Chapitre 6: La villa

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    Anna avait perdu une partie de ses souvenirs, pourtant, perdue à travers ses songes, elle se trouvait confrontée à des cauchemars où des souvenirs très anciens refaisaient surface.

Plusieurs scènes se bousculaient dans son esprit...

Elle se remémorait sa vie d’autrefois, alors qu’elle était encore sur Terre. Elle se rappelait cette époque où elle vivait encore avec sa mère et son frère. Elle revoyait le jour où elle adopta sa petite chatte Sora et elle revivait également ce jour où elle avait réussi ses examens et avait obtenu en même temps son diplôme dans la finance ainsi que son permis de conduire.

Ou encore, elle affrontait à nouveau cet épisode, pendant son adolescence, où elle décida de mettre fin à ses jours, car elle ne supportait plus les difficultés de la vie.

Elle se rappelait lorsqu’elle allait travailler chaque matin et elle revoyait aussi tout ce qu’elle avait enduré depuis que la Terre avait été envahie.

Anna s’était assoupie depuis environ de trentaine de minutes. Elle se réveilla tout à coup en sursaut, lorsque la scène de l’orc en train de l’étrangler surgit.

˜

    J’ouvre les yeux subitement…

« Ce n’était qu’un mauvais rêve Anna ! Dis-toi que ce n’était qu’un mauvais rêve… »

    Ça semblait si réel, pourtant, je ne me rappelle d’aucun de ces moments après que la Terre ait été envahie. C’est si frustrant, car je suis incapable de dire s’ils se sont réellement produits ou non !

    Anna sait d’où elle vient et elle se souvient d’exactement tout avant la destruction de la Terre. Cependant, certains épisodes lui échappent complètement, notamment sa rencontre avec les quatre enfants.

    Je m’assois sur le lit et je scrute tout autour de moi la pièce qui est vide. Thraän n’est toujours pas revenu. Je m’impatiente alors je décide de sortir.

Je franchis la porte, je m’engage dans le couloir puis, je prends l’escalier et arrivée en bas, je me dirige à droite. L’endroit est si immense que je ne sais pas du tout par où commencer, alors disons que je me suis en quelque sorte permis de visiter les lieux...

Il y a plusieurs pièces très vastes. J’arrive sur une sorte de salle à manger où il y a une immense table ovale fixée sur un énorme pied central et douze chaises placées autour d’elle.

Je suis immédiatement captivée par ces sphères blanches de différentes tailles en suspension au-dessus de la table. Comme le lit où je m’étais allongée, comment peuvent-elles flotter ?

Plus loin, derrière, il y a une sorte de buffet blanc assez long où deux gros chandeliers sont posés à chaque extrémité du meuble. Comme à l’entrée de la villa, des fresques avec différentes scènes ornent les murs. Des hommes y sont représentés. Mais ma curiosité ne s’arrête pas là…

    Je visite chaque pièce de la maison et j’arrive dans un endroit qui s’apparente à une cuisine. Le design est toujours aussi futuriste : des placards sans portes fixés sur les murs, un immense bloc au milieu de la pièce qui doit servir de plan de travail où est posée une large coupe remplie de choses bizarres de couleur…des fruits ? Et devant, trois tabourets aux formes étranges. À l’extrémité de la pièce, un meuble avec une sorte d’évier spacieux et à l’opposé, deux cubes encastrés dans le mur comme des fours. Ça doit être une cuisine...

Cependant, en faisant le tour, je n’ai rien trouvé à grignoter et mon ventre se met à « crier famine » à ce moment-là.

    Tant pis ! Je sors de la pièce et je poursuis ma visite. Je progresse dans un autre couloir et je passe devant une salle où quelque chose m’interpelle. Je reviens sur mes pas et j’entre.

Ce que je vois à cet instant est magique, car je me crois en plein océan…

Tout autour de moi, on aurait dit que des sortes de parois retiennent des litres d’eau. Des créatures bizarroïdes nagent dans ce magnifique décor sous-marin. C’est une sorte d’aquarium géant.

Je reste une bonne dizaine de minutes, émerveillée, dans cet endroit si reposant et après un long moment, je quitte finalement la salle.

    Je reviens dans le couloir et je finis par arriver dans une immense bibliothèque. Il y a des milliers de livres et au milieu de la pièce, je distingue une table qui flotte, elle aussi, dans les airs avec un chandelier posé dessus et deux chaises de chaque côté.

