Chapitre 19 Imprévu, Partie 2
- Viens, Triss ! l’enjoignit Angelica en l’entraînant avec elle.
Triss avait de nouveau quatre ans. Faisant taire son appréhension, elle suivit celle-ci docilement, en regardant s’amuser les autres enfants autour d’elle.
Angelica l’emmena vers un groupe de filles qui jouaient à la corde à sauter dans un coin, deux d’entre elles la tournaient en comptant d’une voix claire tandis qu’une troisième sautait par-dessus.
- Cinquante-trois… Cinquante-quatre… Cinquante-cinq… chantonnaient les fillettes.
La corde buta soudain contre les chevilles de l’enfant qui faillit tomber. Celle-ci se tourna aussitôt vers l’une des filles qui la tournaient :
- Tu triches Maisie ! s’écria-t-elle en la pointant du doigt avec agressivité. Tu as accéléré d’un coup !
- Ce n’est pas vrai ! protesta Maisie. Tu as juste perdu le rythme Prunilla !
- Arrête de mentir ! Je suis allée jusqu’à soixante-quatre tout à l’heure, et…
Les petites filles s’aperçurent soudain de la présence de Triss et d’Angelica. Prunilla croisa le regard de Triss qui comprit aussitôt qu’elle ne l’aimerait pas. Cette fille l’envisageait avec méfiance et dégoût.
- Qui c’est, Angelica ? demanda Prunilla en désignant Triss d’un grossier signe de tête.
- Une nouvelle élève, elle s’appelle Triss, répondit Angelica sur ses gardes. Ne montre pas les gens comme ça, Prunilla ! La maîtresse nous a dit que c’était mal poli !
La fillette, ignorant la remarque, examina Triss de la tête aux pieds en ne cachant pas son dédain. Triss serra les poings mais supporta cette inquisition en silence.
- Tu sais jouer à la corde à sauter ? lui demanda abruptement Prunilla.
Triss releva la tête.
- Euh… Oui… j’y ai déjà joué… répondit-elle timidement. Quelques fois seulement.
Prunilla esquissa un sourire condescendant.
- Alors vas-y la nouvelle, montre-nous ce que tu sais faire ! lui déclara-t-elle en s’écartant. C’est moi qui détient le record absolu de l’école. J’ai fait plus de soixante-dix sauts !
Triss hésita. Elle n’avait pas envie de rester ici avec Prunilla. Quelque chose lui disait que c’était tout sauf une bonne idée. Mais Angelica posa une main réconfortante sur son épaule.
- Tu vas voir, c’est super ! lui affirma la fillette.
Triss se décida. Elle prit alors sa place entre les deux filles, et Maisie lui sourit.
- On va y aller doucement pour que tu t’y habitues, la rassura-t-elle en faisant un signe de tête à celle qui tenait l’autre bout.
La corde se mit en mouvement et Triss l’esquiva facilement. Les filles se mirent à chantonner, comptant le nombre de sauts. Pour elle, dotée de capacités physiques déjà supérieures à son âge, c’était littéralement un jeu d’enfant… Sauf qu’elle n’était pas une fillette ordinaire.
Elle en était déjà à vingt-deux quand Maisie lui demanda si elles pouvaient accélérer et Triss hocha la tête avec confiance. La cadence de la corde continua d’augmenter tout comme le nombre de sauts que Triss effectuait.
- Cinquante-quatre, cinquante-cinq… chantonnaient toujours les fillettes.
Prunilla commença à perdre son attitude confiante. Angelica observait Triss avec un mélange de stupeur et d’émerveillement. Petit à petit, d’autres enfants s’étaient rassemblés pour regarder Triss sauter toujours plus vite.
Lorsque Triss atteignit soixante, Prunilla en colère arracha la corde des mains de l’autre fille et accéléra la cadence, méprisant les protestations de Maisie et d’Angelica.
- Tu vas la faire tomber ! la prévint cette dernière.
- C’est trop lent ! répliqua Prunilla en accélérant le rythme.
Mais il n’y avait rien à faire. Triss continuait de sauter en rythme, se laissant totalement absorber par le jeu. Elle ne savait plus du tout à combien elle en était et en oublia même ce qu’elle faisait pendant quelques minutes.
