L'enfant prodige

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Ils étaient mal en point.

Tous les dragons gisaient au sol depuis maintenant une demi-journée. Certains étaient inconscients, d'autres hurlaient de douleur ou de désespoir. Leurs pattes arrières s'étaient transformées en glaçons petit à petit, et la douleur s'intensifiait à chaque seconde.

 Ysil ne perdait pas espoir. Il avait confiance en son fils et savait qu'il reviendrait avec un peu de flamme, pour les sauver tous. Il fixait son regard à l'horizon, prêt à voir Usif arriver en volant, la torche allumée. Le voyage pour un dragon normal durait environ dix heures, mais le chef n'était pas dupe : son fils ne maîtrisant pas le feu, il lui serait plus difficile de venir à bout des nombreuses créatures qui peuplaient la montagne ainsi que du froid qui y régnait. Il avait calculé la durée supplémentaire qu'il mettrait, et était arrivé à la conclusion que deux ou trois heures de plus devraient suffire. Il guettait sans relâche, rassurait les autres victimes, et crut même plusieurs fois apercevoir un flambeau briller au loin.

 Cinq heures étaient passées, et plusieurs pensées traversèrent la tête du dragon divin. Si son fils avait échoué ? S'il n'avait pas survécu aux températures extrêmes ? Ou pire encore, s'il avait changé d'avis et qu'il s'était enfui loin d'ici, les abandonnant tous ? Après tout, il ne s'était jamais senti à sa place dans ce village et les moqueries qu'il subissait quotidiennement n'arrangeaient en rien la situation. Quel rôle avait-il joué en tant que père ? Il passait tout son temps à enquêter sur la mort de sa femme sans se soucier de sa progéniture. Il ne s'était jamais réellement préoccupé de ses problèmes, convaincu qu'il pouvait se débrouiller seul. Si ce n'était pas le cas ? Si son fils avait plus besoin de lui qu'il n'osait se l'avouer ? Il avait dû se sentir terriblement seul et rejeté. Ysil se promit qu'il discuterait avec lui et qu'il lui prêterait main forte dès son rétablissement.

 Trois heures plus tard, il conclut finalement que son enfant ne reviendrait pas. Mais il n'était pas en colère, plutôt triste et compréhensif. Rien ne retenait son fils ici. Il voulut assurer son rôle de chef et passer outre ses douleurs pour atteindre la flamme. Il savait qu'il ne pouvait pas y arriver dans son état actuel, mais il ne s'autorisait pas à baisser les bras. Il rassembla toutes ses forces pour se mettre sur ses pattes et tenir debout sans tomber. Il suait à grosses gouttes, et son supplice lui faisait perdre la tête. Il avait l'impression que toutes les habitations autour de lui et tous les corps s'envolaient, le laissant seul sur le sol. Puis ce fut au tour des pavés de la rue de léviter, et de la nourriture renversée. Tout ce qui l'entourait flottait à quelques centimètres, et prenait de la hauteur au fur et à mesure. Même l'air environnant disparaissait et s'évaporait avec le reste.

 Il était plongé dans un vide infini qui le serrait comme un étau, lui bloquant la respiration. Il voyait tout son village par en-dessous, comme s'il s'enfonçait dans de l'eau pour rejoindre l'endroit le plus profond de la Terre, sans possibilité de retour. Tout lui semblait maintenant si lointain qu'il se mit à douter de sa propre existence. Était-ce les premiers pas vers sa dernière heure ? Il ne voulait pas s'y résoudre et il se concentra de toutes ses forces pour rejoindre ce monde qu'il connaissait tant. Mais ses efforts ne servaient à rien, il continuait de couler de plus en plus, perdant progressivement conscience. Il sentait qu'il allait toucher le fond lorsqu'une main plongea dans cette eau et le tira à la surface in extremis. Une voix qui semblait provenir de très haut lui murmurait en le secouant :

- Restez avec nous chef, ne craquez pas maintenant !

Sa vue se clarifia et les traits de son sauveur prirent la forme du visage de Lugi, le jeune centenaire sans queue. Tout le bas de son corps était gelé, il avait rampé pour atteindre son supérieur lorsqu'il s'était aperçu qu'il était inconscient. Il avait lutté comme jamais auparavant pour ne pas sombrer lui aussi. S'il y en avait un qui devait disparaître, ça ne pouvait pas être son chef, un dragon quasi parfait, alors que lui n'était qu'un simple dragon sans queue, avec le corps massivement tacheté.

- Allez chef, s'il vous plaît ! insista-t-il en redoublant d'efforts. Par pitié, reprenez vos esprits.