Sur le mur en face de l’entrée, il y a cette géante peinture de Thraän posant fièrement. C’est un bel homme et c’est vrai qu’il a une certaine allure. Il ne me laisse pas indifférente, mais il est si froid et si fier que j’ai du mal à le cerner et à lui faire confiance.

En tout cas, une chose est sûre, il n’est pas un simple soldat et doit être beaucoup plus important que cela !

    J’observe la peinture et je me pose toutes sortes de questions à son sujet quand tout à coup, j’entends des voix de l’autre côté de la villa. Un homme et une femme parlent dans cette langue que je ne connais pas.

Mais qui ça peut bien être ? Thraän m’a pourtant affirmé qu’il vivait seul dans cette grande maison alors qui est cette femme que j’entends là? Et puis, je suis pratiquement nue. J’ai toujours cette espèce de latex qui recouvre mon corps et la cape de Thraän qui m’enveloppe. Je ne veux pas qu’on me voie dans cet état.

    Je sors de la bibliothèque et je cours jusqu’à la cuisine. Je me cache derrière ce gros bloc qui doit être un plan de travail. Assise et recroquevillée contre la paroi froide du bloc, j’attends là…

J’entends Thraän qui crie mon nom. Il est en train de me chercher, mais je ne compte pas sortir de ma cachette, car je ne veux pas que la personne qui l’accompagne me voie dans cette tenue. Je reste cachée.

    Thraän fouille toutes les pièces de la demeure et semble désespérément à la recherche d’Anna. Il craint que la jeune femme ait pris la fuite. Après quelques minutes, il arrive enfin à la cuisine

    J’entends des bruits de pas se rapprocher dans ma direction et ils s’arrêtent pile devant le bloc où je suis planquée. Je n’entends plus rien.

Et là, d’un coup, Thraän apparait sur ma gauche et semble très étonné.

    — Pourquoi te caches-tu ?

    — Qui est avec vous ? J’ai entendu une femme !

    J’ai à peine fini de lui poser ces questions que la voix de cette femme retentit à nouveau, mais dans la pièce cette fois-ci. Elle est là, immobile devant l’entrée, mais je ne vois pas encore à quoi elle ressemble. Elle vient de dire quelque chose à Thraän dans cette langue étrange.

Il lui répond d’un air amusé. Puis il me demande ensuite de me relever et m’assure que je n’ai rien à craindre d’elle. C’est ce que je fais, mais très lentement tout en serrant très fortement la cape pour ne pas qu’on me voie presque nue.

Une femme magnifique se tient juste devant moi : la peau claire, blonde, avec des cheveux attachés formant un épais chignon, de bonnes pommettes, des yeux en amandes magnifiques. Elle est élancée avec un physique assez généreux. Cette femme est vraiment belle…

Je l’observe dans les moindres détails et elle fait de même.

« Anna, je te présente Kirah ! Elle est ma meilleure amie depuis des années...tu pourras lui faire confiance autant que je lui fais confiance ! J’ai demandé à Kirah son aide, elle t’apprendra à devenir une femme de ce monde. »

Je continue d’observer la jeune femme qui m’examine très attentivement de la tête aux pieds.

    Thraän me fait avancer vers elle. Celle-ci me sourit, mais je ne suis pas très réceptive alors elle soupire puis, dit quelque chose à Thraän qui le fait rire aussitôt.

Nous sortons de la cuisine et arrivons à l’entrée où il y a le grand escalier.

    Thraän parle avec Kirah puis il s’adresse ensuite à moi : « J’ai quelque chose d’important à faire, je ne serai pas long. Kirah va s’occuper de toi, après nous irons faire un tour dans la cité si tu n’es pas trop fatiguée et plus tard, nous irons voir le médecin, car lorsque j’y suis allé, il était introuvable. »

Je m’ennuie tellement dans cette maison que je suis tout de suite ravie par cette proposition.

Kirah s’exprime cette fois-ci dans ma langue et rassure Thraän qui est sur le point de nous laisser seules : « Thraän, voyons, ne t’inquiète pas, je m’occuperai bien de ta protégée, tu en as ma parole ! »

Il lui sourit, puis il se retourne vers la porte et s’en va.

    Kirah m’accompagne dans ma chambre. Elle me demande de faire ma toilette avant qu’elle ne me prépare. Seulement il n’y a pas de tuyau de douche, ni de pommeau, ni de bouton, rien !

« Comment ce truc peut-il bien fonctionner ? »

    D’un air embarrassé, je lui fais savoir que je ne sais pas comment utiliser ce système.