Ce fut seulement quand elle leva enfin la tête qu’elle découvrit l’expression médusée d’Angelica et de la foule d’enfants qui les entouraient. Les paroles d’oncle Sirius lui revinrent alors en mémoire…
Ne te fais pas remarquer.
Triss s’écarta de la corde d’un bond et se redressa. Tout autour d’elle, les enfants se taisaient, silencieux.
- Tu… Triss… Comment… ? murmura Angelica, stupéfaite.
- Deux… Deux-cent-cinquante-six… balbutia Maisie.
Triss tressaillit. Elle en avait trop fait, exactement comme son oncle le craignait ! Il l’avait pourtant mise en garde, les humains haïssaient ce qui sortait de l’ordinaire ! La fillette sentit la panique s’emparer d’elle et chercha son oncle du regard.
Soudain, Angelica sourit.
- C’était fantastique, Triss ! s’écria-t-elle en lui prenant les mains. Je ne savais pas que tu étais aussi incroyable !
Les autres enfants se mirent à l’acclamer à leur tour. En un éclair, Triss se retrouva submergée par des visages admiratifs.
- Comment tu t’appelles ?
- T’es vraiment forte, tu sais ? Prunilla a eu du mal à atteindre les soixante-dix sauts, mais tu n’as eu aucun mal à aller jusqu’à deux-cents !
- Tu habites où ?
- Attendez ! protesta Prunilla. Elle a triché ! Cette fille, elle n’est pas, elle n’a pas…
Mais personne ne fit attention à elle. Prunilla poussa un cri de rage et lui adressa un regard empli de haine. Puis elle tourna les talons. Les autres enfants continuèrent d’entourer Triss.
- Ne t’inquiète pas, Prunilla aime être le centre d’attention, lui souffla Angelica. Elle est méchante avec tout le monde. Viens jouer avec nous. Tu peux m’apprendre à sauter comme toi ?
- Moi aussi ! protesta une autre fillette.
Triss sourit joyeusement. Elle avait réussi, elle avait enfin de vraies amies.
Et ce fut à cet instant précis que tout bascula.
- Hé, la nouvelle, l’avait appelée une voix de garçon derrière elle.
Un lourd silence puis quelques murmures inquiets avaient envahi les rangs. Triss se retourna pour se retrouver face à deux garçons qui la dépassaient d’une tête et l’envisageaient d’un air mauvais.
Ils avaient tous les deux l’air agressif, stupide et brutal ; ils devaient avoir au moins deux, voire trois ans de plus qu’elle. Et celui de droite paraissait être le pire. Triss n’avait pas compris tout de suite pourquoi les autres enfants semblaient avoir peur de lui. Maisie lui chuchota alors avec un brin de panique dans la voix :
- C’est Léo, le plus fort chez les grands ! Il n’arrête pas de se battre…
Prunilla apparut soudain aux côtés du garçon et esquissa un sourire triomphant en direction de Triss. Le garçon s’adressa à celle-ci d’un ton menaçant :
- C’est toi qui embête ma petite sœur ?
- Léo, ne commence pas, intervint Angelica en s’avançant.
- Mêle toi de tes affaires, miss-je-sais-tout ! rétorqua le gamin en levant son bras en direction d’Angelica.
Cette dernière poussa un cri de terreur et recula précipitamment en tremblant. Triss s’interposa alors :
- Arrête ça, ou tu vas le regretter, le prévint-elle.
Léo éclata de rire.
- Tu te prends pour qui, la nouvelle ? ricana-t-il. Tu crois que tu peux débarquer ici et t’en prendre à ma petite sœur sans que j’intervienne ?
- Je ne lui ai rien fait ! Répliqua Triss. Va-t’en sinon je préviendrai la…
Léo lui lança un coup de poing dans le ventre. Surprise, Triss, qui ne s’était jamais battue, n’eut pas le temps de réagir face à cette violence inattendue. Elle fut pliée en deux, le souffle coupé. La main de Léo lui attrapa les cheveux et la força à relever la tête. Triss cria de douleur.
- Tu crois que parce que t’es une fille, je vais y aller doucement avec toi ? ironisa le gamin en échangeant un regard réjoui avec son camarade qui éclata de rire. Et puis c’est quoi cette peau toute blanche et ces yeux rouges ? T’es une sorte de monstre, hein ?
