CHAPITRE CXXXIX
J'ai pris une douche pendant que les enfants se couchaient et je suis allé leur souhaiter bonne nuit. Gloria a voulu que je leur lise une histoire et je me suis acquitté de cette mission avec plaisir.
-"Voilà, c'est fini. Bonne nuit et à demain matin...
-"Bonne nuit, Diego !"
Je les ai embrassés et je suis redescendu dans le salon où Lisa et Gabriella buvaient leur café.
-"Voilà, c'est fait !
-"Pas de cri, pas de comédie pour aller se coucher, on ne va pas te laisser partir !
-"Tiens, voilà ton café.
-"Merci. Ils sont trop mignons, ça me donne envie d'avoir des enfants plus tard.
-"Oh tu as encore un peu de temps !
-"Bon, je viens d'avoir mon ami Hubert au téléphone, il est juriste, et il m'a confirmé tout ce que tu nous as dit, sauf l'annulation de l'adoption. C'est une adoption plénière donc irrévocable ; au moins sur ce point, tu ne risques pas de te retrouver à la DASS. Alors, comment procède-t-on ?
-"Je pense que le plus simple est que vous contactiez notre avocat. J'ai sa carte dans mon sac là-haut. Heu... il ne sait pas que je suis là mais normalement ma tante Sophie a dû le prévenir...
-"D'accord, je l'appellerai demain matin, je ne commence qu'à 10 heures.
-"Est-ce que tu as prévu ton retour sur Nantes ou est-ce que tu veux rester un peu ici ?
-"Oh merci c'est très gentil mais je dois repartir demain, j'ai déjà mon billet de train Marseille-Nantes mais je n'ai plus que cinq euros et ce n'est pas suffisant pour le reste..."
Elles m'ont gentiment dit que ce n'était pas un problème et on est restés à discuter un peu puis, voyant que je commençais à baîller régulièrement, elles m'ont envoyé me coucher.
Dans la chambre de Timéo, bien au chaud, allongé dans un lit confortable et parfaitement détendu, j'ai mesuré la chance que j'ai eu de retrouver Gabriella. C'est sûr que pour moi, elle ne sera jamais ma mère mais c'est quelqu'un d'extraordinaire, quelqu'un à l'écoute et qui s'engage aux côtés de ceux qui ont des problèmes. Il y a quinze ans auprès de Stéphane et maintenant à mes côtés...
'Merci Gabriella, tu n'es pas ma mère mais tu es ma bonne fée !'
...
Gloria et Timéo sont venus me réveiller ce matin. Ils ont allumé la lumière et ont sauté sur le lit pour venir me faire des bisous sur toute la figure. J'ai sursauté et puis comprenant ce qui se passait, je les ai chatouillés ce qui a déclenché des fous rires qui ont fini par alerter Lisa.
-"Eh bien, je vois que tout le monde est de bonne humeur ce matin ! Allez prendre votre petit déjeuner, je viens de vous servir vos céréales et Diego va vous rejoindre dans quelques minutes !"
Ils sont descendus du lit à regret et ont disparu aussi vite qu'ils étaient arrivés.
-"Je crois qu'ils vont te regretter, Diego !
-"Oh moi aussi, je les adore !"
Mon train est à 8 h 24 à la gare de Martigues alors je n'ai pas traîné. J'ai pris congé avec émotion de toute la famille et on s'est promis de rester en contact maintenant qu'on se connaît. J'ai remercié Gabriella et Lisa une nouvelle fois pour tout ce qu'elles avaient fait pour moi puis je suis monté dans la voiture de Gabriella et un quart d'heure plus tard, nous arrivions à destination.
-"Je sais que tu vas te débrouiller mais passe-moi quand même un coup de fil quand tu seras arrivé à Nantes !
-"Oui, bien sûr. Merci, merci pour tout, Gabriella !
-"Oh mais de rien, allez, file vite acheter ton billet, il ne s'agirait pas que tu rates ton train !"