Ysil reprit conscience laborieusement et remercia son sauveur qui s'évanouit quelques secondes après. Il rampa difficilement jusqu'au mur et tenta de se relever, mais il réalisa que ses pattes avant étaient en train de geler, et qu'elles ne pouvaient pas l'aider. Il ne vit qu'un immense flash violet provenir de la montagne, puis il tomba au sol et attendit sa fin.

 Usif était parti depuis maintenant 23 heures, et tous les dragons étaient inconscients, même si aucun n'avait encore perdu la vie. Seul leur chef était encore réveillé, luttant pour ne pas sombrer. Il comptait les minutes les unes après les autres et avait déjà conclu que c'était la fin de son peuple. Sa dernière pensée fut pour son village, qu'il avait tant choyé. Mais il n'avait pas été assez fort pour le protéger de cette dernière conspiration des satyres. La glace recouvrait l'intégralité de son corps, ne laissant encore opérationnels que son nez et ses yeux.

 Soudain, il ressentit qu'une profonde chaleur provenant de loin, arrivait vers son village à la vitesse de l'éclair. Il scruta les environs sans rien apercevoir, et pensa que le gel le faisait divaguer. Il lui sembla pourtant reconnaître une chaleur familière, semblable à celle de sa femme. La glace recouvrait maintenant son nez, et il lui fut impossible de bouger la moindre parcelle de son corps. Il se résigna donc à voir Trea descendre des cieux pour venir le chercher, tel un ange salvateur. Ses yeux se frigorifièrent lentement, sa perception se troubla, et sa conscience s'envola peu à peu. Il ne pouvait plus lutter.

 Ses paupières se fermaient lorsqu'un énorme brasier violet jaillit du ciel. La flamme se déplaçait à une allure folle en survolant le village, incendiant les dragons qui reprirent progressivement leurs esprits et le contrôle de leurs corps. Lorsque la flamme le recouvrit, Ysil ressentit la même douce chaleur que lorsque Trea l'enlaçait. Il était apaisé et rassuré, comme si rien au monde ne pouvait le blesser. Il se releva doucement et ce qu'il vit lui réchauffa le cœur plus qu'aucun feu ne pouvait le faire : la source violette descendait vers lui, et deux immenses ailes rouges se dessinaient dans le ciel, de plus en plus nettement. Elles se posèrent devant lui et le vieux père qu'il était reconnut instantanément son fils, bien qu'il n'ait plus la même apparence. Il semblait plus grand, plus musclé, plus serein. Ses épines dorsales avaient percé et ses écailles brillaient d'une couleur éclatante. Il dégageait une aura apaisante et réconfortante, qui forçait l'admiration et le respect.

- Désolé d'être en retard, commença-t-il en regardant son père qui le dévisageait. J'espère ne pas vous avoir fait trop attendre.

- Que s'est-il passé ? questionna le roi, encore bouleversé par tant d'émotions. C'est toi qui as… ? Mais comment… ? Je croyais que…

- Disons que mère m'a aidé.

Il raconta toute l'histoire de son voyage dans les moindres détails. Les sentiers tortueux, les centaures, les cyclopes, le minotaure, le froid, la satyre, l'ascension, le sommet de la montagne, le trou et la grotte, la flamme éternelle, Trea, Pyro qui les avait empoisonnés et enfin la délivrance de son feu libérateur. Tous les dragons s'étaient approchés de lui et buvaient ses paroles, écoutant son incroyable récit.

- C'est donc notre père à tous qui nous a joué ce tour ? conclut Juki à la fin de l'histoire. Je ne te crois pas, il n'aurait jamais fait ça à son peuple !

- C'est vrai, il ment ! surenchérit Arti.

- Il ne ment pas, coupa Monsieur Kijo, le prof d'histoire. Pyro était un dragon exceptionnel, d'une grande force et doté de pouvoirs qui dépassent l'entendement. Mais il n'aimait pas ses congénères, qu'il jugeait trop faibles pour être comparés à lui. Il n'aurait jamais hésité à tous nous tuer s'il avait été parmi nous.

Usif n'eut pas le temps de répondre : une bombe gelée tomba sur leur village, piégeant tout un quartier dans un immense glaçon. Ils levèrent la tête et virent des milliers de ballons survoler leur domaine, lâchant des torpilles.

- Les satyres, je les avais oubliés ! cria Usif.

- Tout le monde à son poste ! commanda autoritairement le roi. Les femmes et les enfants, dans vos maisons, les autres, avec moi !

- Papa, je pense pouvoir résoudretout ceci sans qu'on ait à se battre, laisse moi essayer !

- Fiston, ce n'est pas le moment de discuter. Tu es devenu un grand dragon, mais tu n'es pas encore prêt à diriger une armée, laisse moi faire !

