CHAPITRE 37 - Un an déjà
Notre communauté avait repris son rythme, et les enfants les cours. Simon avait beaucoup d’avance sur le programme, largement plus d’une année. Il avait déjà bien entamé les cours de seconde, et progressait très vite. David et Anna suivaient les cours correspondants à leur niveau, ils faisaient des efforts qui étaient payants. Louisa avait, quant à elle, un peu de retard, elle progressait plus lentement. J’avais énormément de patience avec elle et n’hésitais pas à revenir plusieurs fois sur le même cours. Je poursuivais les lectures pendant la veillée au grand bonheur des petits et des grands. Julio avait terminé la construction de notre bibliothèque, elle était devenue bien fournie. Chacun pouvait y emprunter des livres, Michael et l’ermite le faisaient régulièrement.
Alfred avait mis le vin en bouteilles. Notre vin était un bon petit vin sans prétention, léger et fruité. Sa cave avait repris une belle allure, pour son plus grand plaisir. On s’était pas mal débrouillé pour des amateurs.
Diego poursuivait le braconnage, de temps à autre il attrapait un beau lièvre, il en était très fier.
Julio avait trouvé dans un village une lunette astronomique, il passait beaucoup de soirées avec Simon à scruter les étoiles.
Nous étions en novembre, cela faisait maintenant un an que notre famille avait migré à la montagne. Nous en avions fait des choses en un an. Nous nous étions initiés à un grand nombre de métiers différents : bûcheron, chasseur, pêcheur, braconnier, jardinier, éleveur, agriculteur, apiculteur, oléiculteur, vendangeur, meunier, viticulteur, bâtisseur, enseignant. Mais surtout voleur, nous étions passés maîtres dans l’art du pillage, contraints et forcés bien sûr, mais quand même cela restait du vol. J’avais un peu de mal avec cette idée, tout en sachant que c’était la clef de notre survie.
Toutes ces expériences nous avaient été profitables, elles avaient resserré nos liens et avaient permis à chacun de s’épanouir dans de nouveaux domaines.
Alfred s’était installé pour l’hiver à la ferme. Sa présence soulageait considérablement le travail d’Alberto et de Michael, et Alfred ressentait moins l’absence de son épouse.
L’ermite avait pris ses marques dans sa maisonnette, son chien aussi. Miguel veillait discrètement sur lui et sur son bien-être, la cohabitation se passait très bien. Nous espérions tous que cette demeure devienne définitivement la sienne et qu’il ne reparte pas vivre seul au printemps, mais cela ne dépendait que de lui.
Notre groupe se retrouvait tous les samedis et partageait le repas avec plaisir. Les produits agricoles et l’élevage avaient considérablement amélioré nos menus et leurs variétés.
Nous profitions de toutes occasions pour se réunir et passer de bons moments ensemble. Les fêtes annuelles et nos anniversaires, surtout ceux des enfants, étaient des moments forts au sein de notre communauté.
Il y a quelques jours, nous avons eu la visite des militaires. Ils étaient allés à la ville rencontrer leur supérieur, et prendre leurs ordres pour l’hiver. Sur le retour, ils avaient décidé de faire un détour par la ferme d’Alberto. La situation était identique et n’avait, pour ainsi dire, pas évoluée. Le pays était calme, le virus semblait avoir stoppé sa progression fulgurante, probablement grâce au petit nombre d’habitants restants. Les groupes épars dans le pays s’étaient organisés et avaient recréé des microsociétés autonomes. L’armée était toujours au pouvoir, avait remis en service les usines de distribution d’eau et avait toujours sous contrôle les raffineries, les centrales électriques et l’armement. Les militaires nous ont déposés pour les enfants quelques denrées : des bonbons, du chocolat et des biscuits. Nous leur avons raconté en détail la visite des bikers. Ils savaient qu’au travers du pays, il y avait des groupes itinérants comme eux, l’armée veillait à ce que chaque bande de voyageurs reste toujours pacifique. Avant leur départ, nous avons fixé notre prochaine rencontre qui aurait lieu dès la fin de l’hiver.
Alfredo voulait avant les premières neiges retourner à la ville. Il comptait trouver, dans un magasin spécialisé qu’il connaissait bien, du matériel pour sa ferme. Certaines pièces de son tracteur avaient besoin d’être renouvelées avant les labours de l’année suivante.
Alfred, Julio et Alberto partirent très tôt pour la ville. Comme la première fois, chaque membre de notre groupe avait noté ses besoins en divers produits. Les trois hommes firent rapidement les courses, d’abord en matériel agricole pour la ferme, puis dans les grandes surfaces spécialisées pour chacun. Simon avait demandé un nombre important de manuels scolaires et de livres scientifiques, moi-même j’avais noté des œuvres de littérature. Ils sont rentrés très tôt sans encombre avec tout le matériel et articles demandés, plus quelques surprises qu’ils avaient dénichées : des bijoux fantaisie et des perles à enfiler pour les filles, du matériel de cuisine supplémentaire, des chaussures, des couvertures, du matériel d’art plastique, et tous les livres demandés.
Nous étions prêts pour passer un nouvel hiver au gite.
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