Chapitre 20

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Deux semaines se sont écoulées depuis la soirée avec Evie et son pote, que j’avais laissé en plan sans venir saluer en partant.

Par moments, il m’arrive de repenser à ce gars, avec qui j’aurais pu avoir une aventure d’un soir. J’ignore si je le regretterais, mais lors de pics de stress dus à mon implication dans mon travail, je suis presque tentée de prendre contact avec lui pour décharger un peu la pression… J’aurais bien besoin de ne penser à rien d’autre qu’à l’étreinte passionnée dans laquelle je pourrais me perdre.

Mais je sais que cette sensation de liberté ne durerait pas, que mes obligations et mes contraintes reviendraient aussitôt. Et surtout, je suis consciente que coucher avec un gars ne règlerait pas le véritable problème, dans le fond. Cela ne me libèrerait pas de l’emprise que ces yeux noisette, qui ne me lâchent pas dans mes songes, ont sur moi.

Entre-temps, mes cours m’ont beaucoup accaparée et je n’ai pas eu le temps de faire d’autres sorties, depuis cette soirée-là.

Evie veut toujours m’aider à « trouver l’amour » malgré mes refus. Evidemment, je ne lui ai pas raconté toute l’histoire à propos de Julien. Je la connais, elle serait devenue hystérique et aurait immédiatement crié à la romance impossible entre des amants déchirés… Elle lit trop de romans à l’eau de rose ridicules, ça déteint à force sur sa personnalité. Je le lui ai déjà dit, mais elle ne m’entend pas.

Aujourd’hui, après les cours, je suis censée la rejoindre au "Prestige", où nous avons l’habitude de nous retrouver.

Je sors de la fac en fin d’après-midi et prends le bus pour me rendre jusqu’au bar, où je m’assis en terrasse en attendant l’arrivée d’Evie.

« Brr… Quel vent ! J’espère qu’elle va bientôt se pointer, sinon je vais ailleurs, il n’y a plus de place à l’intérieur… » songeai-je, frottant mes mains contre mes cuisses pour me réchauffer.

Je commandai un chocolat chaud, dans l’espoir de chasser le froid qui m’engourdissait déjà.

Par bonheur, mon amie ne tarda pas à apparaitre au coin de la rue. Je m’apprêtai à lui faire un signe lorsque je remarquai qu’elle n’était pas seule et stoppai mon geste.

Un grand jeune homme blond baraqué l’accompagnait.

Je me mordis la lèvre pour m’empêcher de me mettre à crier sur Evie quand elle s’assit en face de moi, tout sourire.

- Salut, Nat, s’écria-t-elle, je te présente Bruno ! Le bon, cette fois !

- Enchanté, Nat. Evie m’a beaucoup parlé de toi !

Le gars se pencha vers moi et je lui fis la bise, grommelant un vague « Salut » du bout des lèvres. Il s’assit à côté d’Evie, face à moi, et je remarquai ses yeux d’un bleu profond. Il ne devait pas faire plus de quinze degrés, mais il était vêtu d’un simple tee-shirt blanc, qui faisait ressortir les muscles saillants de ses épaules, de ses pectoraux, et laissait deviner ses abdos.

Je ne dis rien, mais lorgnai Evie d’un regard noir. Cette dernière me retourna une expression réjouie et un sourire d’autant plus fier.

- Alors, j’ai fait une erreur en voulant vous mettre en contact, mais c’est réparé, maintenant, dit-elle. Nat, comme tu ne voulais toujours pas de son numéro, j’ai décidé de prendre les devants et d’initier une rencontre entre vous. Ça ne te dérange pas, hein ?

Bruno haussa les sourcils et dit, l’air soudain embarrassé :

- Oh, tu… ne voulais pas me rencontrer ? J’espère que je ne…

- Non, ce n’est pas toi que je ne voulais pas rencontrer, m’empressai-je de rectifier, c’est juste que je ne veux pas être en…

- Nat a beaucoup de travail avec son Master en droit, me coupa précipitamment Evie, mais je la connais, au fond elle n’aspire qu’à la rencontre qui fera chavirer son petit cœur !

Je ne répliquai rien, agacée. Ce n’était pas la peine de commencer à se disputer devant Bruno et au milieu de la terrasse du bar.

- Bruno, que prends-tu ? Pour moi, ce sera un Virgin Mojito, s’il vous plait, indiqua Evie à la serveuse qui venait prendre leur commande.

- Eh bien, une bière, merci.

Je m’autorisai à détailler le jeune homme tandis qu’il regardait ailleurs. Il était très séduisant, il n’y avait pas de doute là-dessus. Ses épais sourcils blonds venaient approfondir son regard intense. Sa chevelure, coiffée en arrière, lui donnait des airs de Leonardo DiCaprio, ce qui ne manqua pas de me rappeler mon croquis d’enfant, lorsque je m’étais dessinée à Miami, entourée de célébrités, menant une grande carrière d’avocate.

Une barbe de quelques jours venait pigmenter ses joues, son menton et se rejoignait au-dessus de ses lèvres. Celles-ci étaient retroussées en un sourire en coin, qui m’aurait sans doute fait craquer étant ado.

Mais actuellement, je ne vois rien, dans ce type, qui pourrait me faire perdre la tête.

Bien entendu, il est physiquement parfait, mais c’est bien ça, le truc. Son corps de dieu, bien trop harmonieux, ne m’évoque rien de plus qu’un mannequin tout droit sorti d’une publicité pour un parfum de luxe.

Je ne dis pas que je ne ressentirais rien, si nous venions à nous rapprocher jusqu’à nous retrouver dans le même lit, mais ce n’est pas à un Appolon viril, inébranlable, infaillible, que j’aspire. Quelque part, sa perfection le rend lisse. Il plairait à n’importe quelle fille, j’en suis sûre, mais pour moi, cette beauté uniforme, évidente, m’apparait fade. Sans vouloir me montrer offensante. Il a l’air d’être un bon gars. Oui, je suis peut-être difficile, tout compte fait.

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