Il frappa encore et Triss gémit à nouveau.
- Je n’ai pas peur des monstres, moi ! clama Léo en faisant un signe de tête à son camarade qui s’empressa de retenir Triss, totalement tétanisée.
- A l’aide… murmura Triss en sentant la peur l’envahir.
Elle parcourut du regard les enfants qui les entouraient. Il y en aurait probablement au moins un qui interviendrait, non ? Mais tout espoir fut brisé quand elle se rendit compte que les autres évitaient son regard en tremblant de tous leurs membres. Elle sentait leur soulagement de ne pas avoir été choisis comme victimes de la fureur de Léo. De toute évidence, aucun d’entre eux n’irait chercher un adulte ou ne l’aiderait…
- Les monstres n’ont pas le droit de demander de l’aide, rétorqua Léo avec un sourire de mauvais augure avant de lever à nouveau un poing menaçant. T’es dangereuse. Et moi je suis le héros qui va sauver l’école en te faisant mordre la poussière !
Le poing s’abattit ; sentant le désespoir l’envahir, Triss ferma les yeux...
Elle se redressa brusquement en sursautant, le corps saisi de tremblements incontrôlables. Ses derniers souvenirs avant de perdre connaissance ; la bataille devant les portes des Enfers, la créature mécanique Tuesday et la trahison de Philippa, l’exécution de Vanessa, Stella, Marco, Romy... tout cela lui revint en mémoire avec la force d’un coup de marteau, à tel point qu’elle eut du mal à respirer. Triss se souvint de la rage qu’elle avait éprouvée, puis de cette inépuisable soif de sang. Elle avait tué… combien de personnes ? Triss n’avait que de vagues souvenirs de sa folie meurtrière.
« Tu l’as déjà fait » lui dit une petite voix malicieuse dans sa tête. « Rappelle-toi, le shinobi sur le pont. C’est toi qui l’as achevé. »
C’était vrai. Ses mains étaient déjà tâchées de sang bien avant ce soir-là à Lutécia. Elle avait déjà sur sa conscience toutes les vies d’Umbrella pour commencer. Triss se souvint des paroles de Stella et Vanessa et elle frissonna de dégoût. Au final, elles avaient eu raison… tout ce dont Triss était capable, c’était semer la mort autour d’elle. Cette vérité si cruelle parut momentanément calmer sa respiration, comme si le fait de l’avoir admis l’avait en quelque sorte soulagé. La panique qui la comprimait disparut, remplacée par une profonde résignation.
Triss examina les lieux autour d’elle et reconnut aussitôt l’une des pièces à l’intérieur du vaisseau de Sheamon. L’ensemble que le renégat lui avait acheté était posé sur une chaise près d’elle. Il semblait comme neuf malgré tout ce qu’il avait enduré auparavant. Voilà au moins quelque chose qu’elle n’avait pas détruit…
La jeune fille baissa alors les yeux et s’aperçut qu’elle avait encore les entraves magiques posées par Marco lors de la bataille de Lutécia. La chaine les reliant entre elles avait été cassée, mais les menottes étaient toujours là. Elle tenta de faire appel à sa magie, mais aucune lumière ne sortit de ses paumes. Avec rage, la jeune fille tenta d’arracher les fers. Elle utilisa toute sa force, mais en vain. La puissance qu’elle avait déployée devant les portes semblait l’avoir abandonné. A bout de nerfs, Triss baissa les bras et sentit les larmes couler sur son matelas, tandis que la haine envahissait son cœur. Philippa, Forlwey, les Nocturii et surtout Némésis… Elle s’assurerait qu’ils finissent par payer un jour pour tous leurs crimes. Au bout d’un moment, la jeune Nocturii sécha soudain ses yeux avec colère, se maudissant de sa faiblesse. Elle pleurerait quand elle aurait achevé le nosferatu et son espionne, pas avant. Ensuite, elle trouverait le moyen de faire payer sa mère.
Ragaillardie par cette sombre résolution, Triss rejeta la couverture de son lit de camp, puis se leva avec une agilité surprenante, même pour elle. La jeune vampire se souvint qu’elle avait été blessée au flanc par Marco. Elle souleva sa tunique et examina son corps. Pas la moindre trace de blessure et aucune fatigue, contrairement à son dernier réveil. Il lui sembla que son corps s’était bien mieux rétabli qu'après leur évasion de Nice. Les fers cliquetèrent quand elle se déplaça, lui faisant serrer les dents de frustration. Triss choisit de l’ignorer. Sheamon saurait surement comment les retirer.
