Chapitre 18 : Terre Noire

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Le bruit, les odeurs, tout avait un air de nouveauté lorsque Sévrar sortit de la tour des mages. A son cou pendait le collier qui faisait de lui un magicien à part entière. Il avait troqué sa tunique bleu foncé pour des habits bruns, plus discrets. Le sac qui battait contre son côté était rempli de parchemins vierges, d’encre et de livres. Tout ce qui pourrait lui servir dans sa recherche d’informations sur la prophétie dont il faisait partie.

Le jeune homme était soulagé de s’éloigner quelque temps de la capitale après la cérémonie d’investiture qui avait eu lieu plusieurs jours auparavant. Peu de personne ne lui avait adressé la parole depuis.

Il s’approchait de la porte sud de Liodas lorsqu’un bruit de cavale le fit se retourner.

— Sévrar !

— Zalénia ? Tu n’es pas censé sortir du palais !

— Je sais me défendre maintenant. Et puis, tu ne vas quand même pas traverser tout Zalia à pied ?

— Et bien, je n’ai pas assez d’argent pour m’acheter un cheval, donc si.

— N’importe quoi, tiens, prend le mien et surtout, n'oublie pas de revenir, que je puisse te montrer à quel point je suis devenue forte.

Le roux lui sourit et accepta volontier la monture. Il grimpa dessus avec difficulté, faisant rire la princesse, puis, après l’avoir salué, il sortit de la ville.

Il avait décidé de commencer ses recherches à Ors, la capitale de la Terre Noire. Ainsi, à cheval, il mettrait bien moins de temps pour arriver à destination.

§

Les forêts de la Terre Noire étaient fascinantes, toutes ses plantes luminescentes donnaient envie au jeune mage de s’arrêter tous les pas. Pourtant, il n’était pas là pour étudier la botanique, Sévrar devait rester concentré sur son but. La Prophétie ne cessait de se répéter dans sa tête.

« Ils seront six. Humains, elfes et demi-dieux. Des auras précieuse, d'Obsidienne, d'Or, d'Argent, de Diamant, de Rubis et d'Émeraude, à détenir le pouvoir des dieux fondateurs. Ensemble, ils deviendront sauveurs ou destructeurs. »

Cela était plutôt clair, les élus pourraient faire partie de la race des humains comme de la race des elfes. Mais il était aussi mentionné la race des demi-dieux. Ceux-ci étaient assez rares et la plupart du temps finissaient par vivre chez les dieux. Peut-être que les dieux gardaient un élu en sécurité chez eux ? Non, pour Sévrar, il fallait que tous soient dans ce monde car le dénouement pourrait arriver à n’importe quel moment.

Le magicien avait déjà connaissance de trois aura pouvant faire l’affaire. Lui-même, l’or, Zalénia, l’argent et Sheireen, l’obsidienne, dont lui avait parlé Rowenn. Pour le moment

seulement des Zaléniens.

— Sauveurs ou destructeurs, dit-il à voix haute.

Est-ce que une seule aura pouvait faire pencher la balance ou fallait-il que tous sombrent dans la destruction ? Et puis, de quoi devaient-ils sauver le monde ? Il apprendrait sûrement cela durant son voyage, après tout, il chevauchait car il ignorait beaucoup trop de choses.

Le bruits des sabots de son cheval heurtant de la pierre le tira de ses réflexions. Il avait atteint la route pavée qui menait à Ors.

Les arbres se firent alors moins nombreux, laissant la place à des rochers sombres. De plus en plus gros, ces derniers ne faisaient qu'annoncer les montagnes qui entouraient la ville. Une muraille naturelle que les humains ne s'étaient pas privés d’utiliser.

Sévrar avait beau le savoir, lorsqu’elles apparurent, il en eut le souffle coupé. Bien plus hautes que le mont Cetus que l’on pouvait apercevoir depuis Liodas, les cimes disparaissaient dans les nuages.

— Il va nous falloir des heures pour en faire le tour et arriver à l’entrée de la ville. J’espère que tu n’es pas trop fatigué, disait le roux à son cheval. J’aurais bien dit que je voudrais y être avant la nuit mais elle est permanente ici. Je me demande comment les gens font pour s’y retrouver.

La bête hennit en secouant la tête avec vigueur, comme pour dire qu’il n’en était rien. Elle tiendrait autant de temps qu’il le faudrait.

§

La lumière fut la première chose que Sévrar et son cheval virent de la ville. Elle se frayait un chemin entre les pointes rocailleuses qui redescendaient, laissant doucement place à une muraille faite de la main de l’homme. Toute aussi sombre, cette dernière s’élevait tout de même assez haut pour que l’elfe ne puisse distinguer aucune autre construction.

Ils finirent par atteindre les portes. La chaude lumière qui s’en échappait éclairait la route sur plusieurs mètres, invitant les voyageurs à venir se reposer après un rude voyage.

En s’approchant, le cavalier remarqua que deux soldats surveillaient l’entrée.

— Hé, voyageur ! le hella l’un d’eux.

— Bonjour, messieurs. Si nous sommes bien le jour, répondit Sévrar en ralentissant.

— Étranger à la Terre Noire, au-dessus de ce ciel d’encre, le soleil est au zénith.

— Cela pourrait expliquer ma faim, rigola le jeune homme. Y a-t-il des auberges libres derrière ces remparts ?

