Tourbillon
Ils plongent, abouchés,
Remontent, essoufflés,
S’assemblent, s’associent,
S’enchâssent, s'oublient,
Luttent, en apnée, se débattent, enivrés.
Victimes vacillantes d’une trombe ardente,
S’affrontent avec bravoure, se défendent avec honneur,
À l’article de l’amour, ultime bonheur.
L’eau transie, apeurée, s’enfuit en remous,
Vole en éclats fous, engendré des ébats,
Vile folie des amants ahuris,
Décence tarie de corps meurtris,
Enchevêtrement dithyrambique,
Alchimique expérience, curieux alambic,
Dans l'abysse flotte, méduse bicéphale,
Un octopode, vibrant sous l'eau pâle.
Ils tanguent et chavirent,
Ivresse du navire,
Dans la tempête sans boussole,
D'un bassin entre deux sols ;
Balancent au gré des vagues,
Leur raison divague.
Ils mettent en jeu leurs âmes,
Algues hydrogames,
Égarés muets, loin de tout son,
Esclaves des pulsions,
Ils communient, turbulents poissons,
Dévalent le bouillonnant torrent de passion,
Jusqu’à l'asphyxie, délicieux calvaire,
Heureux noyés volontaires,
Cèdent sous les assauts,
Violents de gentillesse,
De la tempête de liesse,
Qui souvent porte ses vassaux,
Amants, au-delà du ciel,
Dans un pays de miel.
Puis, redescendre,
Trop tôt remonter,
Au pays des cendres,
Blafarde clarté,
Sineux méandres,
Hideuse réalité.
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