sont de plus en plus paranoïaque, maugréait la brune en s’extrayant de ses draps rêches.

Elle enfila rapidement son plastron et ses bottes avant d’ouvrir en grand sa porte. Derrière se trouvait Gavin entièrement en armure - ce qui arrivait rarement lors de leur ronde - la lame au claire.

— Tu n’es pas en armure ? demanda-t-il en la regardant de haute en bas.

— Je croyais que tu étais pressé.

— Oui, mais nous allons voir les Sharaka.

— Ah. Tu pouvais pas le dire plus tôt ! s’exclama la jeune femme en claquant la porte.

Rassemblant toutes ses pièces d’armure, elle entreprit de les enfiler le plus rapidement possible. Que voulaient-ils ? Et si ils savaient qu’elle avait aidé les Zaléniens à récupérer la princesse ? Non, sinon elle aurait été la seule à être convoqué. Apparemment, ils voulaient voir les chevaliers qui gardaient le château.

Ressortant, Kira suivit l’homme dans le dédale de couloir jusqu’à la grande cour de la forteresse qu’elle connaissait maintenant comme sa poche. Tout le monde courrait dans tous les sens tandis que les triplets regardaient du haut des marches de l’entrée. Le vieux chevalier, qui s’était remis de son infection, était déjà là.

Les deux nouveaux venus s’inclinèrent bien bas et attendirent les instructions.

— Vous, chevaliers qui protégeaient ce palais, commença celui de droite.

— Vous, qui avez échoué la nuit, cracha celui du milieu avec un regard noir.

Kira se demanda alors si ils n’allaient pas tout simplement les exécuter tout les trois, après tout, elle et les deux autres chevaliers n’avaient pas empêché l’entré des Zaléniens.

— Montrez nous ce dont vous êtes capables aujourd’hui, fini par dire celui de droite.

— Comment ça ? demanda le vieux.

— Un dragon approche, il ne figure pas sur les registres d’arrivée. Nous voulons que vous nous débarrassiez de l’intru.

Ceci expliquait donc la panique des gardes, ils ne savaient vraiment pas y faire avec les dragons.

— Et si le dragon est en fait l’un des notre ? demanda la jeune femme.

— Abattez -le quand même, ordonna celui du milieu.

Kira commençait à les cerner avec le temps, ils se positionnaient toujours dans le même ordre. Celui de gauche ne parlait jamais mais ses yeux terrifiants faisait de lui le plus dangereux des trois. Celui de droite, qui semblait le plus raisonnable, était en faite, froid et calculateur. Et enfin, celui du milieu, celui qui semblait diriger le trio, était colérique et la cruauté se lisait dans son regard noir comme ses cheveux.

Irtimir, Niamor et Maeko.

Ils hantaient la plupart de ses cauchemars, pourtant, eux seuls savaient ce qui était arrivé à sa famille.

Sortant de ses pensées, la brune se dirigea vers Maraxès qui l’attendait plus loin.

“Que se passe-t-il ?”

— Un dragon est en approche, répondit-elle en grimpant sur le reptile.

Elles décollèrent rapidement et se mirent à tourner autour des tours, essayant de repérer leur adversaire.

“A l’Ouest, c’est un dragon rouge. Kira ?”

— Je sais, cela pourrait être Ezékiel. J’espère que non car nous avons ordre de l’abattre, déclara Kira tandis que la dragonne s’élançait vers la cible.

La jeune femme voulait arriver avant ses collègues pour être sûr. Survolant An Wesiri, elle approchait du reptile qui n’avait pas encore dépassé la muraille extérieure. Sur son dos, la silhouette se tenait droit comme un i, aucun signe d’hostilité ne venait d’elle. Tandis que la brune se rapprochait, elle repéra alors que quelque chose claquait dans le vent près de sa tête. Un bandeau qui passait devant ses yeux. Ezékiel.

— C’est lui, Maraxès ! Fonce !

Le dragon rouge faisait maintenant du sur place, attendant que la dragonne violette le rejoigne.

Arrivé à son niveau, le garçon lui sourit avec confiance.

— Comment vas-tu Kira ?

— Alors tu as réussi ? Tu peux me voir ? demanda la jeune Wesi.

— Pas exactement, disons que je te sens. Après tout, je n’ai plus d’yeux.

— Tu dois t’en aller.

— Pourquoi ? Je viens juste d’arriver ! s’exclama-t-il indigné.

— Mes collègues arrivent.

— Je sais.

— Comment ? (elle secoua la tête) Non, ce n’est pas le moment, les Sharaka nous ont ordonnés d’abattre l’intru.

— Mais, je suis encore un Wesi à ce que je sache.

— Tu as disparu, qui sait ce qu’ils s’imaginent à ton sujet ?

— Je suis leur meilleur soldat, Kira. Ils m’ont entrainés depuis la mort de mes parents, ils ne peuvent pas m’abattre.

— Pour eux tu es aveugle, donc inutile.

— Je peux leur expliquer.

— Tu penses vraiment leur faire entendre raison ?! Ce sont les Sharaka, Ezékiel ! s’énerva Kira.

— Je sais, mais… je ne peux pas te laisser seule là bas.

— Je me suis bien débrouillé quand tu étais au front.

— Je…

— Ou quand tu étais à Zalia.

— Kira…

— Pars.

— Non. Ils vous ont ordonné de m’abattre, tu ne pourras pas rentrer sans moi. Je te suis jusqu’à eux.

— Tu es sûr de toi ?

L’aveugle plus si aveugle que ça acquiesça avec force et Kira fit demi-tour en faisant signe à Gavin qui était le plus proche. Ce dernier les rejoignit, l’épée au clair.

— Que fais-tu Kira ?!

— Je le connais, c’est un ami d’An Dragal, il a perdu la vue au front.

— Les ordres sont les ordres ! Nous devons l’abattre.

— Je l’amène aux Sharaka.

— Mais…

— Si tu tente quoi que ce soit, c’est toi que j’abats, menaça froidement la jeune femme.

— Elle en serait capable, ajouta Ezékiel avec un sourire.

La bouche à moitié ouverte dans une phrase avortée, l’homme regarda Kira et le nouveau venu s’éloigner vers les immenses tours sombres.