Alors que le débat de l’entre-deux tours de la présidentielle avait passionné la twittosphère, j’avais refusé toutes les sollicitations militantes sentant proche l’issue de mon enquête. 

    Ainsi, le fameux @Tom fut de nouveau convoqué à l’hôtel de police. Cette fois, il semblait bien plus nerveux que la première. Les policiers voulaient savoir pourquoi et comment il avait récupéré le programme. 

     C’était un jeune homme à l’allure juvénile, très mince, légèrement barbu et à la peau très blanche. Je l’avais brièvement aperçu derrière une vitre alors qu’il se tenait devant le bureau d’un inspecteur. En effet, ma source m’avait proposé de venir assister à l’interrogatoire. Après m’avoir offert un café, il m’avait accompagné dans une petite pièce vide où j’avais pu entendre tout de ce qui se disait. 

    Après avoir été – un peu – bousculé par celui qui assurait l’interrogatoire, @Tom se lança dans son récit :

    - Oui. Il avait bien essayé de vendre le programme d’@laddin.

    - Non. Il ne l’avait pas volé. C’ était le blogueur qui se sentant menacé lui en avait confié une copie.

    - Oui. Il était présent dans l’appartement le soir de la mort d’@laddin. Et, c’était bien lui qu’on voyait sortir de l’immeuble avec la capuche sur la tête.  

    - Non. Il ne l’avait pas tué. Il avait bien trop d’affection pour lui. @laddin lui avait promis de vivre avec lui lorsqu’il aurait fait fortune avec son produit.

     Toutes ces déclarations avaient laissé les enquêteurs très dubitatifs. Ils n’y croyaient pas le moins du monde. Cependant, le jeune homme semblait perturbé et peut-être proche de tout déballer. Sans le laisser respirer, ils continuèrent l’interrogatoire sur la base d’éléments issus de mes recherches en ligne. 

     En effet, après le témoignage de @Geekalid, j’avais analysé plus à fond les écrits du suspect. J’étais remonté assez loin dans sa prose. Comme on pouvait l’imaginer, il avait connu @laddin sur le net. Puis, il l’avait rapidement rencontré IRL. Telles qu’apparaissaient leurs conversations, le blagueur semblait s’être rapidement agacé de sa jalousie, du moins en apparence. Il se moquait ouvertement de lui dans certaines correspondances qu’il entretenait avec d’autres connaissances. Une matière que j’avais diffusé dans la foulée à ma source policière.    

    - Oui. Il savait qu’@laddin fréquentaient d’autres hommes. Il était d’accord pour ne pas avoir l’exclusivité sur lui.

    - Non. Il n’avait pas vu ces messages peu flatteurs qu’il envoyait à son insu.

    - Oui. Il savait que le blogueur s’agaçait de ses crises de jalousie. Mais, c’était plus fort que lui. Il espérait toujours qu’il pouvait le changer.

   @Tom semblait bien plus coriace que les policiers ne l’avaient imaginé. Ils le remirent en cellule après ce dernier interrogatoire.

    Ma source m’indiqua peu après qu’ils avaient de quoi le mettre en examen et l’écrouer. Que cela le ferait réfléchir et qu’il craquerait bien vite après avoir passé quelques jours en prison.

    De retour chez moi, j’étais plutôt circonspect devant mon écran. Tout ça me semblait trop simple, trop facile. Le type jaloux qui tue son amant. Le crime passionnel, un grand classique des faits divers. 

    Je me remis à la tâche, essayant de trouver une autre piste. Je me remémorai chaque indice fixé sur un mur comme je l’avais vu dans les séries américaines.

    Si @Tom n’avait pas assassiné le blogueur, alors qu’il ne faisait aucun doute qu’il était le dernier à être sorti de l’habitation, cela voulait dire que le meurtrier se trouvait déjà sur les lieux ou alors… Qu’il habitait les lieux.    

  

    Je repris donc mes recherches dans le but précis de trouver QUI parmi les nombreux détracteurs d’@laddin pouvait habiter près de chez lui. Dans la masse, je tombai assez vite sur un dénommé @Zac075 avec qui il avait échangé plusieurs commentaires sur son quartier parisien. Je remontai assez loin dans les interactions et je retrouvai des traces d’invitations à boire un verre (ou deux) dans un bistrot du coin.    

   Mais, ce ne fut que lorsque que quelqu’un sonna à ma porte que tout devint clair.