Elle semble très étonnée, car Thraän lui a expliqué d’où je venais, mais elle me confie qu’elle n’avait jamais quitté Nosfuria et pensait que sur Terre les choses étaient semblables à ici. C’est alors qu’elle m’explique qu’il s’agit en fait d’un automatisme. La douche est un cylindre transparent avec deux portes qui coulissent de gauche à droite. Il faut rentrer à l’intérieur de la cabine, bien au centre pour que l’eau s’écoule par le haut. Des petites lumières au sol de la cabine délimitent le centre et les bords. Il n’y a pas de tuyau, de pommeau, rien et la température est réglée automatiquement.

Après avoir terminé, il convient de franchir la bordure où sont situées les petites lumières, alors l’eau s’arrête de couler et les portes s’ouvrent automatiquement. Tout ceci parait vraiment novateur pour moi…

    Je reviens dans la chambre et là, je distingue une dizaine de magnifiques robes étendues sur le lit en suspension. Elles sont plus splendides les unes que les autres. Kirah me demande d’en choisir une.

Il y en a une qui m’attire plus que les autres : très longue, fabriquée dans un tissu léger, bleu ciel, avec de larges bretelles et il y a une petite ceinture dorée autour de la taille formant un feuillage, un peu comme des feuilles de laurier.

Je l’enfile. Je dois dire que cette robe met agréablement mes formes en valeur.

    Kirah range les autres robes dans cette armoire qui vient d’apparaitre sous mes yeux dans un des murs et que je n’avais jamais remarquée jusqu’à présent. Ensuite, elle me fait approcher d’un appareil de forme carré posé sur la table. À l’intérieur du cube, il y a une sorte de moulage formant un visage. Il faut d’abord programmer les teintes désirées et la partie du visage que l’on souhaite enjoliver. Une fois le visage posé au-dessus du moulage, une lumière bleue comme une sorte de flash apparait instantanément et le maquillage est directement reproduit sur votre peau. Ingénieux !

    Elle brosse mes longs cheveux noirs et sculpte quelques boucles avant de me poser un petit diadème fin par-dessus. Et après avoir terminé, elle me demande, en souriant, si je désire me voir dans le miroir. Évidemment, j’accepte.

    En l’espace de quelques secondes, dans la glace, j’ai dû me prendre pour ce cher Narcisse qui tomba amoureux de son reflet, car j’aime profondément ce que je vois. Je n’ai jamais été aussi belle et ce maquillage me rend encore plus divine ! Je ne me reconnais pas !

    Kirah m’observe à travers le miroir et semble plutôt satisfaite du résultat.

    — Tu es enfin prête ! Regarde comme tu es splendide ! J’en suis presque jalouse ! me dit-elle d’un air amusé.

    Nous commençons à sympathiser et puis une question me traverse l’esprit. Je veux savoir ce qu’elle et Thraän se sont dit dans la cuisine lorsqu’il me cherchait.

    — Tout à l’heure dans la pièce où j’étais cachée, qu’est-ce que vous avez dit en entrant ? Vous avez dit à Thraän quelque chose, mais je ne connais pas ce langage.

    — Oh ! c’est la langue des Fératih, c’est la langue que nous parlons ici, mais ne t’inquiète pas, tu l’apprendras d’ici peu de temps. Sinon, si tu veux vraiment tout savoir, j’ai demandé à Thraän s’il t’avait enfin trouvé et si tu comptais rester caché derrière ce bloc encore très longtemps, me dit-elle en souriant. Ensuite, Thraän t’a dit que j’allais m’occuper de toi, alors quand tu es arrivée face à moi, je t’ai observé de la tête aux pieds et quand j’ai constaté l’état dans lequel tu étais, je lui ai dit que je n’allais pas m’ennuyer ! ajoute-t-elle d’un air moqueur.

    En parlant du loup, celui-ci vient d’arriver. Nous descendons le rejoindre. Nous sortons de la chambre et empruntons le grand escalier. Il ne dit pas un mot et m’observe en train de descendre les marches.

Nous nous arrêtons face à lui. Il m’observe toujours autant, alors Kirah qui passe à ses côtés, le taquine avec ce petit sourire.

    — Alors ? lui demande-t-elle.

    — Tu es très belle ! réplique Thraän d’un air admiratif.

    Je suis très gênée et je ne sais pas du tout quoi lui répondre, alors disons que Kirah vient de sauver la situation à cet instant.

    — Bon ! rassurez-moi, vous ne comptez quand même pas rester planté là tous les deux ?

