11 - Phobie

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Elle était assise ici, sur ce banc, depuis des heures, dans cette petite pièce. Elle n’avait que la lumière ne s’éteignant jamais et sa canne pour seule compagnie. Immobile, elle fixait la porte, perdue dans ses pensées. Elle ne souriait plus, elle était comme désactivée, n’attendait plus que le moment pour reprendre sa vie. C’était le genre de rapport que le lieutenant Ferdinand avait fourni durant les trois derniers jours à Loille. Bien que légalement sa détention n’avait que trop durée, Il n’avait pas envie d’avoir la filleule de procureur fouiner les bureaux, et l’avait presque oubliée dans la salle de détention. Elle était sous sa garde, et les résultats des laboratoires n’étaient pas revenus, il n’avait aucune raison de la laisser sortir.

Bien que son sort n’avait pas été l’objet de la moindre discutions, Greman essayait de glaner des informations au-dessus de l’épaule de sa collègue, restée muette sur ordre du commandant. Trois jours, puis quatre, puis cinq, puis une semaine complète. L’inspecteur n’avait jamais vu de détention aussi longue, le labo n’avait rien trouvé de correspondant entre la détenue, et s’attendait à ce qu’elle soit relâchée, mais rien. Elle put voir autre chose que la poignée qu’elle fixait obstinément, puis un beau jour elle fut trainée en salle d’interrogation. Loille demanda tacitement à Ferdinand de le suivre, suivi l’instant d’après par Greman sentant qu’il devait mettre son nez dans l’affaire à cet instant.

- Greman, retournez à votre poste ce n’est pas vous que j’ai appelé, retournez faire votre travail.

- Roh. Mais je suis en train de faire mon travail mon commandant. Au risque de répéter ce que vous m’avez dit plus tôt dans la semaine, je suis sur plusieurs affaires de meurtres s’étant déroulées dans la ville au cours des derniers mois, et c’est la seule chose sur laquelle je suis actuellement.

- Justement, retournez…

- Non ! non, mon commandant. Vous avez enfermé un suspect pour un cas similaire. Si vous l’interrogez, je veux au moins voir ses réactions à défaut de lui poser moi-même les questions.

- Greman !

- C’est mon travail. Que vous le vouliez ou non.

Les deux se lancèrent dans de grands regards noirs

- Je veux…

- Un rapport, dans l’heure qui suit, je connais la chanson.

Encore un duel de regard plus tard, Loille tourna les talons, ouvrit la porte, observa son subalterne et s’engouffra dans la pièce. A ce moment, l’adolescente fixa d’un regard noir le commandant, qui prenait son temps pour sortir plus de papiers d’un cartable usé, avant de se tenir face à elle les bras croisés, dos contre l’assise de la chaise.

- C’est bon ? vous avez fini votre manège ? demanda Clémence aussi froidement que possible

L’homme face à elle ne répondit pas sur l’instant

- tu sais ce que c’est, ça, ma petite ? Il tendit quelques papiers face à elle. Les rapports indiquaient des correspondances, écrit en grosses lettres.

- Une preuve que vous êtes un sac à merde ? Le visage de l’homme se décomposa, le calme fit place à l’agacement

- Je t’invite à choisir tes mots judicieusement ma jolie. Tu es peut-être de la famille Yomar, mais ils ne te protègeront pas un seul instant.

- Eux non, en effet. Mais je ne jouerais pas avec le feu si j’étais vous. Vos torchons sont faux. Comme votre poste.

- Ces torchons, sont la preuve formelle que tu étais sur tous les lieux de crime.

- Vraiment ? voyons ça.

Elle prit une feuille au hasard et la parcourra. Bien qu’elle n’avait aucune envie de lire ce contenu, elle prit son temps, comme une vengeance. Elle tapota du doigt pour agacer son interlocuteur, avant de jeter le rapport.

- C’est étrange, il me semblait avoir lu que le docteur Shremol était mort au parc de l’espoir. J’avais pensé que c’était ironique, je me souviens. Quand on sait le…

- Silence. Nous ne révélons pas toutes les données au publique. Mais le docteur avait été RETROUVé au parc de l’espoir. Mais l’enquête a révélé qu’il avait été trainé après sa mort dans le parc. Et étrangement, sur sa veste, les mêmes empreintes que sur votre canne ont été trouvée.

