Chapitre 4

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La calèche filait vers le centre – le docteur avait décidé qu'il ne pouvait se permettre de perdre du temps – et je me demandais pourquoi je m'étais décidé si vite. La découverte de ces présences autour de moi m'avait profondément perturbé. Surtout, j'étais dérangé par le fait qu'il ne s’agissait pas réellement d'une découverte, justement. C'était comme si ces esprits m'avaient toujours accompagné, mais qu’ils ne s'étaient mis à me parler que maintenant, en présence du docteur. Je me demandai soudain quels démons l'accompagnaient, lui. À moins que ce ne soit lui qui les poursuivait ? Il avait dit que les fantômes ne venaient jamais pour lui… Je l’examinai à la dérobée : d'un calme absolu, il observait la route, guettant notre destination. Que s'attendait-il à y trouver ? Un golem ? Un authentique monstre d’argile commandé par la volonté d'un homme ?

- Vous êtes sceptique, n'est-ce pas ? Vous ne m'auriez pas suivi si vite, dans le cas contraire…

- Vous ne vous attendez pas réellement à rencontrer un golem ?

- Vous avez bien reçu la visite d'un fantôme et rencontré votre démon…

- Je me suis souvenu de ma mère et j'ai eu un accès de rage.

- Un souvenir bien réaliste, non ? Un accès de rage très soudain, n'est-ce pas ? Vous ne vous demandez pas pourquoi ? Pour quelle raison ces accès de rage et de nostalgie, à ce moment précis ?

- Je ne suis pas nostalgique !

J'avais répondu brusquement. Si brusquement que j’en avais presque sursauté moi-même. Alors je me tus, désemparé : était-ce bien moi qui avais parlé ? Je lui jetai un coup d'œil, que j'interrompis aussitôt : il me guettait, lui aussi, silencieux mais, de toute évidence, inquiet à mon sujet.

Il y eut un long moment de silence. Le docteur fixait à nouveau la route, et je sentais qu'il se préparait à ce qui allait suivre. Mais il ne m’avait pas oublié. De temps à autre, je captais du coin de l'œil un mouvement que je feignais de ne pas remarquer. Nous quittions les faubourgs. Les rues étaient plus larges, de nouveau pavées. La calèche s’arrêta dans une avenue un peu en retrait des boulevards. Un endroit calme, planté à distance régulière de grands arbres. À moitié masquées par les branches, au bout de jardinets qui leur donnaient de l’intimité, de hautes demeures bourgeoises reposaient. Sur la façade de celle qui nous faisait face, une seule fenêtre laissait sourdre une lumière jaune tamisée par de grands rideaux. J'aurais cru revenir dix ans en arrière, en visite chez des cousins.

Il y eut un cri, et le bruit de quelque chose qui se brise. Puis le calme à nouveau.

Le docteur entra.

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