    Thraän qui m’observe, semble gêné à son tour et baisse les yeux à terre. Il se retourne et s’engage dans le couloir avec Kirah.

Nous nous apprêtons à partir en direction de la ville. Je me rappelle alors du chemin que j’avais fait sur le pthërog, la monture de Thraän. Ça me parait tellement loin et à vrai dire, je n’ai pas vraiment le courage de parcourir une telle distance.

Mais je ne suis pas au bout de mes surprises, car nous allons bien en direction de la ville, mais à mon grand étonnement, nous ne sommes pas sortis de la villa…

    Nous sommes entrés dans cet endroit qui s’apparente à un aquarium géant... Je me demande pourquoi nous sommes là.

    A cet instant même, Kirah qui se trouve devant nous, se retourne et tout en souriant, prononce quelques mots, tout en reculant vers la paroi derrière elle : « À tout de suite… », dit-elle en s’engouffrant dans l’eau.

Je ne veux pas faire un pas de plus. Je place mes mains devant ma bouche, affolée par ce que je viens de voir !

Kirah vient de disparaitre sous mes yeux ! Je ne la vois plus à travers le grand mur d’eau. Elle n’est plus là, elle s’est carrément volatilisée !

Je ne comprends pas ce qui vient de se produire alors Thraän qui constate l’état dans lequel je me trouve vient se positionner face à moi. Il attrape mes mains et tente de me rassurer. Il m’explique ce qu’est cet endroit : « Du calme ! ce n’est rien… tu es ici à l’intérieur d’un téléporteur que nous appelons le Maëlsinh… nous allons traverser ce grand mur et une fois que nous serons de l’autre côté, nous arriverons au point de convergence, " la galerie des sentinelles ". Ensuite, nous retraverserons un autre portail pour arriver de l’autre côté, dans une autre galerie située en ville. Ne t’en fais pas, je ne te laisserai pas ! Tout va bien se passer… »

    Sur ces mots, il se repositionne à côté de moi. Je franchis avec lui le fameux portail en fermant les yeux de toutes mes forces. Et en l’espace de quelques secondes, je suis instantanément téléportée dans un autre endroit.

En fait, j’avais tout faux depuis le début. La pièce que j’avais visitée plus tôt n’était pas du tout ce que je pensais. Ce n’était pas un aquarium géant comme je l’avais imaginé, mais un téléporteur ! Pour moi, ces choses n’existaient que dans les films !

    Une fois arrivés au point de convergence, comme il me l’a expliqué, nous atterrissons dans une autre salle immense en forme d’hendécagone. Je distingue onze parois, possédant chacune une illusion d’optique différente.

Sans rentrer dans les détails, Thraän me demande surtout de bien rester à ses côtés.

Je suis comme une enfant, émerveillée, devant le décor de chacune de ces parois.

    Très vite, nous retraversons une d’entre elles et là, nous arrivons dans une autre pièce, de la même grandeur que celle de chez Thraän, mais avec un décor encore différent. Nous quittons enfin le téléporteur.

    J’examine mon corps : mes bras, mes mains, mes jambes et je touche mon visage, car ce qui vient de se produire me laisse sans voix. Décidément, cette planète n’arrêtera pas de me surprendre !

Nous sommes sur une vaste galerie intérieure avec un décor somptueux : des arcs en plein cintre, une sorte de marbre au sol et un plafond de verre où des sphères, comme celles chez Thraän, mais plus grosses, sont en suspension et une lumière si puissante se dégage de chacune d’elles.

Nous traversons cette longue galerie et tout en avançant, j’observe ce somptueux décor qui m’entoure.

Après quelques mètres et alors que je suis encore en train de contempler l’une des scènes représentées sur le mur à ma gauche, j’entends soudainement la voix de Kirah qui s’adresse à nous : « Ah ! enfin ! J’ai cru que vous vous étiez égarés ! Dis-donc, vous en avez mis du temps… »

Elle est là, aux côtés d’un homme que je n’ai jamais vu enfin, je crois…

Nous sommes enfin à leur niveau. J’observe l’homme sans dire un mot alors Kirah prend la parole.

    — Anna, voici Edhän !

    L’homme qui semble plutôt sympathique l’interrompt aussitôt.

    — Nous avons déjà eu l’occasion de nous rencontrer, n’est-ce pas ? puis il rajoute : « j’espère que tu te plairas sur Nosfuria… »

    Je lui fais un petit sourire, mais à vrai dire, je n’ai aucune idée de qui il est, alors je n’insiste pas.