Son regard fut alors attiré par le hublot de la pièce, dont elle s’approcha pour contempler le paysage.
Un immense désert de sable doré qui paraissait s’étendre à l’infini, parsemé de petites oasis, s’étalait devant ses yeux. De majestueux piliers de pierre orangée, bien plus imposants que la plus haute des montagnes, s’élevaient jusqu’à un ciel rouge écarlate qui paraissait presque dépourvu de nuages. Malgré sa vision d’aigle, Triss ne put distinguer le sommet de ces incroyable piliers qui semblaient se perdre dans le ciel. Au loin, Triss crut également apercevoir un long cours d’eau qui coupait l’océan de sable en deux et qui se divisait par moments en petites rivières qui s’enfonçaient dans le désert tel des veines apportant la vie dans cet environnement aride. Il n’y avait pas de soleil, mais la lumière émanant du ciel écarlate éclairait comme en plein jour à la Surface. Il faisait chaud, mais c’était supportable.
Elle comprit aussitôt qu’il s’agissait des Enfers, le royaume des démons, territoire de Satan. Pourtant, cette image était bien loin du pays de désolation qu’elle s’était toujours imaginé… Les Enfers possédaient sans conteste une beauté brute, mais naturelle. Triss avait du mal à croire qu’ils se trouvaient à des centaines de kilomètres sous terre. Qui aurait pu imaginer qu’un monde aussi immense pouvait exister à cette profondeur ?
La jeune fille se demanda soudain où se trouvait Sheamon. Le renégat aurait probablement beaucoup de chose à lui dire sur le royaume souterrain. Le connaissant, il se trouvait surement sur le pont pour diriger le vaisseau. Elle s’habilla donc en vitesse et glissa sa pièce écarlate dans sa ceinture avant de se diriger vers la porte. Triss agrippa machinalement la poignée et tira sans réfléchir.
Les charnières de la porte sautèrent tandis qu’un craquement épouvantable se fit entendre, et l’instant d’après la porte fut brutalement arrachée de ses gonds. Bouche bée, la jeune fille leva la tête et se retrouva nez à nez avec Sheamon. Le renégat, qui s’apprêtait manifestement à entrer dans la pièce, était stupéfait. Ses yeux passèrent de Triss à la porte qu’elle tenait toujours dans sa main.
- Qu’est-ce qui te prend, gamine ? grommela-t-il avec agacement.
- Je… Je n’ai rien fait ! protesta Triss. J’ai juste tiré, et…
- Eh bien tu aurais peut-être dû éviter de forcer autant. Mon vaisseau est un peu vétuste, mais ce n’est pas encore une épave, et j’aimerais qu’il évite d’en devenir une !
- Je sais contrôler ma force ! répliqua Triss. C’est juste que…
Sans le vouloir elle resserra légèrement sa prise et la poignée explosa entre ses doigts. Triss croisa le regard suspicieux de Sheamon.
- Euh… Désolée… s’excusa-t-elle en baissant les yeux. Mais pourtant, je ne comprends pas… Je n’ai même pas forcé !
- On dirait que tes capacités physiques ont augmenté… constata Sheamon. C’est sans doute en lien avec…
Il s’interrompit, mais Triss comprit aussitôt qu’il voulait parler de ce qui s’était passé devant les portes des Enfers.
- Oublie-ça, gamine, se reprit-il d’un ton bourru. Tu te sens mieux ?
Pour la première fois depuis qu’elle s’était réveillée, Triss sourit. Elle ressentit de la gratitude envers le renégat, et une once de culpabilité pour ne pas l’avoir écouté à la forteresse de Lutécia. Cela faisait deux fois qu’il la sauvait des Nocturii.
« Il a été engagé pour ça ! » lui souffla la voix perfide dans son esprit.
- La ferme, répliqua Triss.
Sheamon haussa les sourcils et Triss se rendit compte qu’elle avait parlé à voix haute.