Elle m'a serré dans ses bras et m'a embrassé. J'ai senti tout son amour et je n'ai pas pu empêcher une larme de paraitre au coin de mes yeux.
-"Merci, je file et je t'appelle, promis !"
...
J'ai attendu d'arriver à Paris pour manger mais j'avais acheté un sandwich à Marseille qui m'a aidé à patienter. Arrivé gare de Lyon, j'ai fait le trajet inverse en métro avec plus d'assurance qu'à l'aller et je suis monté dans le train pour Nantes vers 16 heures.
'Ca y est, c'est fini, retour au bercail !'
Dans un peu plus de deux heures, je serai à Nantes. Je redoute un peu parce qu'il va falloir que j'explique ce que j'ai fait à pas mal de monde et je sais que j'essuierai certainement des reproches voire des sanctions notamment du foyer de la Ransay et peut-être du lycée mais je suis aussi très impatient parce que je vais aller voir Thibaud.
Comme je me le suis promis, je vais aller le voir aussitôt arrivé.
'Et je vais lui dire que je pense... que je crois... que... j'éprouve quelque chose pour lui...'
Je croyais que j'avais bien avancé mais je me rends compte que je ne parviens pas à définir précisément ce que je ressens.
'Je ne sais pas exactement ce que j'éprouve mais je sais que c'est fort et c'est ça qui compte !'
J'ai regardé attentivement mes voisins les plus proches. D'une part, j'aurais voulu revoir la dame qui m'a si gentiment aidé après le vol de mon portefeuille et d'autre part, j'étais suspicieux envers tous les hommes qui s'installaient non loin de moi. J'ai fini le livre que j'avais commencé à Martigues, Gabriella m'a dit de l'emporter. C'est une belle histoire, de science-fiction et d'amour mais elle finit dramatiquement et quand j'ai refermé le livre je n'ai pu m'empêcher de penser que je ne voulais pas que mon histoire finisse ainsi. Elle finit mal parce que l'héroïne n'a pas levé le doute sur l'identité de son compagnon, persuadée que ce n'était pas son amoureux et elle l'a tué en se donnant elle-même la mort comme dans une tragédie shakespearienne. Ce n'est pas tout à fait ma situation, bien sûr, mais il y a suffisamment de similitudes pour que cela me fasse réfléchir.
'Non, plus d'atermoiements, je veux savoir et je suis sûr que Thibaud m'aime lui aussi !'
A 18 h 19, le train s'est arrêté en gare de Nantes et, impatient, je me suis tout de suite dirigé vers la sortie et la station de tramway.
Quand je suis passé près du foyer de la Ransay, je me suis tassé sur mon siège. Je sais qu'il faudra que j'y retourne mais pas avant lundi. Je suis dans la nature et je compte bien profiter de mon week-end de liberté !
Je suis descendu à Beauséjour et j'ai marché non pas vers chez moi, mais vers chez Thibaud.
'De toute façon, il n'y a personne à la maison, Sébastien rentrera de la clinique seulement lundi...'
Je ne sais pas si Sophie lui a dit que j'avais fugué.
'Peut-être que non, pour ne pas l'inquiéter...'
Il fait plus froid qu'à Martigues mais pour un soir de février c'est très supportable et puis ce n'est pas très loin, c'est l'affaire d'un bon quart d'heure à pied tout au plus.
Quand j'ai tourné dans la rue de Provence, j'ai senti mon cœur se mettre à battre un peu plus fort. L'excitation à l'idée de retrouver Thibaud, peut-être un peu d'appréhension aussi...
Je ne me suis pas arrêté devant le numéro 8 pour reprendre mes esprits, j'ai ouvert le portillon et suis allé directement sonner à la porte.
J'ai reculé un peu et j'ai souri nerveusement quand j'ai entendu quelqu'un dévaler les escaliers. La porte s'est ouverte et Alexis est apparu.
-" Oh Diego, enfin ! Salut, entre !
...
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