    — Bon et si on y allait maintenant ? demande Kirah d’une voix impatiente.

    Nous poursuivons tous les quatre sur la galerie et nous arrivons enfin sur cette immense place. Il y a du monde partout : des soldats en armure qui font leur ronde, des hommes et des femmes si richement vêtues qui discutent entre eux ou font des achats, des enfants qui s’amusent et d’autres, plus calmes qui les observent d’un air plutôt triste. Il y a aussi des marchands qui tiennent des stands de marchandises diverses et variées : des épices, du tissu, de la nourriture, des plantes, des pierres, des bijoux et toutes sortes de créatures...

Nous abordons les étalages les uns après les autres. Je découvre des choses que je ne n’ai jamais vues de ma vie.

Kirah et moi marchons devant, tandis que Thraän et Edhän nous suivent derrière tous les deux les bras repliés derrière le dos.

J’aime cet endroit, car ce que j’y vois est hallucinant…

    Sur ma droite, il y a un stand avec des choses qui ressemblent à des fleurs, mais leurs formes sont si étranges. J’aperçois aussi les mêmes choses que j’avais vues dans une coupe posée sur le plan de travail de la cuisine chez Thraän.

Kirah m’explique que ce sont les fleurs et les fruits de Nosfuria. Elle achète un de ces fruits à la marchande pour m’en faire gouter.

    Pendant qu’elle cause avec celle-ci, je profite pour m’approcher d’une magnifique fleur blanche aux reflets dorés que j’ai repérée et qui m’a attirée. Je veux sentir son odeur. Cette fleur sent si bon que je suis tout de suite conquise.

Thraän vient de me rejoindre et m’explique qu’il s’agit d’une fleur de ménélys. Une fleur rare qu’on ne peut trouver que dans le bois de Panfuria situé à l’extérieur de la ville.

Je lui demande si un jour il pourrait m’y emmener, mais il m’annonce d’emblée qu’il faut éviter de s’y aventurer, car ce bois est enchanté et que la nuit des prodiges s’y accomplissent...

De quoi peut-il bien s’agir ? Ce n’est pas très rassurant.

    Kirah a terminé. Elle vient nous rejoindre et nous poursuivons.

    Cette fois-ci un homme sort derrière son stand. Il nous salue tout en s’inclinant. Il vient de dire quelque chose dans cette langue étrange, alors Thraän et Edhän lui répondent. L’homme nous fait la conversation en pointant du doigt quelques-unes de ses marchandises, mais rien ne nous intéresse alors nous ne nous attardons pas.

    Nous arrivons ensuite jusqu’à cette devanture où des créatures impressionnantes sont exposées. Je les regarde de tous mes yeux, car je n’en ai jamais vu des comme ça !

Dans une cage, je peux voir une sorte de petit dragonnet rougeâtre avec une corne au centre de la tête qui bat des ailes. À côté de lui, une autre petite cage avec à l’intérieur une espèce de petit hippocampe bleu foncé, mais pas n’importe lequel, car celui-ci possède des ailes assez larges et n’a aucunement besoin d’eau pour se déplacer !

Une petite créature en liberté avec de grandes oreilles et de gros yeux globuleux vient de se poser sur l’épaule gauche du marchand. On aurait dit un petit singe. Elle pose son regard sur moi tout à coup, alors en voyant ses oreilles et ses énormes yeux, je ne peux me retenir…

J’éclate de rire et Thraän qui me zieute, semble amusé lui aussi.

    Nous sommes sur le point de repartir lorsque j’aperçois cette petite boule de poils… C’est une toute petite créature blanche d’environ vingt centimètres de haut, toute ronde, avec la partie supérieure du crâne plus évasée que le bas du corps. Elle possède de larges oreilles, un pelage délimitant un petit visage formé d’une fine couche de peau laissant apparaitre deux gros yeux noirs proéminents, des petites narines noires et une minuscule petite bouche.

Je m’approche de sa cage et à travers, je lui donne quelques caresses. Son pelage est si doux.

Je suis tombée amoureuse de cette petite bestiole, mais pas Kirah qui se rapproche de moi et semble dégoutée : « Arf ! ne me dis pas que cette chose te plait ? »

Je lui réponds que si, que je la trouve belle et que j’aimerais bien en avoir une.

« C’est cela oui… Nous aurons le temps pour ça, viens maintenant, la visite n’est pas terminée ! », me dit-elle d’un air pas très convaincu.