- Désolée, s’écria-t-elle aussitôt en rougissant. Ce n’était pas… Je réfléchissais à quelque chose… rien de grave mais… Enfin bref, je vais bien… très bien, même.
Sheamon l’examina encore du regard, puis il haussa les épaules.
- Tant mieux, gamine, déclara-t-il en se retournant. Puisque tu es debout et en pleine forme, cela va nous faciliter les choses. Viens avec moi, il faut qu’on parle. Toi, moi et nos deux passagers. Evite de casser autre chose, par contre.
Triss retint une réplique bien sentie et suivit l’exorciste.
Ce dernier lui fit traverser le vaisseaux jusqu’à la troisième pièce composant le pont inférieur, qui semblait être une sorte de salle de séjour avec un coin cuisine poussiéreux, un vieux canapé délavé et une grande table rectangulaire. Triss se dit que Sheamon était peut-être puissant, mais ses vastes compétences n’incluaient certainement pas le ménage…
La pièce n’était pas vide. Assis à la table centrale, se trouvait un homme d’une vingtaine d’années arborant une voyante tenue émeraude. Un chapeau pendait dans son dos, retenu à son cou par un cordon. Triss aperçut également un impressionnant fusil à lunette qu’il portait en bandoulière. Il lui adressa un sourire amical suivi d’un clin d’œil en soulevant son verre pour l’accueillir.
- Salut, la guerrière ! lui dit-il d’un ton enjoué. Alors, tu as enfin récupéré la raison ?
Il frottait une impressionnante déchirure sur le bord de son manteau avec une pierre frappée d’une rune. Les bords de l’entaille se rapprochaient lentement l’un de l’autre, jusqu’à se ressouder à nouveau. Le manteau redevint comme neuf, à la grande satisfaction de son propriétaire.
- Vous êtes… murmura Triss en fouillant dans sa mémoire.
Elle se rappelait l’avoir aperçu brièvement sur le champ de bataille… Heureusement, l’homme mit fin à sa détresse de lui-même.
- Mon nom est Jonas Perceval, jeune demoiselle, se présenta-t-il en inclinant la tête.
- Vous êtes le devin prisonnier que Sheamon a libéré, comprit Triss.
- C’est ça. Mon ami Sheamon a eu la bonté de me sortir de ma geôle froide et humide…
- Je ne suis pas ton ami, rétorqua Sheamon en faisant signe à Triss de s’asseoir. Maintenant que la gamine est là, nous allons enfin pouvoir discuter.
La jeune fille obtempéra et s’assit face à l’ancien prisonnier. Ryku apparut de nulle part et sauta sur les genoux de Triss, se frottant contre elle en ronronnant : elle le caressa avec plaisir.
Mais elle s’aperçut soudain de la présence d’une autre personne dans la salle. La lamia (Triss se rappela qu’elle s’appelait Syana) qui avait failli étrangler Romy se tenait adossée contre un mur, en fixant Sheamon d’un regard meurtrier, une flèche encochée sur son arc qu’elle paraissait prête à brandir à tout instant. Les regards de Triss et de la femme-serpent se croisèrent brièvement. La jeune fille serra les poings. Si cette lamia n’avait pas débarqué… peut-être que tout se serait passé autrement.
« Philippa t’aurait trahie quand même » répliqua la voix sournoise dans son esprit.
Triss l’ignora.
- Je veux bien comprendre pourquoi lui est ici, déclara Triss en désignant Jonas à Sheamon tandis que le devin buvait son verre. C’est grâce à lui que nous avons pu quitter Lutécia, après tout.
- Tu vas me faire rougir, petite, plaisanta Jonas.
- Mais elle, poursuivit Triss en montrant Syana d’un signe de tête. Que fait-elle ici ? Elle a essayé de nous arrêter aux portes… c’est une espionne au service des exorcistes !
- Quelle impertinence ! s’écria la lamia en se redressant, outrée. Mon maître n’est pas un simple exorciste ! C’est un capitaine Indomptable, l’un des meilleurs combattants du bataillon !
Sheamon tressaillit :
- Ton maître, c’est Liam ? s’étonna-t-il, incrédule.
Le visage de Syana changea brusquement d’expression. Elle tendit la corde de son arc et laissa partir une flèche si vite que Triss n’eut pas le temps de bouger. Le projectile fila vers la tête de Sheamon…
A suivre...
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