Zig-zag
Un zig zag c’est un peu comme une ligne droite, qui ne serait pas droite.
Notre homme s’appelle Théodort, c’est un beau prénom pour un zig zagueur.
Hier encore, il dansait joyeusement devant la Lune bleutée.
“Quelle drôle de Lune celle-ci, c’est presque offensant de la voir ainsi ! Elle me nargue on dirait !”
Théodort connaissait un peu du langage des astres, parlait couramment celui des mathématiques, et un peu de latin pour faire plaisir à sa tante, la vieille Françoise.
Cette nuit, il entamait un brin de conversation pour calmer ses pensées :
“Madame, vous me regardez avec un peu de dédain je crois ? N’ai-je pas pourtant une belle chemise de lin sur mes épaules larges ? N’ai-je pas les cheveux au vent et le coeur battant ? Que faut-il à madame pour que ses regards s’attendrissent ?”. Et la Lune ne répondait pas.
“Vous savez madame, on me nomme Théodort l’étourdi, on dit que j’oublie tout de la vie, que je ne lace pas mes chaussures, que ma chemise est froissée, que j’ai de vieux souliers… madame, vous me trouveriez, vous aussi, comme un étourdi ?”. Et la Lune ne répondait pas.
“Assez de votre feinte arrogance, je vous connais mieux que vous ne pensez ! Je vous observe souvent depuis ma camisole épaisse de citoyen des villes, eh oui une camisole ! A-t’on idée de se retrouver entassés les uns au dessus des autres, je suis une barquette de fruit pour que l’on m'écrase ainsi ?”. Alors que Théodort divaguait, la Lune feignait de répondre :
“Monsieur Théodort, quel étrange hasard a voulu que je me prête à votre jeu, j’ai le coeur tendre, je vous réponds : vous êtes un sot, doublé d’un imbécile” et Théodort de pondre :
“Je ne vous crois pas !”
“Mais si, croyez-moi pourtant monsieur l’imbécile, vos allures ne trompent pas, et j’aurais moins d’années que je l’aurais vu quand même ! pas besoin d’avoir connu l’oiseau géant et le monstre marin, pour comprendre et trancher la vaine évidence : vous êtes un crétin !”
“Quoi ?! Théodort, le grand, le fidèle, l’enamouré...
“Le crétin !
“Le fier, le beau, l’architecte de ses désirs…
“Monsieur, votre miroir certainement se cache bien de vous dévoiler l’auguste vérité, crétin vous êtes, et le resterez”, et alors que la Lune piaillait Théodort de plus belle, il remarquait d’étranges bruissements près de l’arbre installé au bord de la forêt.
Théodort s’approche doucement, écoutant distraitement les nouvelles remontrances de son amie la Lune, quand soudain il découvre :
“Madame, sortez de votre cachette, vous n’êtes décidément pas la Lune, mais une mauvaise bête !
“Eh bien soit, je ne suis pas la Lune, et vous, vous n’êtes apparemment pas si étourdi.”
La Lune, comme vous l’avez compris, c’était une petite fille !
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