    Je m’éloigne en me retournant de temps en temps pour zieuter la petite créature.

    Au fur et mesure que nous abordons les étalages, beaucoup de personnes viennent saluer Thraän, dont des soldats. Ils répètent ce geste pour les saluer : le bras droit replié sur le torse, la main posée sur l’épaule gauche, le poing fermé. Les autres font le même geste, mais s’inclinent en même temps devant lui.

Kirah qui est au bras d’Edhän se dirige plus loin vers un stand d’étoffes tandis que moi, je suis arrivée avec Thraän devant un stand où il y a toutes sortes de babioles : des breloques, des vases, des statuettes, des peintures...

Et là, mon regard se pose sur cette petite poupée en porcelaine : la peau très claire, des cheveux blonds et bouclés, des yeux bleus, une robe en soie rouge, des petites ballerines et un chapeau.

Je la prends dans mes mains et je la contemple de tous mes yeux, car il y avait les mêmes sur Terre et celle-ci ressemble beaucoup à ces magnifiques poupées de porcelaine que ma mère collectionnait.

Je la repose et je deviens mélancolique, car je ne sais pas si ma mère et mon frère ont eu la chance de s’en sortir après l’invasion…

    Nous nous apprêtons à rejoindre Kirah et Edhän lorsqu’un homme plutôt séduisant accompagné de gardes vient nous accoster.

Les deux hommes se saluent et commencent à discuter. Je les observe sans dire un mot.

« Anna, je te présente le Seigneur Bragg », m’annonce Thraän.

    C’est un bel homme, très élancé et aussi musclé que Thraän. Ils sont vêtus à peu près de la même façon, mais dans une sorte de cuir noir tressé différemment. Il a le teint clair, de beaux yeux verts et sa longue chevelure blonde, attachée en demi-queue, lui arrive dans le bas du dos.

Là, l’homme me salue très poliment et se met à parler ma langue : « Je suis très honoré, Anna… j’espère que Nosfuria vous plaira… » me dit-il.

Après avoir fait sa connaissance, et à première vue, le Seigneur Bragg a l’air plutôt sympathique. Il n’est pas aussi froid que Thraän et parait même plutôt agréable.

Je lui souris, puis il s’adresse de nouveau à Thraän, mais en fératih, cette fois-ci. Et avant de s’en aller, il rajoute : « Maintenant, je dois vous abandonner, je dois rejoindre mes hommes, mais nous aurons l’occasion de nous revoir, je l’espère… »

    Mais alors que nous nous dirigeons vers Kirah et Edhän, mon regard se pose cette fois-ci sur des enfants, debout, à quelques mètres de moi. Etrangement, les quatre petits garçons me regardent eux aussi.

Le plus grand d’entre eux me dévisage avec des yeux remplis de colère, tandis que dans le regard des trois autres, je ne décèle aucune émotion particulière. D’ailleurs, ils ont le regard si vide.

    Thraän vient d’observer à son tour les quatre garçons. Il jette ensuite un œil discret sur Anna, car il connait bien ces gamins...

Ce sont les quatre petits garçons qu’Anna protégeait sur Terre. Il redoute la réaction de la jeune femme, car si elle pouvait se souvenir d’eux, il serait bien embarrassé…

Il s’attend à une quelconque réaction de sa part, mais rien ! Les effets du caisson et sa perte de mémoire y sont forcément pour quelque chose.

En attendant, elle n’a gardé aucun souvenir d’eux. Ils sont là, debout, à quelques mètres d’elle, mais elle n’a aucune idée de qui ils peuvent bien être.

Cela semble bien arranger le Commandant, car Anna a vécu suffisamment d’évènements bouleversants ces derniers temps et si elle pouvait se remémorer un instant sa séparation avec les enfants cela l’a ferait souffrir davantage et n’aurait en rien arrangé la situation.

    Thraän me fait remarquer qu’il est temps de rejoindre les autres. Sur le chemin, je lui reparle de cette petite créature que j’ai vue juste avant. Il m’explique alors qu’il s’agit d’un poa-moah. Ces adorables petites créatures sont issues d’une autre planète, mais malheureusement, il y en a très peu de nos jours.

    Nous arrivons enfin aux côtés de Kirah et d’Edhän. Thraän leur explique que nous devons les abandonner pour nous rendre au medh’yova.

« Je passerai te voir plus tard Anna, nous avons énormément de choses à voir ensemble... » me fait savoir Kirah qui semble déjà m’apprécier.

Tous les deux, nous partons pour ce fameux endroit.



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