- D’un je sais lire, et secondement, savez-vous combien de personnes ont eu ma canne dans leur main au cours des dernières semaines ? si vous vouliez mes empreintes, pourquoi ne pas utiliser celles que vous avec prises au labo directement ? vous devriez passer des cours de rattrapage, je suis sûre que vous en avez les moyens.

Il prit une grande inspiration, avant de l’agripper par les cheveux

- écoute moi bien ma grande, si tu veux jouer aux plus cons, on va jouer. T’était où le soir du meurtre du docteur Shremol.

- C’est marrant, je croyais que vous étiez convaincu que j’étais sur les lieux du crime ?

Loille la dévisagea un long moment, furieux, avant de la jeter en arrière.

- Ferdinand. Prenez ma place.

- Déjà en train de fuir ? Provoqua-t-elle une dernière fois avant que la porte ne claque.

Loille se plaça à côté de Greman, qui ne quittait pas un seul instant Clémence des yeux, il semblait se retenir de rire en face de lui. Ferdinand entra à son tour, très calme, sous le regard intrigué de la jeune femme

- Je vous imaginais… Plus masculines avec votre nom pour être honnête

- Je sais. Bien. Reprenons les questions.

- si vous vous basez sur ça vous pouvez arrêter tout de suite. Ça ne mènera personne à rien du tout. Tout ce qui est ici n’a aucune valeur, ce sont des faux avec marqué vrai en gros dessus.

- et pour ce que n’est pas dans ces feuilles ? elle poussa le tas de feuilles sur un bord de table

- C’est-à-dire ?

- Pierre Grisard.

Elle mit une grande pause. Elle cherchait à voir l’expression de la suspecte. Clémence ne voyant pas de suite à sa phrase, leva simplement un sourcil.

- Oui ?

- Nous suspectons que vous l’avez tué pour ne pas avoir de complice pouvant mener jusqu’à vous.

- Qui et quoi ?

- dans ce cas, Daniel Frimont.

- à nouveau, qui ?

- C’était un employé de la société Quimest. Même constat.

- Pourquoi moi ? parce que je ressemble au suspect ? c’est la raison pour laquelle je viens de perdre dix jours en cellule. ?

De l’autre côté de la vitre, Greman lança très rapidement au commandant

- On aura rien d’elle. L’interrogatoire ne prouvera rien. Je propose de lui donner un couteau.

- Fermez la. Je ne le dirais qu’une fois.

- si on lui donne un couteau on pourrait voir quelle est la manière la plus naturelle pour elle de tenir le couteau. On pourrait en déceler pas mal sur son comportement, si elle refuse de le prendre ce sera le plus suspect. Sinon il faudra regarder chaque parcelle de son visage, et dès qu’elle le prend la position de ses doigts.

- Barrez-vous Greman ! je ne suis pas d’humeur pour écouter vos conneries !

Il frappa la vitre tintée, interrompant d’un coup l’interrogatoire. L’inspecteur surprit une certaine tension en Clémence, mais avant d’en faire part il fut chassé de la petite salle. Sur ordre express, il s’en alla, mais resta derrière la porte, sans que son supérieur ne s’en rende compte. Loille rentra dans la pièce et agrippa la suspecte par les poignets.

- On dirait que tu n’es pas restée assez longtemps au calme. Que dirais-tu d’y retourner ?

Il se rendit compte qu’elle se mit à trembler une fois l’idée de se retrouver à nouveau enfermée. Il eut un grand sourire face à la grimace de Clémence

- Oui, c’est ce qu’il me semblait, tu n’as pas eu le temps de te calmer. Alors que dis-tu de rester…

- Faites ça, et croyez-moi, le lieutenant-colonel Tomera en entendra parler.

Ce fut au tour du commandant de se refroidir. Il détacha ses menottes et la traina hors de la pièce hors de la salle sous les yeux de Ferdinand.

- Attendez mon commandant ! où dois-je vous déposer ces documents ?

- Poubelle.

Il passa la porte et tomba sur Greman qui les attendait

- Vous ! Râlât-il. Oh et puis faites ce que vous voulez. Gardez là sous surveillance, et loin de moi.

Loille continua sa route d’un pas furieux, une porte claquée résonna dans tout le bâtiment. Ferdinand arriva au niveau des deux autre.

- Je pense qu’elle va avoir besoin de prendre une douche, et probablement de vêtements propres. J’imagine que je peux te laisser la guider ? lança légèrement l’inspecteur.

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