- Non, ce n'est pas ce que je voulais dire, je veux…

Il n'eut pas le temps de finir sa phrase que son père s'élança vers les ennemis, accompagné de plusieurs escadrons volants. Mais Usif, qui ne s'était pas résigné, quitta le sol en direction de l'île des satyres. Il fonçait à une vitesse fulgurante, évitant avec précision les ballons et explosant les bombes avant qu'elles ne touchent le sol. Il parvint à sauver plusieurs dragons, touchés par les projectiles, en leur soufflant dessus. Il était maintenant devenu la parfaite arme de défense contre leurs ennemis, mais rester ici à soigner les siens n'arrêterait pas la guerre. Il dépassa rapidement le blocus et atteignit en un rien de temps sa destination.

L'île, toute en longueur, était très symétrique. Au milieu, un chemin en terre reliait la salle du trône au village situé en contrebas. Les maisons étaient parfaitement alignées de chaque coté de la route, toutes sur le même modèle. Les écoles, librairies, ou tout autre lieu de vie commune ne dérogeaient pas à la règle. À l’extérieur du village se trouvaient plusieurs potagers et vergers, ainsi que des écuries où les satyres pouvaient faire réparer leurs fers. Leurs camps d’entraînement se situaient à mi-chemin du palais, et on pouvait y voir plusieurs mannequins en forme de dragons, ainsi que des cibles et des préparations pour bombes.

Usif fit irruption par le plafond et atterrit dans une grande salle ronde au papier peint rose. Au bout du tapis rouge, la reine siégeait sur un immense trône, rose lui aussi. Au centre de la salle, un gigantesque chaudron, dans lequel une petite flammèche vacillant timidement occupait tout l'espace. Le dragon fut rapidement cerné par une armée de satyres munis de différentes armes glacées. Les archers décochèrent leurs projectiles, et une pluie de flèches de glace fondirent sur Usif qui ne broncha pas. L'assaut dura une dizaine de secondes, et lorsqu'il fut fini, le dragon chauffa son corps à forte température, ce qui laissa échapper des petites flammes violettes qui firent disparaître les traces de givre. Il fixa le chef et dit calmement :

- Je suis venu négocier avec vous. Il faut cesser cette guerre.

- Qui es-tu pour oser pénétrer dans le palais ? répliqua-t-elle, impressionnée que son attaque n'ait fait aucun dégât.

- Je me nomme Usif, je suis…

- Le non-pyrotarien ?

- Ce surnom date un peu. Je viens vous demander l'arrêt de votre assaut sur mon village ainsi que le retrait de vos troupes et la promesse d'un accord de paix entre nos deux peuples.

- Pourquoi est-ce que je ferais ça ? Votre peuple est barbare et mesquin, vous vous en prenez à nous sans raison, et vous nous empêchez d'accéder à la flamme éternelle pour nous laisser mourir de froid et de faim.

Usif prit conscience que le manque de communication entre les satyres et les dragons avait déformé la réalité, et que chaque tribu se trompait sur les intentions et les raisons de l'autre. Chacune croyait l'autre immorale, faisant la guerre par pur égoïsme.

- Les dragons n'ont plus aucune raison de vous déclarer la guerre, et réciproquement. Votre quête pour la flamme éternelle n'a plus de raison d'être, elle n'est plus sur la montagne.

Tous les satyres écarquillèrent les yeux de surprise à cette révélation, et l'un des gardes confirma, stupéfait :

- Il a raison votre altesse, la montagne ne brille plus ! Ils ont fait disparaître le feu sacré, nous sommes perdus !

- Calmez-vous, ordonna le dragon en voyant les gardes s'affoler. C'est pour cela que je suis là.

Il souffla dans sa patte une petite étincelle violette qui, par sa chaleur inouïe, réchauffa toute la pièce. Les satyres, impressionnés, cessèrent de s'agiter et le fixèrent avec étonnement.

- Je peux vous donner un petit peu de cette flamme, en échange de mes requêtes.

- C'est impossible. Si tu es bien Usif, tu ne peux pas cracher de feu, surtout pas de feu violet.

- Il y a eu quelques changements récemment. C'est à prendre ou à laisser. La paix contre le feu.

La reine hésita longuement. Était-ce une proposition sérieuse, ou bien n'était-ce que du bluff ? Comment pouvait-il posséder un tel pouvoir ? Mais si c'était vrai, pouvait-elle laisser passer une telle chance ? Elle n'avait aucune envie de négocier avec un dragon, encore moins de devenir amie avec eux, et surtout pas de les côtoyer.

- C'est d'accord, conclut-elle finalement. Mais je ne veux parler qu'à vous ! Si un autre dragon s'avise de débarquer ici, nous prendrons ça comme une attaque personnelle et une déclaration de guerre. Qu'on apporte un papier et une plume !