— Évidemment, Ors accueille tous les voyageurs, commença le garde de gauche.

— Sauf que nous sommes en guerre, il va donc falloir nous montrer la raison de ta venue, continua le soldat de droite.

Le jeune mage acquiesça avec un sourire. Il glissa la main sous sa tunique et sortit le pendentif qui faisait de lui un magicien de la Reine.

— Je viens étudier dans votre ville. J’ai entendu dire qu’elle renfermait de nombreux ouvrages qui pourraient m’aider dans mes recherches.

Les deux hommes inclinèrent la tête en guise de respect et l’un d’eux prit la parole :

— C’est une raison valable. Et plus que des ouvrages, nous avons Maîtresse Merla.

— Qui est-elle ?

— L’une des plus grandes magicienne de notre âge, si vous écoutez les dires des habitants de Ors, souriait le soldat.

— Eh bien, j’ai hâte de la rencontrer. Je suis sûr qu’elle pourra m’être d’une grande aide.

Les deux hommes le laissèrent donc passer.

La muraille était si épaisse que le garçon et son cheval marchèrent un long instant sous son couvert avant de découvrir enfin la ville.

Tout aussi sombres, les habitations avaient été directement creusées dans la roche pour celles proches de la montagne tandis que pour les autres, on avait taillé et déplacé les pierres. La rue principale semblait monter directement vers le palais. C’était de cette avenue que venait la majorité de la lumière, de sorte que si vous restiez en son sein, vous auriez l’impression qu’il faisait jour.

C’était jour de marché, Sévrar descendit donc de sa monture pour plonger dans la foule. Les bruits et les odeurs lui rappelèrent immédiatement Liodas, seul l’accent des gens différait. Plus musical, plus enjoué peut-être, il n’aurait su le dire.

Longeant les étals, l’elfe découvrit que certaines plantes luminescentes étaient vendues comme des fruits ou des légumes. S' il avait eu plus de temps, le roux se serait sûrement arrêté pour poser des questions aux maraîchers.

Il fallait avant tout qu’il trouve une auberge, avec une petite écurie pour son cheval. Pour cela, le magicien demanda son chemin à une jeune femme qui portait un panier de fruit étrange sur sa tête.

— Si vous avez de l’argent, il y a l’auberge de la porte. Sinon, vous devriez trouvez l’auberge aux tournesols un peu plus loin.

— Aux tournesols ?

— Oui, vous ne pouvez pas la louper, la propriétaire la peinte entièrement en jaune, ricanna-t-elle avant de continuer son chemin.

— Merci, lui lança Sévrar avant de murmurer pour lui-même. Des tournesols ? Sur la Terre Noire ? Ça n'a aucun sens.

Intrigué, il décida pourtant de s’y rendre. Effectivement, il n’eut pas à chercher longtemps. Entre deux maisons grises, elle était éclatante, peut-être même trop.

Une petite allée menait à une cour arrière, sûr d’y trouver une écurie, le rouquin s’avança avec sa monture. Ce qu'il y découvrit le surpris bien plus que la façade. Il y avait bien quelques chevaux qui grignotait du foin, mais il y avait aussi des tournesols un peu partout. Sur les rebords de fenêtre ou bien le sol, ils rayonnaient comme si un soleil d’été les éclairait.

— Etonnant n’est-ce pas ? disait une femme d’âge mur sur le pas de la porte arrière.

— Comment… ?

— Disons que je suis magicienne à mes heures perdues.

Le garçon, impressionné, sortit son médaillon et dit :

— Apprenez-moi.

— Déposes ton cheval et viens à l’intérieur. Nous en parlerons autour d’un repas chaud.

Il obéit, ne quittant pas du regard les fleurs de soleil.

Une fois à l’intérieur, la lumière jaune des plantes illuminait la salle comme une journée d’été. Il s’assit sur un des bancs en bois et observa brièvement la pièce en attendant que la dame revienne.

C’était une salle commune d’auberge plutôt normale, un feu brûlait dans l’âtre et de nombreux clients buvaient et se restauraient sur des tables en bois brut. Le plafond était étonnamment haut, mais ce n’était pas pour lui déplaire. L’odeur d’alcool bien plus que supportable. Il n’avait pas l’impression d’étouffer.

La femme revint rapidement avec une assiette de legumes et des saucisses. Il la remercia avec un sourire et elle lui demanda :

— Comment t’appelles-tu ? Tu me parais bien jeune pour être magicien.

— Sévrar, je le suis depuis peu.

— Et que viens-tu faire à Ors ?

— Je viens étudier. On m’a d’ailleurs conseillé de rencontrer une certaine Merla. Sauriez-vous où je peux la trouver ?

L’autre souriait avec bienveillance, le regardant dévorer son plat. Il croisa son regard et disait :

— C’est vous c’est ça ?

— Exactement. Comme quoi, le destin est de ton côté. Quel est le sujet de tes recherches ?

— Une prophétie qui pourrait se réaliser dans peu de temps.

Pensive, Merla passa sa main dans ses cheveux grisonnants.

— Si vous pouviez me donner accès à la bibliothèque de la ville…

— Plus que ça, je t’aiderais dans tes recherches. Si une prophétie va s’accomplir, nous avons peu de temps.

Sévrar acquiesça.

— Et par la même occasion, je t’expliquerais comment je fais pousser des tournesols sur la terre de la nuit, ajouta-t-elle avec un sourire.

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