Une satyre entra en courant et Usif reconnut immédiatement celle qu'il avait croisée à la montagne. Elle le fixa, abasourdie sans oser rien dire.

- Vous vous connaissez ? questionna la reine.

- Oui je la connais, répondit le dragon.

Elle baissa la tête, le visage rougi par la colère. Sa révélation allait attirer la honte sur elle. Non pas parce qu'elle l'avait attaqué, mais parce qu'elle n'avait pas réussi à l'éliminer, et qu'elle avait même contribué à le rendre plus fort.

- Elle m'a sauvé face à un minotaure, ajouta-t-il en la regardant.

Elle releva les yeux et le dévisagea, médusée par ses paroles. Elle donna les objets à sa reine et se positionna à coté du trône. Usif et la chef des satyres rédigèrent un traité de paix sous le regard méfiant et attentif de tous les gardes alentours. Quand ils eurent écrits la dernière ligne, les deux trempèrent leurs pattes dans l'encre et tamponnèrent le bas de la feuille. Alors seulement le dragon cracha dans le chaudron une flamme qui embrasa le récipient et réchauffa intensément toute la salle, tandis que la reine envoya une missive urgente pour les troupes présentes au village des dragons. Puis ils se firent face, et se serrèrent les pattes en disant :

- Moi, Usif, me proclame porte-parole des dragons auprès du peuple des satyres et promets sur ce parchemin de vous ravitailler en feu sacré quand vous en aurez besoin.

- Moi,Yelga, reine des satyres, promets de cesser les combats contre les dragons et de travailler en collaboration avec leur porte-parole pour une paix durable.

Les serments formulés, le jeune dragon s'envola vers son village. Il vit les ballons d'assaut cesser le feu et faire demi-tour. Il dégela les habitations, sauva ses camarades et se posa au milieu de la place, où tous ses semblables le rejoignirent. Il leur expliqua les termes du contrat et la décision qu'il avait prise de les fournir en flamme éternelle. Son discours provoqua l'admiration chez certains, l'indignation chez d'autres, mais tous s'accordaient à dire qu'il avait trouvé un moyen efficace de mettre fin à cette guerre. Aucun n'osa le contredire, ni lui demander d'annuler l'accord tant il forçait l'admiration et le respect.

- Si je comprends bien, demanda le chef, tu nous as sauvé une fois de plus ?

Usif ne répondit pas et baissa humblement la tête, mais il était conscient de l'extrême fierté de son père et de la grande majorité du village :

-Nous sommes tous d'accord ? demanda Ysil à ses conseillers d'une voix solennelle, en guettant leur approbation. Chacun fit oui de la tête, et le chef se tourna vers le jeune dragon.

- Bien. En tant que chef des dragons et roi de cette île, je tiens à te remercier pour toutes les aventures que tu as menées pour nous sauver. Tu as couru d'innombrables risques, toi qui ne pouvais pas cracher de feu, et tu es maintenant détenteur de la flamme sacrée, la plus puissante que puisse avoir un dragon. Tu as également instauré une paix durable avec nos voisins et ramené la tranquillité et la quiétude en ces lieux. Usif, mets-toi à genoux !

Il s’exécuta, conscient de ce que cette cérémonie signifiait.

- En tant que représentant de ce peuple, pour le courage, la force et la sagesse dont tu as fait preuve durant ta vie, je me fais l'honneur de te nommer dragon divin et chef suprême des dragons !

Tout le village souffla en l'air, provoquant un embrasement du ciel visible de plusieurs lieues à la ronde.

- Mais en tant que père, reprit le roi, je ferai la passation de pouvoir uniquement quand tu auras fini l'école ! Avoir un chef ignorant, et puis quoi encore ?

Usif sourit. Il reconnaissait bien là le caractère de son géniteur, qui s'approcha et l'enlaça longuement. Puis il lui murmura à l'oreille :

- Aucun père au monde ne pourrait être plus fier de toi que je ne le suis maintenant, mon fils. Tu es non seulement notre héros, mais aussi ma fierté. Le plus précieux d'entre nous.

Il le regarda fixement, puis enchaîna sévèrement :

- Et bien, qu'est-ce que tu attends ?? Allez hop en classe, tu ne deviendras pas chef des dragons en traînant dans la rue ! Et vous aussi, tout le monde au travail !

Les dragons se dispersèrent. Usif regarda son père puis s'envola vers l'école. Ysil se rendit sur la place Trea, regarda la statue centrale, et murmura « tu avais raison » avant de retourner à son poste. Il jeta un dernier coup d’œil en direction de l'école et vit son fils, entouré de ses camarades, marchant vers sa classe.

Son fils.

Usif « le précieux » dragon céleste.

Le dragon divin.

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